Ancien Président du CRIF
Les critiques fusent contre Israël pour avoir déclenché la guerre au Liban, mais ce n’est pas Israël qui a déclenché cette guerre ! Il réagit avec près d’un an de délai à une guerre que le Hezbollah a lancée contre lui le 8 octobre 2023. Ce jour-là, au lendemain des massacres perpétrés par le Hamas, il lance des roquettes et des missiles sur Israël. Depuis lors il en a envoyé près de 10 000, une trentaine en moyenne chaque jour. La plupart ont été interceptés, ce qui fait que certains les assimilent à d’inoffensifs pétards. C’est faux, ils sont destinés à tuer, et ils ont tué. Beaucoup ont déjà oublié Majdal Shams, ce village druse israélien dont douze enfants âgés de 10 à 18 ans ont été tués le 27 juillet 2024, et ils ne sont pas les seules victimes israéliennes.
Imagine-t-on qu’un pays voisin, disons la Belgique, envoie des missiles sur la France, que les populations du Nord, du Pas-de-Calais, des Ardennes et de la Meuse soient obligées de s’enfuir, que ces départements deviennent inhabités et que la France ne réplique pas ?
C’est ce qui se passe depuis près d’un an avec les habitants du Nord de la Galilée. 80 000 ont abandonné leur lieu de vie. Pour rappel, ces territoires sont à l’intérieur de la ligne internationalement acceptée de 1949, et, contrairement aux Palestiniens, le Hezbollah ne peut arguer de la moindre brimade historique et de la moindre revendication territoriale : cela ne l’empêche pas d’avoir un seul but : la destruction d’Israël.
Ceux qui prétendent qu’un cessez-le-feu est nécessaire et qu’une solution diplomatique est possible veulent oublier qu’en 2008 la résolution 1701 a été votée par le Conseil de Sécurité. Elle enjoignait au Hezbollah de se retirer au nord du Litani, à 30 kilomètres de la frontière. Elle n’a jamais été respectée, le Hezbollah envoie des missiles quand il le veut et la force de l’ONU, la FINUL, joue au sud du Litani un rôle particulièrement inutile.
L’objectif du Hezbollah était de saigner Israël par une guerre d’attrition et de rendre inhabitable le nord du pays. Mais il semble qu’il ait voulu aussi réitérer les exploits du Hamas et effectuer aussi massacres et prises d’otages. Il faudrait peut-être que les Israéliens s’excusent d’avoir empêché l’exécution de ce plan…
On critique Israël à cause du nombre de morts civiles lors des bombardements mais tous les bombardements, aussi ciblés soient-ils, font des victimes civiles et quelle que soit la réalité des distinctions entre civils et militaires, quelles que soient les précautions des Israéliens, des civils paient effectivement un lourd tribut. La guerre, c’est terrible. 30 000 civils normands peut-être ont été tués dans les bombardements alliés qui ont précédé le Débarquement.
La situation est d’autant plus tragique que, comme le Hamas, le Hezbollah cache une partie de son arsenal chez des civils. L’alternative au bombardement, l’envoi de troupes terrestres soulèverait les mêmes protestations. Celles-ci ont malheureusement aussi un aspect partisan : l’opération sur les bippers et talkies walkies a entraîné aussi des accusations contre Israël. Pourtant, les victimes civiles collatérales ont été rares et il n’y a probablement pas eu dans l’histoire de la guerre d’opération plus précise, puisque celui qui était ciblé portait le bipper qui prouvait son appartenance au Hezbollah.
Certains disent que cette guerre est la guerre de Benyamin Netanyahu, et qu’il la mène pour des motifs personnels. L’engagement au Liban était réclamé par une grande part de la hiérarchie militaire, et on reprochait plutôt au Premier ministre ses atermoiements à ce sujet. Répéter qu’il mène cette guerre pour de sombres raisons personnelles, c’est affaiblir la légitimité d’Israël qui lutte pour son existence. Cela n’a rien à voir avec le fait d’être ou non un partisan de Benyamin Netanyahu, une commission d’enquête est une obligation historique et morale, mais après la guerre, – et cette commission devra être impartiale.
La France a pris une position en flèche sur la guerre au Liban
Je ne suis pas un critique systématique du Président Macron, mais je suis abasourdi. Alors que la France vient de soutenir un des textes les plus anti-israéliens de l’histoire de l’ONU, alors que les bombardements n’ont pas encore commencé et qu’on est sous le choc de l’épisode des bippers, qui a essentiellement frappé le Hezbollah et pas le peuple libanais dans son ensemble, voici cette déclaration dont la solennité frise à la posture théâtrale.
Le Liban dont parle le Président, un modèle du vivre ensemble dont la France serait le protecteur, ce Liban n’existe plus et Israël n’est pas responsable de sa disparition. Les conflits intercommunautaires, les calculs personnels des chefs et la détermination de l’Iran ont abouti à ce qu’est le Liban aujourd’hui, un pays failli, sous la mainmise de la mafia terroriste du Hezbollah, que le Président Macron n’a même pas cité dans son discours.
A-t-il eu une pensée pour ces 58 parachutistes français qui en 1983 ont péri dans l’explosion de l’immeuble du Drakkar fomentée par le Hezbollah ? Savait-il que Ibrahim Aqil, le chef militaire qu’Israël venait d’éliminer, avait été un des organisateurs de cet attentat ? S’est-il demandé quelles options s’offraient à Israël, devant un ennemi qui veut sa disparition et a commencé une guerre où il prend le Liban en otage ?
Il y a quatre ans, le Président Macron avait de façon spectaculaire et inefficace assuré le Liban du soutien de la France après l’explosion du port de Beyrouth. Le Liban n’a pas osé incriminer le Hezbollah, responsable de cette explosion et la France n’a pas osé s’exprimer sur ce déni de justice évident.
La France s’active aujourd’hui pour un cessez-le-feu transitoire en indiquant que le Liban ne se relèverait pas d’une guerre.
Le Liban, chacun le sait, mais personne ne veut le dire, ne redeviendra un vrai pays que si le Hezbollah est démantelé, mais il est plus populaire aux Nations Unies de bloquer contre Israël le balancier du « en même temps » et de prononcer solennellement des appels à la paix dont le Hezbollah fait semblant d’être le plus fervent partisan…
Richard Prasquier, Président d’honneur du Crif
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