Blog du Crif - Hommage à Robert Castel, humoriste algérien, de El Gusto au Pataouete

17 Décembre 2020 | 302 vue(s)
Catégorie(s) :
France

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Actualité

Dès le début de l’offensive russe contre l’Ukraine, nous avons, le 23 février dernier, proposé à nos lecteurs, une étude sur les Juifs d’Ukraine. Depuis quelques jours, le conflit semble s’étendre à deux autres pays, la Finlande et la Suède. Nous vous proposons de découvrir les communautés juives de ces deux pays. Aujourd’hui, les Juifs de Finlande.

Mardi 19 avril 2022, le Crif et le Mémorial de la Shoah ont organisé une cérémonie virtuelle pour commémorer le 79ème anniversaire du Soulèvement du ghetto de Varsovie. Un moment très émouvant lors duquel nous avons rendu hommage aux Hommes qui se sont soulevés pour leur liberté.

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Opinion
Le 10 janvier 2023, Yonathan Arfi, Président du Crif, s'est rendu à la cérémonie en hommage aux victimes de la rafle de Libourne du 10 janvier 1944. Il a prononcé un discours dans la cour de l'école Myriam Errera, arrêtée à Libourne et déportée sans retour à Auschwitz-Birkeneau, en présence notamment de Josette Mélinon, rescapée et cousine de Myriam Errera.  
 

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Francis Kalifat a bien connu Robert Castel, durant les dernières années de sa vie. Ce fut une très belle rencontre, il garde en mémoire de beaux souvenirs. Francis Kalifat était présent à son enterrement. 

Et « Ouala », comme on disait là-bas. Il nous a quittés.

Il nous amusait. Il était un peu la mémoire « Pataouète », Robert Moyal, plus connu sous le nom de Robert Castel*.

« Pataouète », c’est quoi ? Ma foi, c’est une variante du français baragouiné de cette Algérie lorsqu’elle était française. C’est un idiome inventé, truffé de mots issus de l’arabe, de l’espagnol, de l’italien, du kabyle, de l’occitan, du corse et de bien d’autres, déformés par l'usage local.

Le Prince du calambour lourd parfois, mais plein de générosité, a rendu célèbre, avec ses deux complices de l’époque : Anne Berger et Lucette Sahuquet, la fameuse pièce La Famille Hernandez, composé de scènes de la vie quotidienne d’une famille de pieds-noirs.

Belle rencontre entre ces deux femmes, déjà sur les planches à Alger en 1957, et Robert Castel. Conquis par le jeu des deux actrices, il fit des pieds et des mains pour être intégré à leur équipe, qui pourtant au départ n’avait pas conçu de rôle pour lui. L’histoire retiendra la phrase de Lucette Sahuquet : « On va donner à Robert le rôle d’un bègue comme cela la pièce durera plus longtemps ».

Et c’est le succès immédiat qui va dépasser le cadre de l’Algérie française de l’époque, pour atteindre des sommets, avec des représentations à travers le monde entre 1957 et 1959. C’est avec sympathie, beaucoup d’humour et de dérision que l’on découvre ainsi la vie d’une famille pied noir de Bab-el-oued. Quartier truculent et populaire d’Alger, dans cette Algérie de l’après guerre, où les conflits religieux sont loin derrière et où le bon vivre ensemble est à la mode pour ne pas dire de rigueur.

Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, puisque Robert Castel épouse Lucette Sahuquet, pied noir comme lui, mais catholique. Elle mourra en 1987. Albert Camus ne disait-il pas en parlant de la famille Hernandez « Je reconnais mes fils et mes frères à ce rire d’amitié qui me prend devant eux ».

Bien que cantonnés dans les seconds rôles, on le verra dans de nombreuses comédies telles le Grand blond avec une chaussure noire ou Je suis timide mais je me soigne, s’aventurant aussi dans des projets moins burlesques à l’image de l’insoumis ou deux hommes dans la ville. Il fera aussi partie des Grosses têtes de Philippe Bouvard sur RTL.

Mais il n’oubliera jamais qu’il commença sa carrière comme musicien, à l’image de son père, Elie Moyal, plus connu sous le pseudonyme Lili Labassi, chantre du répertoire des musiques andalouse de l’Algérie. D’ailleurs il ne reprendra le violon de son père qu’à l’âge de 57 ans.

Pour ma part j’ai eu l’occasion de connaître et de rencontrer Robert Castel en 2012. Alors que j’étais président de l’association MORIAL, mémoire et traditions des juifs d’Algérie, nous avions décidé de faire un grand colloque, en collaboration avec le centre communautaire de Paris de la rue Lafayette, à  l’occasion des 50 ans de notre départ d’Algérie. Nous avions organisé, sur 4 jours, une série de conférences, films, débats, musique, que nous avions intitulé « 2 000 ans d’histoire juive en Algérie : 50 ans après ». Le point d’orgue clôturant cette grande manifestation était la diffusion du film El Gusto, en présence de la réalisatrice Safinez Bousbia et de Robert Castel.

El gusto, réalisé en 2012, c’était l’histoire d’un groupe de musiciens nés en Algérie, juifs et musulmans, séparés par l’Histoire depuis 50 ans et qui subitement, sous l’inspiration de Safinez Bousbia, se réunissaient à nouveau  en 2012 pour partager leur passion commune : la musique Chaabi.

El gusto rappelait cette musique populaire inventée au milieu des années 1920 au cœur de la Casbah d’Alger. Robert Castel et ses vieux camarades, juifs et musulmans, retrouvèrent, l’histoire d’un moment, cette belle amitié et cet amour commun qu’ils avaient eus pour ces mélodies qui avaient bercé leur jeunesse « là-bas » au sein du même orchestre.

Ce fut un moment fort et de fraternité pour moi et MORIAL ce jeudi 22 novembre 2012 lors de la projection de ce film El gusto, au milieu de ces gens qui se retrouvaient comme s’ils s’étaient vus la veille avec malheureusement beaucoup de cheveux blancs cette fois-ci.

Didier Nebot

 

* Né le 21 mai 1933 à Bab El Oued, Robert Moyal, de son vrai nom, s'était fait connaître avec la pièce de théâtre "La famille Hernandez", montée en 1957 avec les comédiennes Lucette Sahuquet et Marthe Villalonga. Le comédien, humoriste et musicien Robert Castel est connu comme le père de l'humour "pied-noir".

 

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