Par Simone Rodan-Benzaquen, directrice de l'American Jewish Committee (AJC) de Paris et de l'Europe, publié dans le Figarovox le 2 mai 2016
S'il existe un conflit abondamment traité par les médias, c'est bien celui qui se déroule depuis des décennies au Proche-Orient. Alors que des dizaines de conflits, notamment au Darfour, en Côte d'Ivoire, au Mali ou, bien sûr, en Syrie, font des milliers de morts, c'est toujours vers Jérusalem ou Gaza que sont tournées les caméras.
Toujours et encore le conflit israélo-palestinien qui fait la une des journaux.
Nombreux sont pourtant ceux qui, dès le début de la deuxième intifada, ont mis en garde contre une surreprésentation et surtout une présentation biaisée et malhonnête du conflit israélo-palestinien par ces médias. Ils s'étonnaient que nos journaux parlent de «la mort d'un bébé colon» pour évoquer l'assassinat d'une petite fille de dix mois par un terroriste palestinien ou de «l'arraisonnement d'une flottille pacifiste» par l'armée israélienne, alors qu'elle était composée de militants armés de l'organisation islamiste turque IHH appelant à «tuer les Juifs».
Sans faire de procès systématique à l'ensemble de la presse française, ce qui serait profondément injuste, force est de constater que celle-ci a contribué à faire naître une approche souvent manichéenne du conflit israélo-palestinien chez nos compatriotes.
Tandis que le nombre d'actes antisémites n'a jamais été aussi important en France depuis la Seconde Guerre mondiale, que des enfants juifs ont pu, à Toulouse, être tués à bout portant devant leur école et des clients d'une épicerie kasher fusillés à la kalachnikov pour venger, selon leurs bourreaux, «les victimes palestiniennes», il est grand temps de voir s'imposer la raison dans toutes les salles de rédactions. La responsabilité de la presse française est immense. Le traitement du conflit israélo-palestinien doit être sujet à la plus grande vigilance.
Les événements, ces derniers temps, hélas, n'incitent pas à être davantage optimistes sur l'objectivité des médias français sur ce conflit. Après les attentats de Bruxelles, une grande partie de la presse française présentait une cartographie exhaustive du terrorisme islamiste international. Vingt pays touchés entre le 13 novembre et Bruxelles. Après plusieurs relectures, Israël n'y figurait pas. Pourtant, depuis septembre 2015, plus de 300 actes terroristes contre les civils israéliens, au couteau, à la machette, à la voiture bélier, à la mitraillette et plus récemment à la bombe, à Jérusalem, ont eu lieu. Dans le meilleur des cas, ils auront été passés sous silence, au pire légitimités, voire travestis.
Que penser par exemple d'une dépêche AFP qui titrait:«Attentat à Jérusalem, un Palestinien succombe à ses blessures.» Il faudra attendre les dernières lignes de la dépêche pour comprendre (après avoir cité son nom, son âge, et le nom de son village occupé, selon le ministère de la Santé palestinien) qu'il s'agissait du terroriste qui avait déclenché sa ceinture d'explosifs ; le tout sans même évoquer l'acte ignoble qui avait pris, comme souvent, pour cible des civils. Les terroristes deviennent victimes, les victimes sombrent dans l'anonymat.
On se demande quelle inconscience peut encore aujourd'hui pousser des personnes censées informer à faire passer un terroriste qui décide délibérément d'assassiner des innocents pour une victime.
Le terrorisme qui tue en Israël est pourtant le même que celui qui a tué à Paris, Bruxelles, Madrid, Londres ou Copenhague. L'idéologie djihadiste, et la négation des valeurs humaines, est la même lorsqu'elle frappe des civils israéliens ou des civils français ou belges...
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