Tribune
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Publié le 5 Février 2016

Antisémitisme dans les banlieues, réalité et remèdes

Philippe Doucet a rencontré Iannis Roder pour évoquer l'antisémitisme au collège

Publié sur le Blog du HuffingtonPost par Philippe Doucet Député du val d'Oise et ancien maire d'Argenteuil 
 
Je recevais le 26 janvier dernier Iannis Roder, professeur d'histoire-géographie dans un collège de Seine-Saint-Denis, pour faire le point sur l'antisémitisme des élèves de son collège, qu'il évoquait presque quinze ans plus tôt dans Les territoires perdus de la République (Fayard-Pluriel, réed. 2015) sous la direction d'Emmanuel Brenner. Quelques jours après l'attaque à Marseille d'un enseignant juif par un élève, plus d'un an après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Casher, le discours et les préjugés antisémites chez les jeunes élèves sont-ils toujours présents ?
 
Selon Iannis Roder, la parole des élèves est aujourd'hui moins spontanée. D'une part, les enseignants ont pris l'habitude de déconstruire les remarques antisémites ; celles du type "Hitler aurait fait un bon musulman" ou "Hitler n'a pas fini le boulot" ne restent jamais sans réponse. D'autre part, ils sont de plus en plus nombreux à intégrer le caractère interdit d'une parole raciste ou antisémite. D'ailleurs, très peu d'élèves défendent une idéologie antisémite. Dans la majorité des cas, il s'agit de préjugés, simplistes et anciens.
 
Si la plupart des élèves qui les portent sont issus d'une immigration arabo-musulmane plus ou moins récente, il reste difficile d'identifier précisément l'origine des préjugés. Pour certains sociologues, ils sont en germe dans la langue sans pour autant être agressifs ; pour d'autres, le décret Crémieux, qui a donné la nationalité française aux Juifs d'Algérie, a nourri de forts ressentiments. Enfin, certains courants de l'Islam, par le biais de télévisions satellitaires, prêchent de violents discours à l'égard des Juifs auxquels certains élèves finissent par succomber.
 
Les attaques du siège de Charlie Hebdo et de la boutique Hyper Casher n'ont pas fait taire les préjugés. En revanche, celles du 13 novembre ont donné lieu à un vrai questionnement. Les élèves ont compris que la cible n'était pas les journalistes pour ce qu'ils font ni les Juifs pour ce qu'ils sont, mais ce que nous sommes, l'Occident avec ce qu'il représente de réel ou de fantasmé.