Jean Pierre Allali

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Lectures de Jean-Pierre Allali - Il n’y a pas de Ajar. Monologue contre l’identité, par Delphine Horvilleur

23 Novembre 2022 | 220 vue(s)
Catégorie(s) :
France

Bienvenue sur le blog La Chronique (pas tès casher) de Raphaela ! Sur ce blog, Raphaela vous propose ses billets d'humeur sur tout ce qui l'entoure, l'émeut, la touche, la fait rire et la révolte. Et elle a des choses à vous dire...

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Comme nos lecteurs ont pu l’apprendre dans la newsletter du Crif, le président du Crif, Francis Kalifat a rencontré le nouvel ambassadeur de Chypre en France, Son Excellence Georges Chacalli, à l’occasion d’un déjeuner de travail. Partons à la découverte de Chypre et de sa petite communauté juive.

 

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Il n’y a pas de Ajar. Monologue contre l’identité, par Delphine Horvilleur (*)

Ajar-Hasard. Le vocable « hasard » se prête volontiers aux jeux de mots. Je me souviens d’une gargote  judéo-tunisienne dans le faubourg Montmartre, rue Richer, à l’enseigne d’Azar. Une pancarte accueillait le visiteur à l’entrée : « Chez Azar, rien n’est au hasard. Mangez nos bricks mais n’oubliez pas le fric ! ».

Dès lors, on ne saurait s’étonner que Delphine Horvilleur, rabbine du « Judaïsme en Mouvement » et directrice de la revue Tenou’a, dans le petit livre percutant qu’elle nous propose et qui se veut un monologue contre l’identité, ait opté pour cette jonglerie lexicographique car, c’est un fait, dans la vie, il n’y a pas de hasard, pardon, pas de Ajar.

Le génial Romain Gary alias Émile Ajar, l’homme de La vie devant soi et de Gros-Câlin, celui qui réussit à obtenir par deux fois le prix Goncourt, était né Roman Kacew le 21 mai 1914 à Vilnius, en Lituanie. Ce roi du canular géant et de l’entourloupe planétaire a quitté ce monde le 2 décembre 1980. Il s’est suicidé en se tirant une balle dans la gorge.

Avec talent et beaucoup d’humour, Delphine Horvilleur imagine que Roman Gary-Ajar avait un fils, Abraham. Abraham Ajar, cela donne en raccourci A.A. Plus fort que B.B. quand même ! Ce fils inventé raconte qu’il avait six ans à la mort de son père, en 1980.

Gary, finalement, c’est un revenant, un spectre, un dibbouk qui nous harcèle pour s’élever contre tous ceux, et ils sont nombreux, qui, à travers le monde, hurlent pour affirmer que « pour être authentiques, il faudrait être entièrement définis par notre naissance, notre sexe, notre couleur de peau ou notre religion ». C’est contre cette prétention, cette exclusive, ce repli sur soi, cette obsession identitaire, cette tenaille identitaire politico-religieuse que s’élève l’auteure en prenant à témoin Romain Gary-Ajar qu’elle admire profondément.

Dans sa belle monstration, Delphine Horvilleur fait appel à la Torah et au Talmud. On va, en la lisant, à la rencontre d’Elisha Ben Abouya, « Ah’er », « L’autre ». On redécouvre aussi l’histoire d’Abraham, Ur et la Chaldée.

Delphine Horvilleur, qui nous rappelle qu’en hébreu, le verbe être n’existe pas, remarque que le mot « Gary » écrit en hébreu se traduit par « L’étranger en moi.

En résumé, comme elle le dit crûment : « Merde à l’identité ! »

En refermant ce sublime petit livre, on se dit qu’on a beaucoup appris et beaucoup ri aussi car, comme l’écrit Romain Gary : « L’humour est une affirmation de supériorité de l’homme sur ce qui lui arrive ».

Bon, il est temps de savourer un cachou !

 

Jean-Pierre Allali

(*) Éditions Grasset. Juillet 2022. 96 pages. 12 €.