Richard Prasquier

Ancien Président du CRIF

Le billet de Richard Prasquier - Josiane Sberro, un exemple pour jours difficiles

22 Septembre 2023 | 113 vue(s)
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Opinion

En 2017, Roger Pinto, sa femme et son fils ont été séquestrés, violentés et détroussés à leur domicile de Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), "une agression antisémite" condamnée par le Crif et le ministre de l'Intérieur. Une première ?

Thierry Noël-Guitelman est un journaliste, membre de l'association Hébraïca à Toulouse. Il a engagé, en 2004, des recherches familiales sur l'étoile jaune, sa tante Ida Seurat-Guitelman, ayant obtenu une exemption.

Portrait de Gil Taïeb
Nous sommes debout
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03 Avril 2017
Catégorie : France, Actualité, Opinion

Samedi 1er avril place du Châtelet se sont réunies une centaine de membres du Collectif Boycott Israël

On ne le dira jamais assez : la parution d’ouvrages de poésie, en général et dans le domaine juif en particulier est devenue assez rare pour qu’on ne salue pas avec plaisir la sortie d’un nouveau recueil. Dans ce nouveau livre, la peintre et poétesse Sarah Mostrel nous offre un ensemble de textes inspirés de la Bible et des textes fondamentaux du judaïsme.

Remi Huppert est un spécialiste des Juifs de Chine. On lui doit notamment Destin d’un Juif de Chine (1). Dans son nouveau roman, le judaïsme est toujours présent.

"Le terrorisme et l'antisémitisme ont marqué cette année passée"

Je me suis exprimé sur les enjeux de l'élection présidentielle pour la communauté juive française.

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Les Yamim Noraïm, ces « jours redoutables » entre Roch Hachana et Kippour, sont des moments de retour sur nos carences. Une triste constatation s’impose : l’animosité entre Juifs, je me refuse à utiliser le mot haine, a cette année atteint des sommets. Plutôt que d’épiloguer encore sur cette débâcle, je voudrais aujourd’hui honorer un de ces acteurs ‒ une de ces actrices ‒ d’un judaïsme inclusif, exigeant mais ouvert, porté par l’amour pour Israël et celui de la culture française, rejetant le fantasme du métissage généralisé comme celui de l’exclusivisme arrogant. Ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, mais ils ne cherchent jamais à se faire valoir.

 

Josiane Sberro est infatigable. Philosophe de formation, chef d’établissement en milieu spécialisé elle a passé jusqu’à sa retraite dans les années 2000, trente ans à inculquer avec acharnement et dans la dignité connaissances et sens des responsabilités à des enfants dits défavorisés. Des enfants qui étaient élevés dans ces banlieues créées à la hâte avec une nonchalance politique, sociologique, architecturale et éducative dont la France ne finit pas de payer les conséquences cinquante ans plus tard.

Josiane est active dans le dialogue entre Musulmans et Juifs et entre Juifs et Chrétiens, mais elle l’est particulièrement dans la dénonciation de l’antisémitisme sous ces formes qu’on ne finit pas de dire nouvelles et dont la haine d’Israël est le pivot.  

Elle parcourt la France avec son exposition pour faire connaître le monde juif et elle a forgé dans le Val-d’Oise avec son mari Raoul, aujourd’hui décédé, une communauté juive traditionnelle dans ses pratiques religieuses. Aujourd’hui encore, elle est au premier rang de la défense d’Israël.

Une hyperactivité stupéfiante pour quelqu’un qui a l’âge de ne pas avoir oublié l’image terrifiante du soldat allemand de l’Afrika Korps de Rommel pointant sa mitraillette contre sa mère en 1942, dans la petite ville de Gabès où elle est née, aux confins du Sahara tunisien. Une activité d’où s’exprime rarement la colère, et jamais l’imprécation. 

 

L’école de l’Exil, son livre de souvenirs publié par Balland, alors qu’elle ne le destinait qu’à un usage familial porte un beau titre, pour un beau livre. Le parcours de Josiane est unique : à seize ans, elle fuit l’école, quitte une famille aimée et le confort d’une vie privilégiée pour les rigueurs d’un camp de pionniers agricoles de l’Hashomer Hatsair en France puis un kibboutz israélien où toute communication directe avec sa famille tunisienne est impossible.

Puis reprise des études, retour clandestin en Tunisie à la mort du père, mariage et début de son travail d’éducatrice dans une communauté juive en pleine crise.

Départ en catastrophe pour la France, où le moins qu’on puisse dire est que, du fait de leur citoyenneté tunisienne et non française, elle et son mari, malgré leurs diplômes, ne sont pas bien reçus, jusqu’à leur naturalisation assez tardive qui lui permet d’intégrer l’Éducation nationale et d’assister aux premières loges au désastre éducatif.

Faisant la synthèse entre les traditions religieuses provenant d’un grand-père rabbin hautement respecté, l’engouement de jeunesse pour un collectivisme toujours sioniste, son expérience de travailleuse agricole, sa formation philosophique à l’université et son métier d’enseignante à des enfants en difficulté, Josiane Sberro a su rester fidèle à tous ses engagements.

 

Ce livre a suscité en moi quelques surprises et bien des réflexions, dont voici très brièvement quelques-unes.

 

La Tunisie d’abord. Je pensais le gouvernement de Bourguiba des années suivant l’indépendance plutôt ouvert, soucieux de la promotion des femmes et du respect des minorités. La description très précise que fait Josiane Sberro des spoliations de sa famille, organisées et cyniques (« mets ta traite dans un verre d’eau et bois-la, ça te fortifiera ») fait réfléchir sur la façon insidieuse dont les Juifs ont été dépossédés et amenés au départ. Elle replace malheureusement dans un autre contexte historique les déclarations ouvertement antisémites du Président tunisien actuel à propos de cette tempête « Daniel » qui a frappé les « frères Libyens » et à qui les « sionistes », entendez les Juifs, ont donné le nom d’un de leurs prophètes, entendez qu’ils en sont les véritables responsables. L’opposition à l’islamisme s’accommode fort bien des imprécations contre les Juifs. Il suffit de se référer aux nationalismes arabes depuis Nasser jusqu’au Baath syro-irakien.

 

Israël, bien-sûr, dont Josiane Sberro fait revivre avec justesse le monde difficile et enthousiaste des années 50, celui du kibboutz et des maabarot.

 

La France, où j’ai découvert avec surprise que le camp d’Arenas, à Marseille, où étaient cantonnés les Juifs d’Afrique du Nord qui voulaient partir en Israël, n’avait probablement pas progressé en matière de sordide et d’indifférence administrative par rapport aux camps d’internement français pendant la guerre. 

 

Et puis cet autre pays, cher à Josiane, la Grèce, où sa famille a passé bien des vacances dans un coin perdu de Macédoine. Une figure unanimement admirée y était Mikis Theodorakis, grand poète national. Cet homme, qui avait, disait-il, sauvé des Juifs pendant la guerre, et dont un poème célèbre portait le titre de Mathausen, est brusquement devenu un antisémite fier de son antisémitisme, allant ainsi jusqu’au bout d’une trajectoire que d’autres continuent d’emprunter aujourd’hui…

 

Un livre qui fait réfléchir, témoin d’une vie admirable.

 

Bonnes fêtes 

 

Richard Prasquier, Président d’honneur du Crif

 

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