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Publié le 24 Janvier 2022

Hommage - Disparition de Raphaël Esrail, président de l'Union des déportés d'Auschwitz

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès de Raphaël Esrail, Résistant juif, rescapé d’Auschwitz-Birkenau, Président de l’Union des déportés d’Auschwitz et militant de la mémoire, à l’âge de 96 ans. Nous lui devons beaucoup. Nous adressons nos plus sincères condoléances à sa famille et à ses proches.

Raphaël Esrail, président de l'Union des déportés d'Auschwitz (UDA), nous a quittés dimanche 23 janvier 2022.

Raphaël Esrail est né le 10 mai 1925 en Turquie dans une famille juive qui émigre en France l'année suivante. Membre de la résistance juive à Lyon où il confectionne de faux papiers, il est arrêté puis interné au camp de Drancy, avant d'être déporté à Auschwitz-Birkenau par le convoi n°67, le 3 février 1944, âgé d'à peine 19 ans.

Il survit aux conditions inhumaines du travail forcé qu’impose la “solution finale”, et affronte les “marches de la mort” à partir du 18 janvier 1945, avant d'être libéré par les troupes américaines, le 25 avril 1945.

Infatigable témoin, homme engagé et volontaire, notamment à la présidence de l'UDA, nous lui devons beaucoup. Rendons lui hommage.

 

Pourquoi Raphaël Esrail nous manque déjà, par Yonathan Arfi

Depuis qu'il était devenu en 2008 président de l'Union des déportés d'Auschwitz, sa voix douce et élégante était symboliquement celle de l'ensemble des déportés : de ceux qui sont revenus comme de ceux qui n'ont pas survécu, des visages connus comme des anonymes, de ceux qui ont témoigné comme de ceux qui se sont tus à jamais.

Sans artifice, son propos était toujours juste et précis : il ne cherchait pas à émouvoir mais à expliquer et à convaincre.

Raphaël Esrail nous a quittés il y a quelques heures à peine.

S'il nous manque déjà, c'est notamment parce qu'il avait compris que sa voix et celle de tous les rescapés de la Shoah n'était pas qu'un témoignage du passé mais une contribution nécessaire et parfois décisive aux débats du présent.
Que pensait-il des tentatives de réhabilitation de Pétain et de Vichy, que l'on a vu ressurgir lors de cette campagne présidentielle ?

Comment aurait-il réagi face à l'étrange annonce il y a quelques jours de l'identification du dénonciateur d'Anne Frank ?

Que lui aurait inspiré la semaine dernière la résolution de l'assemblée générale de l'ONU condamnant la négation de la Shoah mais rejetée par un seul pays au monde, l'Iran, qui menace le seul Etat juif de destruction?

Comment enseigner la Shoah dans une société française fracturée par la concurrence mémorielle ?

Face à ces questions comme face à toutes celles qui ne manqueront pas de surgir à l'avenir, nous n'entendrons pas sa voix claire nous répondre comme chaque année lors de la prochaine cérémonie de commémoration de la rafle de Vel d'Hiv.

Il nous appartient désormais à tous d'être les porte-paroles fidèles de son expérience et de son récit.

Que sa Mémoire et le souvenir de celles et ceux qu'il représentait aiguillent notre route à l'avenir.

Par Yonathan Arfi, Vice-président du Crif

 

L’histoire de Raphaël est racontée dans l’ouvrage publié en 2017, L’espérance d’un baiser (Robert Laffont) : Dans son ouvrage, Raphael Esrail a notamment retracé les circonstances incroyables de sa rencontre avec sa femme Liliane Esraïl (née Badour).

"Au camp de Drancy, Raphaël croise une jeune femme, Liliane Badour, dont il tombe amoureux. À l'arrivée à Auschwitz, après la "sélection", il est désigné pour le travail forcé tandis que Liliane entre au camp de Birkenau. Alors que tout est organisé autour de la disparition systématique de la vie, Raphaël nourrit l'espoir de revoir Liliane. Avec l'aide d'autres prisonniers, il parvient à lui écrire et tente de la sauver. Raphaël est miraculeusement épargné. [...] À sa libération, il partira à la recherche de Liliane". 

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