Francis Kalifat

Ancien président

Mon discours à la cérémonie en hommage aux Juifs engagés volontaires

20 Octobre 2017 | 109 vue(s)
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France

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Mon discours à la cérémonie d'hommage aux Juifs engagés volontaires qui s'est tenue le 15 octobre 2017 au cimétière de Bagneux.

Chers amis,

Je veux d’abord vous dire  mon  émotion d’être ici, à vos côtés,  au cimetière Parisien de Bagneux, lieu de mémoire s’il en est,  en Souvenir, en hommage et à la gloire des soldats Juifs étrangers, engagés volontaires morts pour la France.

Emotion toujours, devant ce monument sous lequel reposent soixante-six soldats Juifs choisis symboliquement parmi des milliers d’autres victimes pour témoigner du sacrifice de ces combattants tombés au champ d’honneur pour la liberté… et l’amour d’un pays qu’ils avaient fait leur : la France.

Emotion encore, devant cette stèle érigée par la mairie de Paris et dévoilée l’an dernier qui demeure le témoin pour les générations futures, de notre fidélité mémorielle à tous ceux qui ont disparu, victimes de la barbarie nazie, 6 millions de femmes, d’hommes et d’enfants privés de sépulture.

Je veux rendre hommage au Mémorial de la Shoah qui prenant la suite de l’association des engagés volontaires Juifs  continue de faire de cet évènement un moment incontournable de notre mémoire collective.

Par dizaines de milliers les juifs étrangers, suivant l’admirable exemple de leurs ainés de 14-18 s’engagèrent dans les régiments de la Légion Etrangère pour défendre leur patrie d’adoption et combattre le nazisme. Ils savaient que par leur engagement et leur sacrifice tout était encore possible.

Alors souvenons-nous ce ces combattants , mais aussi, pour tous ceux qui comme moi n’ont pas connu la guerre, prenons l’engagement de perpétuer pour les générations à venir le souvenir de leur sacrifice en y associant les glorieux  combattants du ghetto  de Varsovie, les héros de l’ombre tombés dans les rangs de la résistance et les 6 millions des nôtres victimes de la barbarie nazie.

Se souvenir pour rester vigilants,

Se souvenir que notre existence a été mise en péril au point qu’un pan entier du judaïsme européen a été englouti.

Se souvenir  pour combattre toutes les résurgences de l’antisémitisme, qu’elles viennent de l’extrême droite, de l’extrême gauche sous couvert d’antisionisme, ou de l’islam radical.

Mais la mémoire ne suffit pas. Comment passer sous silence ici la dimension criminogène de l’antisémitisme ?

Certes, l’antisémitisme qui conduisit à la Shoah était un antisémitisme d’Etat, un antisémitisme dont l’Etat était à la fois le moteur idéologique et l’agent opérationnel.

Aujourd’hui, au contraire, l’Etat constitue le rempart le plus solide face à l’antisémitisme.

Pourtant, il a fallu attendre de nombreuses années pour qu’enfin l’on reconnaisse que les actes et violences que subissent les français juifs ne sont pas de la violence ordinaire mais bien l'expression violente d'un antisémitisme nouveau.

De délinquants ordinaires en loups solitaires ou malades psychiatriques tout a été tenté pour ne pas reconnaitre qu’à nouveau en France des juifs étaient agressés et même tués uniquement parce qu’ils étaient juifs.

Tout a été fait pour refuser de voir cette nouvelle réalité de la société française : Les préjugés antisémites et l’antisémitisme sont devenus un marqueur chez une partie de nos concitoyens.

Notre société peine à affronter cette nouvelle réalité et à reconnaître l’évidence, de nommer le mal lorsqu’il s’agit d’une victime juive.

Nous devons faire face à certains silences qui entourent certains crimes… Je pense évidemment à l’odieux assassinat de Sarah Halimi.

Nous demandions depuis le premier jour, que toute la vérité soit publiquement révélée  sur cet assassinat sordide et surtout que le caractère antisémite de l’acte soit reconnu.

C’est enfin chose faite aujourd’hui, et nous nous en réjouissons même s’il nous a fallu mener un combat difficile pour obtenir ce qui pour nous était une évidence dès le premier jour : 

Sarah Attal-Halimi n’a pas été assassinée parce qu’elle se trouvait par hasard sur le chemin du tueur ni parce qu’elle habitait cet immeuble ni parce qu’elle était directrice de crèche, ou parce qu’elle aurait eu de l’argent. Non Sarah Attal-Halimi a été massacrée parce qu’elle était juive et pour cette seule et unique raison.

Le caractère antisémite de ce meurtre inscrit à présent au dossier fera du procès à venir non seulement le procès d’un assassin mais aussi celui de l’antisémitisme qui tue, aujourd’hui, en France.

Si nous ne sommes pas capables d’appréhender la réalité dans sa complexité, il ne restera pour nos enfants qu’un monde d’injustice et d’incompréhension.

L’histoire que nous avons vécue nous oblige à soulever le voile opaque derrière lequel demeure la vérité : c’est notre responsabilité.

Mesdames et messieurs,

J’ai confiance en l’avenir.

Le CRIF a été créé en 1943, dans des circonstances dramatiques mais avec un objectif précis : préparer le lendemain.

Si, en 1943, des hommes dans la tourmente ont envisagé le futur alors qu’ils risquaient une fin tragique à chaque instant, nous qui vivons dans des temps tout de même moins difficiles, nous avons l’obligation de réussir.

Nous devons, en quelque sorte, actualiser le passé en suivant le sens de l’histoire que nous guettons toujours avec vigilance.

C’est au cœur de la mémoire héroïque de ces combattants que nous devons puiser les forces nécessaires pour mener sans relâche et sans concessions, ce combat.

Soyons fiers et montrons-nous dignes de l’héritage qu’ils nous ont laissé.

Que leur souvenir et leur sacrifice soit inscrit pour l’éternité dans la mémoire de la Nation Française et dans l’histoire du peuple Juif.

Je vous remercie.