Publié par Marc Knobel dans le Blog du Huffington Post le 9 Décembre
Expliquons.
Isaac Meyer Knobel, mon grand-père paternel est arrivé en France dans les années 1910. Il fuyait la misère et l'antisémitisme. Lorsque il est arrivé dans ce pays, il ne parlait pas un mot de français, mais le yiddish. Il ne mangeait pas français, parce qu'il ne connaissait que la cuisine juive polonaise, en gros : le tchoulent au poulet accompagné de tzimmes aux carottes et d'une salade de chou à choucroute, agrémentée elle-même de poireaux et de carottes râpés. C'est bon. Il n'est pas certain d'ailleurs qu'il ait aimé autre chose dans sa vie. Mais, quoique il n'ait jamais bien parlé le français, ni n'ait jamais mangé français, il s'engagea comme volontaire juif dans l'armée française, lors de la première guerre mondiale. Il fut gazé et malade. S'engager dans l'armée française, lorsque l'on n'est pas français? Tout simplement parce qu'il aimait profondément la France, ce grand pays, celui des Droits de l'Homme.
Sa femme, ma grand-mère, Bassia Golda Meyer, venait de Russie, elle ne parlait pas le français et ne mangeait pas français. Mais, sa fierté fut de lire France-Soir, tous les jours. Parce qu'elle aimait lire en français, son journal, publicité comprise. Comme son mari, elle parlait le français avec un fort accent yiddish, elle n'avait pas été à l'école, parce qu'elle était pauvre. Puis, elle qui aimait la France, elle connut l'Occupation. Elle dût fuir, parce que la concierge de son immeuble, une "vraie française", celle-là, dénonça ma famille au Commissariat Général aux Questions Juives (CGQJ), au temps où un prétendu vrai français livrait la France à l'ennemi et trahissait son pays. Il avait pour nom Pétain.