Tribune
|
Publié le 12 Février 2015

Attention urgence: mettre un peu de Lumière dans la pensée islamique

«Dinstiguer ceux qui prêchent réellement la paix et la tolérance si chères à l'Islam de ceux qui, sous couvert de laïcité et de démocratie, sèment la haine et la violence»
 

Par Boualem Sansal, Ecrivain algérien francophone, publié dans le Huffington Post le 12 février 2015
Il ne faut pas perdre un instant, le texte de Ghaleb Bencheikh doit aujourd'hui même être déposé sur le bureau du Ministre de l'Éducation nationale avec une recommandation expresse: à faire lire en urgence dans toutes les écoles de France. Il devrait aussi vite être envoyé à tous les Imams de l'Hexagone pour le lire à leurs fidèles, tous ne le feront pas, sinon pour s'en offusquer et le déclarer blasphématoire, mais ce qui importe en l'occurrence est de distinguer ceux qui prêchent réellement la paix et la tolérance, si chères à l'Islam, et ceux qui, sous couvert de la laïcité et de la démocratie, sèment la haine et la violence, qui, comme le dit Ghaleb Bencheikh, "propagent un discours martial puisé dans la partie belligène du patrimoine religieux islamique."
S'il est une réponse véritablement efficace aux attentats islamistes du 7 janvier, c'est bien dans ce texte, magnifique, complet, courageux et révolutionnaire qu'elle se trouve. A ce jour et pour ce que j'ai pu lire de belles et généreuses déclarations, celui de Ghaleb Bencheikh est le seul à nous dire clairement la vérité, toute la vérité: avant le terrorisme et avant l'Islamisme qu'il faut résolument combattre et éradiquer, est l'Islam qu'il faut soustraire des mains des doctrinaires fous, comme est la pensée théologique islamique qu'il faut refonder à la lumière de la démocratie et de la laïcité. Ce n'est pas à la démocratie de s'adapter à l'Islam, elle ne fait que prôner la liberté, l'égalité, la fraternité, c'est l'Islam qui doit apprendre à vivre dans la liberté, l'égalité et la fraternité.
Ghaleb Bencheikh, qui a oublié d'apprendre la langue de bois et ne sait pas davantage se mentir, nomme les responsables de nos malheurs. A tous, ils donnent un nom, leurs noms: il nomme "les communautés musulmanes déstructurées, crispées, repliées sur elles-mêmes", il nomme "les régimes arabes et musulmans qui instrumentalisent l'Islam pour domestiquer leurs populations", il nomme le « wahhabisme » qui inspire tous les Islamistes radicaux du monde et que les pays du Golfe promeuvent à coup de milliards de pétrodollars, avec, quelque part, l'assentiment de la puissante et arrogante Amérique et celui très poli de la belle et noble Europe si fière de ses valeurs, et il nomme tout le reste avant de les jeter dans le même le sac, le sac de la lâcheté: la realpolitik, les indignations sélectives, la complaisance avec les autocrates, les compromissions avec les États intégristes.
Non vraiment il n'a rien oublié, ni omis personne. On a enfin un texte complet, revigorant, éclairant comme une belle feuille de route. Bien écrit qui plus est. A la Ministre de l'Éducation de jouer, elle aura à faire lire ce texte dans les écoles de la République et à proposer au gouvernement de le tenir enfin ce "colloque de grande envergure", ce "symposium important" que propose Ghaleb Bencheikh afin "de pourfendre les thèses islamistes radicales" et de "subsumer la violence inhérente à l'Islam". Voilà de quoi donner des arguments à la résistance et la galvaniser. Le jour de l'inauguration de ces grands et courageux débats, les victimes du 7 janvier sauront qu'ils ne sont pas morts pour rien. Au jour d'aujourd'hui, ils doivent, là-haut, les pauvres, se sentir mal de se voir peu à peu disparaître dans l'indifférence et l'oubli… Lire l’intégralité.