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Le Crif : Le Hezbollah harcèle avec violence le Nord d’Israël depuis de long mois, contraignant depuis octobre près de 70 000 Israéliens à quitter leur maison, parfois détruite par les missiles lancés par ce mouvement armé par l’Iran. Après les dernières agressions et l’attaque préventive d’Israël, certains craignent une escalade militaire non maîtrisée, d’autres appellent à un engagement plus massif de Tsahal contre le Hezbollah au Liban : quel est votre analyse et position ?
Caroline Yadan : Le Hezbollah, soutenu et armé par l’Iran, représente une menace sérieuse et continue pour Israël, comme en témoignent les attaques répétées qui ont forcé des dizaines de milliers d’Israéliens à quitter leurs foyers. Face à cette agression constante, Israël a le droit légitime de se défendre. Cependant, toute réponse militaire doit être bien pensée pour éviter une escalade incontrôlée qui pourrait entraîner un conflit régional majeur.
L’attaque préventive d’Israël contre les infrastructures du Hezbollah est une réponse nécessaire pour protéger la population civile mais elle doit être accompagnée d’efforts diplomatiques intenses pour contenir la situation. Mon analyse est que Tsahal doit continuer à agir avec fermeté pour neutraliser les menaces directes tout en travaillant étroitement avec ses partenaires internationaux pour minimiser les risques d’escalade. La priorité doit rester la sécurité des citoyens tout en évitant une extension du conflit au Liban, qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour toute la région.
En tant que représentante des Français de l’étranger, et particulièrement de ceux résidant en Israël, ma position sur la situation actuelle au Nord d’Israël est d’abord fondée sur la nécessité de garantir la sécurité des citoyens franco-israéliens.
Par ailleurs, la France a, depuis le 7 octobre, octroyé des aides financières et psychologiques exceptionnelles aux familles de victimes et aux déplacés. Celles-ci ont bénéficié à plus de 400 de nos concitoyens. Mon objectif est que ces mesures de solidarité envers nos compatriotes se poursuivent dans le temps.
Le Crif : La tension peut s’amplifier au Nord d’Israël, la guerre contre le Hamas au Sud n’est pas terminée, les négociations notamment pour libérer tous les otages du Hamas n’ayant pu aboutir. N’assistons-nous pas à une impasse militaire et géopolitique, certains citoyens israéliens accusant Benyamin Netanyahou de poursuivre démesurément la guerre à Gaza pour se maintenir au pouvoir ? Pour le court et moyen terme, êtes-vous optimiste ou pessimiste en ce qui concerne le retour à « une paix dans la sécurité » en Israël et dans la région ?
Caroline Yadan : La situation actuelle en Israël, avec des tensions croissantes au Nord et une guerre toujours en cours contre le Hamas au Sud, présente en effet un risque d’impasse militaire et géopolitique. Les négociations pour la libération des otages détenus par le Hamas sont extrêmement ardues. La complexité de cette guerre génère des incertitudes et augmente le risque de la voir profiter, en définitive, aux mouvements les plus radicaux.
Les accusations portées contre le Premier ministre Benyamin Netanyahou, selon lesquelles il prolongerait la guerre à Gaza pour des raisons politiques et n’assumerait pas les responsabilités qui sont les siennes, reflètent un sentiment de colère et d’inquiétude chez de très nombreux citoyens israéliens. Il est compréhensible que, dans un contexte aussi tendu, des questions sur les motivations politiques puissent surgir. Cependant, pour les Israéliens, la priorité reste la sécurité d’Israël et la protection de ses citoyens face aux menaces terroristes.
En ce qui concerne l’avenir, pour le court terme, je reconnais que les perspectives de retour à une paix stable et sécurisée sont pour le moins incertaines. La situation actuelle est volatile, et les défis sont nombreux. Néanmoins, je reste modérément optimiste pour le moyen terme. Israël a toujours su surmonter les crises graves grâce à une capacité de résilience exceptionnelle et je crois que, malgré les obstacles actuels, il est possible de parvenir à une situation plus stable et sécurisée, grâce à une combinaison d’efforts militaires et diplomatiques. Cela nécessitera du temps, de la détermination et un soutien international constant, y compris aux côtés de certains pays arabes signataires des Accords d’Abraham qui n’ont plus aucun intérêt à voir prolonger ce conflit indéfiniment.
Un des enjeux essentiels pour l’avenir m’apparaît être également la lutte contre l’islamisme et la suppression de l’éducation à la haine des enfants palestiniens. C’est la raison pour laquelle j’entends déposer, à nouveau, la proposition de résolution sur ce sujet, à l’Assemblée nationale, après l’avoir fait co-signer par un maximum de députés.
Le Crif : L’antisémitisme continue de flamber en France, on l’a malheureusement constaté au sens propre avec l’attaque perpétrée contre la synagogue de La Grande-Motte. Jean-Luc Mélenchon, en déplorant un « acte criminel », n’a pas prononcé le mot « antisémitisme », ni « juif », dans sa réaction. Qu’est-ce que cela dit, selon vous, de la stratégie de LFI ?
Caroline Yadan : LFI, sous la direction de Jean-Luc Mélenchon, a fait de la haine des Juifs sous couvert de la haine d’Israël sa stratégie électorale, qui s’accompagne aujourd’hui d’apologie du terrorisme.
Sous couvert de soutien à la « cause palestinienne » et à l’émotion légitime que les victimes de Gaza suscitent, l’extrême gauche gueule, menace, insulte, ment, diabolise, signe des tribunes et reprend, sans retenue, le narratif et la rhétorique des islamistes du Hamas et de ses sbires, qu’ils n’hésitent pas à qualifier, comble de l’indécence, de « mouvement de résistance » ou « d’armée de résistance anticoloniale ».
Ces responsables politiques, dont certains comme David Guiraud, ont été biberonnés aux vidéos d’Alain Soral, doutent, sourire et haine aux lèvres, des viols et des mutilations commises par le Hamas mais appellent au boycott voire à la destruction du seul État juif démocratique du Proche-Orient, qualifié de « monstruosité sans nom » en réécrivant l’Histoire dans un négationnisme décomplexé au nom des « droits humains ».
Ces responsables politiques refusent de manifester contre l’antisémitisme mais collaborent et reçoivent en grande pompe des terroristes du FPLP. Ces responsables politiques oublient l’existence des otages mais estiment que l’on médiatise trop le viol d’une enfant de douze ans parce que juive, ou que l’on n’appartient pas à la « même espèce » lorsqu’on défend Israël.
Jean-Luc Mélenchon se réclame du « camp de la paix » mais qualifie l’expulsion d’une étudiante juive d’un campus « d’incident dérisoire », compare le président de l’Université de Lille à Adolf Eichmann, architecte nazi de la Solution Finale, accuse Yaël Braun-Pivet de « camper » à Tel-Aviv, laisse entendre que les actions contre la gauche seraient « coordonnées depuis Jérusalem » ou réactive la thèse du Peuple déicide…
Le fait de ne pas prononcer les mots « antisémitisme » ou « juif » dans sa prétendue condamnation de l’attaque contre la synagogue de La Grande-Motte n’a absolument rien d’étonnant. Il a, je vous le rappelle, déjà qualifié l'antisémitisme en France, qui a explosé après le 7 octobre, de phénomène « résiduel ». Ce déni là aussi contribue à la montée de la judéophobie. Si on n’en parle pas, c’est que ça n’existe pas et que les Juifs en font trop pour pas grand-chose…
Cette gauche-là abîme non seulement notre démocratie mais aussi l’humanité. Tous les humanistes, épris de Lumière, devraient contribuer à toujours dénoncer ce mal qui ronge notre société, notamment dans sa forme actuelle. Pour cela il faut du courage et ce n’est malheureusement pas la qualité la plus partagée par nos politiques, nos médias et nos intellectuels…
Le Crif : Vous avez annoncé mener une action contre Rima Hassan, présente en Jordanie à une manifestation de soutien au Hamas, pour que son immunité soit levée au Parlement européen. Quelles sont précisément les faits que vous avez collectés concernant cette élue sur la liste LFI aux dernières élections européennes, et où en est cette requête, pensez-vous que la levée de l’immunité parlementaire est, dans ce cas, non seulement politiquement légitime mais juridiquement possible ?
Caroline Yadan : Au commencement de la violence il y a la pensée, et celle de Rima Hassan légitime les agressions des Juifs en France, chaque Juif étant considéré comme un potentiel « sale sioniste ».
Les faits la concernant que j'ai collectés, aux côtés de mon avocat, David-Olivier Kaminsky, sont à la fois graves et très nombreux. Ils viennent s’ajouter aux menaces qu’elle a proférées contre François-Xavier Bellamy, qui a déposé plainte.
Madame Hassan, députée européenne sur la liste de La France insoumise (LFI), a participé à une manifestation en Jordanie le 16 août 2024, où elle a activement soutenu le Hamas, une organisation reconnue comme terroriste par l'Union européenne et de nombreux autres pays. Cette organisation qui a commis le pire massacre antisémite de notre siècle. Lors de cette manifestation, des slogans de soutien explicite au Hamas et à la violence djihadiste ont été scandés, comme par exemple « Allez le Hamas, vous êtes le canon, nous sommes les balles ! ». Madame Hassan a filmé et diffusé ces images sur son compte Instagram, ce qui démontre non seulement sa participation mais aussi sa volonté de propager ce soutien. Elle a beau, par lâcheté, s’en défendre, elle connaît parfaitement la ligne idéologique qui domine chaque semaine ces manifestations récurrentes.
De plus, Rima Hassan tient quasi-quotidiennement des propos sur les réseaux sociaux qui relèvent clairement de l'incitation à la haine raciale et de l'apologie du terrorisme. Elle a, par exemple, qualifié les actions du Hamas le 7 octobre 2023 de « légitimes » tout en niant le droit d'Israël à se défendre. Ses publications en ligne sont truffées de désinformations visant à diaboliser l'État d'Israël et à attiser la haine contre les Juifs, que ce soit en France ou ailleurs. C’est elle qui a repris à son compte l’accusation antisémite moyenâgeuse du vol des organes palestiniens par les Juifs israéliens ou qui a accusé les soldats de Tsahal de dresser leurs chiens à violer les Palestiniens, accusations complotistes infâmes mais qui reçoivent un écho important de la part ses followers et qui participe, ensuite, à ce climat d’insécurité permanent que connaissent les Juifs de France.
C’est la raison pour laquelle j’ai effectivement été à l’initiative de deux courriers :
● un signalement au Procureur de la République sur le fondement de l’article 40 du Code de procédure pénale pour qu’il engage des poursuites ;
● une demande de levée d’immunité parlementaire si ces poursuites devaient être diligentées, ainsi que le prononcé de sanctions disciplinaires à son endroit.
En ce qui concerne la levée de son immunité parlementaire, je pense qu'elle est à la fois politiquement légitime et juridiquement possible. Politiquement, il est inacceptable qu'une élue, bénéficiant des protections et privilèges associés à son statut, puisse utiliser cette immunité pour propager des discours de haine et soutenir des organisations terroristes. Juridiquement, les faits rapportés, tels que la participation à une manifestation pro-terroriste et la diffusion de messages incitant à la haine et à la violence, constituent des violations graves du Code pénal, notamment en matière d'apologie du terrorisme et de provocation à la haine raciale.
Je suis confiante dans le fait que les preuves substantielles que nous avons rassemblées seront suffisantes pour justifier ces demandes et que mes collègues, députés européens se mobiliseront. Nous devons envoyer un signal fort qui consiste à affirmer que ces comportements sont inacceptables et ne peuvent être tolérés, surtout de la part de représentants élus.
Des sanctions contre cette prêcheuse de haine permettront aussi de rappeler les principes fondamentaux et les valeurs fondatrices de l’Union européenne : contribuer à la démocratie, à la paix, à la justice, à la solidarité et au respect mutuel entre les peuples.
Propos recueillis par Jean-Philippe Moinet
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