Jean-Pierre Allali
Les anges intermédiaires : Pulsa di Nura, par Richard Sitbon (*)
Le sous-titre de cet ouvrage ne manquera pas d’interpeller nombre de lecteurs. « Pulsa di nura », ce n’est ni de l’italien ni de l’espagnol mais plutôt de l’hébreu et plus précisément de l’araméen.
Cette étonnante expression peut se traduire par « Coup de feu » ou encore « Bâton de feu ». Certains commentateurs parlent de « Langues de feu ». Elle désigne une procédure de malédiction destinée, en invoquant des anges destructeurs, à entraîner la mort violente de celui qui est visé. Contrairement à une croyance assez répandue, elle n’apparaît pas dans la Kabbale mais dans certains textes mystiques juifs comme le Sefer Ha Razim ou L’épée de Moïse.
Tout au long des siècles, des anathèmes de ce genre ont été lancées contre des personnages pour les raisons les plus diverses.
C’est ainsi que l’ange Métatron en a été victime pour avoir induit en erreur Elisha Ben Abuya.
De même pour l’ange Gabriel qui n’a su empêcher la destruction de Jérusalem. Élie en a été puni pour avoir révélé des secrets célestes à l’humanité. Le linguiste Eliezer Ben Yéhouda en a été menacé par des extrémistes mais a évité la sanction.
Plus près de nous, une « Pulsa de Nira » a été édictée contre Yitshak Rabin, qui fut, comme on le sait, assassiné et contre Ariel Sharon qui fut victime d’un accident cérébral mortel. On raconte qu’une « Pulsa » a également été lancée en 2013 contre Naftali Benett.
La plupart des dirigeants religieux juifs sont opposés à la pratique de la « Pulsa de Nira ».
Richard Sitbon, économiste et essayiste, sur la base de cet anathème inquiétant nous propose un véritable thriller biblique qui nous permet de visiter Jérusalem et de côtoyer les textes fondamentaux du judaïsme : Torah, Talmud, Zohar, Kabbale…
Voici le vieux rabbin Aaron et sa jeune amie, Talia Malek, 27 ans, passionnée d’ésotérisme, Rahho le Chaldéen, le conservateur de la bibliothèque du monastère arménien, Voskan Zakarian. Et voici Joseph, le mystérieux.
Tout s’emmêle et se recoupe dans ce polar bien ficelé : le pillage de la Bibliothèque nationale de Bagdad, la découverte d’un étrange monument, la Pile, dans la commune de Cinq-Mars, en France, sur les bords de la Loire.
Et voici la mort qui rôde dans la ville sainte. Successivement, deux membres de la secte des Netoureï Karta puis un Chaldéen, Rahho, sont assassinés.
L’inspecteur Nissim Goldenberg mène l’enquête. L’affaire est pour le moins difficile et il ne peut avancer qu’en décryptant des passages des textes bibliques. On croise l’Arche d’Alliance, Adam et Ève, Caïn et Abel, les enfants d’Aharon, Nadab et Abihou, les pierres magiques, « urim » et « tumim », le rituel de Pessah, le Cantique des Cantiques, la Tour de Babel, le Temple de Salomon ou encore les carrés magique d’Ibn Ezra.
L’enquête sera difficile et l’amour ne manque pas d’être au rendez-vous avec l’idylle qui se noue entre l’inspecteur bougon Goldenberg et la jolie Talia. Tout est bien qui finit bien.
Étonnant et original
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions L’Harmattan. Avril 2021. 216 pages. 20 €