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Publié le 27 Mai 2024

Le Crif en action - Crif région Centre : Hommage aux déportés et internés des camps du Loiret entre 1941 et 1943

Dimanche 26 mai, les communes de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande ont tenu des cérémonies d'hommage aux déportés et internés des camps du Loiret entre 1941 et 1943. Ces cérémonies sont organisées par l’Union des Déportés d’Auschwitz et le Mémorial de la Shoah (Cercil - Musée Mémorial des enfants du Vél d’Hiv), avec l'association des Fils et Filles de Déportés Juifs de France et la commission du souvenir du Crif. Eliane Klein, déléguée du Crif région Centre était présente et y a prononcé un discours.

Mémorial juif, Beaune-la-Rolande - Copyright © CC BY-SA 3.0 DEED

 

Hommages aux internés des camps du Loiret : Ces cérémonies se déroulent devant les monuments des camps d'internement de Beaune-La-Rolande et de Pithiviers, érigés après-guerre par les anciens internés rescapés des camps pour rappeler la mémoire de ceux pour qui ces lieux furent la dernière étape avant l'assassinat. (source FMS)

Programme du dimanche 26 mai 2024

Dépôt de gerbes à 10h
Monument du square Max Jacob, Pithiviers

Cérémonie à 11h30
Monument de la rue des déportés, Beaune-la-Rolande

 

Discours prononcé par Eliane Klein, déléguée du Crif région Centre

Beaune la Rolande, 26 mai 2024

 

Nous sommes ici, à Beaune la Rolande, dans un des lieux où, comme l'a écrit Henry Bulawko "l'horreur fit étape".

L'horreur du génocide programmé du peuple juif, inscrit dans une "culture européenne qui a fantasmé la destruction d'une partie de l'espèce humaine pendant des siècles" (Georges Bensoussan).

Prenant sa revanche sur la Démocratie, le régime de Vichy, soumis à Hitler, fut le complice zélé de ce projet mortifère, par son administration tatillonne : lois, décrets, actes signant la persécution des Juifs étrangers (la rafle du 14 mai 1941), puis des Juifs français : exclusions sociales, expropriations, spoliations, dénaturalisations, marquage, internements, rafles et transports vers le camp de la mort, Auschwitz-Birkenau. Sans oublier le rôle criminel des membres de la haute fonction publique dans l'organisation des rafles, puis de la milice (1943), auxiliaire de la Gestapo, "bras armé de la collaboration française" dans la traque, la torture, les exécutions sommaires...

Sans refaire l'histoire de la Shoah, je voudrais, aujourd'hui, souligner brièvement 2 points marquants de cette période :

L'abandon successif des Juifs : 2 exemples.

La Conférence d'Evian-juillet 1938- sur l'accueil des réfugiés juifs persécutés en Allemagne et Autriche a conclu au maintien des "quotas", donc au refus des grandes puissances d'ouvrir leurs frontières. Le permis de tuer est donné à Hitler.

Au printemps 1939, le ST Louis, navire transportant des centaines de passagers juifs fuyant l'Allemagne, erre pendant des semaines à travers l'Atlantique à la recherche d'un port d'accueil, en vain! (nombreux autres exemples).

Il y eu un enchainement  de politique "d'apaisement", d'indifférence, d'aveuglements, de lâches alibis", une démission de gouvernements démocratiques et d'organisations humanitaires internationales" (Gérard Rabinovitch).

"L'effroyable volonté d'anéantissement total et sans échappatoire fut subie dans une solitude extrême" (Gérard Rabinovitch et Georges Bensoussan)

Le sauvetage.

Mais, à cet instant, j'apporte une nuance en rappelant l'héroïsme discret des Justes parmi les nations, ces milliers d'hommes et de femmes de condition souvent modeste, personnes connues ou inconnues, qui sauvèrent la vie de familles désemparées et celle de nombreux enfants juifs en les accueillant, les cachant, accomplissant ces gestes salvateurs nommés "actes saints", selon la tradition juive, privilégiant la vie et non le martyr.

Il y eut des Justes au sein de l'Eglise catholique et de l'Eglise protestante, comme dans la police (à Nancy, Paul Grüninger à la frontière suisse), et dans le monde diplomatique, le Consul portugais Aristides de Sousa Mendes ayant délivré des milliers de visas, comme le consul japonais Sempo Sugihara.

En 1940, l'historien Marc Bloch écrivait "(nous sommes) dans un monde assailli par la plus atroce barbarie". Qu'en est-il aujourd'hui? Qu'en est-il du "plus jamais ça" ? Comme l'avait prévu Primo Lévi, lucide : "C'est arrivé, cela peut donc arriver de nouveau".

Dans un monde où "murmure le potentiel barbare de nos sociétés" (Georges Bensoussan), entamant l'avenir du peuple juif, la possibilité de destruction de l'Etat d'Israël évoquée depuis de longues années, a été tentée le 7 octobre 2023 :

Les hordes de terroristes du Hamas ont perpétré un gigantesque massacre de nature génocidaire en Israël, planifié de longue date. Son atrocité nous a sidérés au point de ne pas savoir comment le nommer. Il s'inscrit dans "la longue liste des nombreux et très violents pogroms commis en Palestine depuis 1834 jusqu'en avril 1948, bien avant la création de l'Etat d'Israël. (Georges Bensoussan).

Le 7 octobre 2023, dans une rage de destruction totale-projet sadique d'anéantissement d'un peuple, les terroristes ont massacré, torturé, brûlé vifs, égorgé, décapité, pris en otages et violé hommes, vieillards, femmes-certaines, enceintes,- enfants, bébés. 

Horreur "supplémentaire" : "les femmes ont été massacrées, violées de façon spécifique, pour en faire des déchets, parce que" génitrices de ce peuple honni qu'il s'agirait de chasser "du fleuve jusqu'à la mer". Au delà du viol, la profanation des corps signe le projet de déshumanisation et d'extermination d'un peuple". (Renée Frégosi). La différence avec les crimes des nazis qui tenaient au secret de leurs exactions, les terroristes du hamas, dans l'hystérie, la jouissance indécente et l'exaltation, riaient, se filmaient, se vantant au téléphone, assurant la mise en spectacle de leurs crimes atroces.

Les réactions face à cette tragédie:" le plus grand coming-out de l'antisémitisme depuis 1945 qui ne se cache plus... claironné sous le signe de l'antinazisme"( Pascal Bruckner) par falsification de l'Histoire ("on retourne contre les fils les crimes commis contre les pères" Elie Barnavi)

En France : Explosion de l'antisémitisme "nourrie par l'ineptie, l'ignorance, la haine  et les mensonges" (Jacques Tarnero) hurlés dans des manifestations d'élus de la République, la France insoumise, héroïsant les massacreurs du hamas Et cela, dans nombre d'universités, par mimétisme avec celles d'outre Atlantique, gangrénées par le ravage des esprits, l'inculture, l'antisémitisme du wokisme, l'appel au meurtre dans le slogan exterminateur "From  the river to the sea". (Je salue ici le courage et la détermination du Président de Sorbonne Nouvelle, Daniel Mouchard-Zay qui a su imposer la liberté d'expression dans ce lieu, en digne petit fils de Jean ZAY).

Dévoiement du féminisme: le 8 mars, les féministes juives exfiltrées après les violences, insultes antisémites, menaces, jets de projectiles... Silence des néo-féministes face aux viols sauvages subis par les Israéliennes.

Le geste barbare de la lacération sauvage des visages des otages.

"On dépouille les Juifs de leur propre tragédie" (Raphaël Enthoven).

En 1941, l'écrivain roumain  Mihaïl Sébastian évoquait sa solitude dans un pays que jusque là, il croyait sien, décrivant le regard fuyant de ceux qu'il croyait proches ou amis.( Georges Bensoussan)

Aujourd'hui, "l'acte, commis le 7 octobre 2023, d'une violence inouïe, n'a pas suscité les élans de solidarité que l'on pouvait attendre, notamment eu égard à l'histoire, 79 ans après le 1er procès de Nuremberg." (Dominique Reynié/Fondapol).

Aujourd'hui, l'inquiétude juive, fondée sur la désillusion, le chagrin, le sentiment d'une certaine solitude, est liée au rappel de la précarité de notre existence.

Cette meurtrissure finira-t-elle par s'estomper, puis s'éteindre "de génération en génération" ?

Notre réponse, transmise par les générations précédentes : Israël vivra, dans la petite bande de terre" de la rivière à la mer.