Blog du Crif - Yonathan, Président !

29 Juin 2022 | 169 vue(s)
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Opinion

Ce dernier détaille ici les multiples racines de l’antisémitisme, qui a explosé en France à partir de l’année 2000 et la première « intifada ». Et qui s’est fortement aggravé tout au long de l’année dernière. Marc Knobel évoque notamment l’origine idéologique – soulignée et étudiée par le philosophe et chercheur Pierre-André Tagguief – d’un antisémitisme qui découle d’un antisionisme extrême, lui-même alimenté depuis longtemps par les tenants de l’islamisme radical. Extrême gauche et extrême droite française en passant par « Dieudonné and Co » sont aussi, historiquement et actuellement, parmi les premiers diffuseurs de la haine antisémite en France. Description et analyse en huit points.

Partout en France, des crayons, des stylos et des feutres ont été brandis, les seules armes du courage et de la liberté contre d'autres armes qui tuent, qui souillent, qui meurtrissent à tout jamais.

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L’échéance était attendue.

Le hasard nous a rassemblés en fond de salle sans que nous y fassions attentions. Nous sommes en AG et le tout le monde est là. Nous sommes disposés comme tant de fois, mais pour la circonstance autour de Arielle. L’Uejf est là en force. Les anciens Présidents, les anciens tout courts, toutes générations confondues avec Judith, notre lien entre ce passé si présent et l’avenir qui se proclame sous nos yeux.

Cette fois, on est plus en congrès de l’Uejf. C’est « pour de vrai ».

Les résultats sont proclamés nous nous levons d’un seul élan. Yonathan Arfi vient d’être élu triomphalement Président du Crif.

On a pas nos quarante et quelques rides. On a 20 ans. On a 20 ans, Yonathan arrive à l’UEJF. On ne se connait pas vraiment mais quelques jours plus tard, il débarque avec sa bande de Grandes Ecoles manifester devant une librairie négationniste. C’est une opération risquée et mal organisée. Mais visiblement cela ne l’inquiète pas.

Je regarde fasciné ce grand garçon élancé qui vient d’intégrer HEC, qui sait tout faire et n’a jamais peur. La suite le prouvera souvent.

On a 20 ans. Nous comprenons surtout que notre pays souffre d´un mal dont nous le pensions guerri: l’antisémitisme. Nous le voyons arriver. A bas bruit. Personne n’en parle. Mais il se répand partout des cours de récréation aux amphis.  On invente un terme pour dénoncer ce nouvel antisémitisme : les antifeujs.

Le constat est évident. L’accroche est bonne. Mais derrière tout reste à faire. Il faut collecter l’information, la vérifier. Ce sera Yonathan. Nous allons plus loin. On sollicite la Sofres, ce sera encore Yonathan. On négocie la publication d un livre chez Calmann Lévy Yonathan est à la manoeuvre. Puis il faut arracher la une du Monde et de Libé; ce sera encore Yonathan. A même pas 20 ans, Yonathan savait déjà faire tout cela !

Et nul ne sait à mon avis ce que la révélation de la résurgence de l’antisémitisme dans notre pays doit à son intelligence précoce.

Oui, nous avons 20 ans.

20 ans qui nous font nous sentir très vieux. 20 ans d’effrondrement, de régression de l’idéal républicain, de quelques morts qui ne nous passent pas. De l’antisémitisme qui devient assassin avec Ilan Halimi, puis terroriste avec l’école Ozar Hatorah. 20 ans qui nous ont été meurtriers. 20 ans durant lesquels, Yonathan va mettre son énergie, sa vision à démentir le projet antisémite. Son programme de vie est simple, il s’investit partout il y a de la vie et de l’avenir. Où il s’invente. Dans le terreau fertile du dialogue entre les pouvoirs publics et les institutions juives. 

Président de l’UEJF, puis à l’OSE, à l’ALLIANCE ISRAELITE UNIVERSELLE. Dans ces deux dernières institutions où l’on bâtit de l’avenir, où l’invente un futur pour une jeunesse un peu désemparée, Yonathan n’est jamais loin. Avec son énergie et ses potes maintenant diplomés qui deviennent dans son sillage les militantes et les militants qui regénèrent les instances et les idées.

Et puis, au sein du Crif, auprès de Richard Prasquier, puis Roger Cukierman et enfin, Francis Kalifat. Tranquillement, sans proclamation, sans auto promotion, il s’est mis au service de cette institution dont il devient un pillier qui traverse, comme les Français juifs, des heures tourmentées et incertaines. Avec calme et détermination, au sein du bureau aux côtés des Présidents, Yonathan a beaucoup agi et beaucoup réfléchi.
C’est une chance inouie, de pouvoir compter sur quelqu’un d’aussi paré et préparé pour exercer une mission aussi sensible dans une période aussi dramatique: veiller au bien être des Français juifs. Rien chez lui ne traduit le trac. Le plus jeune Président du Crif est aussi le plus aguerri.

Yonathan Arfi, toutes générations, professions, et confessions confondues est l’un des êtres les plus brillants que j’ai croisé. De lui on peut dire sans se tromper qu’il est le meilleur d’entre nous ; et d’un nous qui serait bien plus vaste que l’assemblée du Crif qu’il préside désormais.

Yonathan ne partage pas mes emportements. Il n’a jamais été encarté ou que ce soit, et bien heureux celui qui saurait dire pour qui il vote, en dehors de son aversion affirmée à l’encontre des populistes et des extrêmes.

La réalité de notre lien est un long compagnonage où se mêlent les joies et les déceptions depuis les moments fondateurs  où tout s’apprend, puis plus tard où tout se prend: les bonnes et les moins bonnes nouvelles, les unions, les naissances, les carrières, les épreuves et mêmes parfois les rêves qui s’accomplissent en plus grand que nous l’imaginions. Notre amitié n’est pas politique. Puisque c’est une amitié. Et de tous mes amis, il est seul dont le nom soit pour moi synonyme de cet état merveilleux : avoir 20 ans !

Je lui souhaite, au moment où il relève le gant de notre destin commun, qu’il ait 20 ans encore très longtemps.

Patrick Klugman