Par Anne Sinclair
Deux choses m'ont marquée cette semaine : la charge très violente de Daniel Schneidermann contre Patrick Cohen pour les propos que celui-ci a tenus dans une émission. A savoir que la responsabilité d'un journaliste auprès de ses lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs, s'exerce jusqu'au choix de la personne à laquelle il tend un micro. Qu'un journaliste ne peut pas interviewer, sans dommages, n'importe qui. Que s'il permet à quelqu'un de délivrer un message, c'est son devoir de faire en sorte de ne pas diffuser n'importe quelle parole, hideuse, irresponsable ou criminelle. Que si cela relève certes de la morale personnelle de chacun et ne peut pas être érigé en leçon, le journalisme est cependant un choix, un tri, une hiérarchie et qu'on a le droit aussi de décider quels sont individus que l'on invite sur son plateau. Que tout ne vaut pas tout, sous le prétexte qu'untel est connu pour faire des éclats - et donc de l'audience - le collabo comme le résistant, le bandit comme l'honnête homme, l'écrivain comme le plagiaire, le bon comme la brute et le truand.