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Il y a quelques années, en avril 2017, la collection des Études du Crif publiait un texte, passionnant et toujours d’actualité, de Pierre-André Taguieff : « La vague complotiste contemporaine : un défi majeur ». L’historien des idées analysait le phénomène dans toute son étendue, historique, sociologique et politique. Près de six ans plus tard, parce que « la vague » n’a cessé de déferler et d’inonder toujours davantage les piliers du débat public et démocratique, nous avons voulu y revenir.
En sollicitant plusieurs intervenants – sociologue, philosophe et psychanalyste, observateur et acteur de terrain –, en insistant sur les enjeux d’éducation qu’elle soulève, et en nous interrogeant sur les moyens dont nous disposons pour endiguer le phénomène. La question est d’autant plus cruciale pour les Études du Crif que complotisme et antisémitisme ne cessent de se faire écho.
Plus que cela : d’une part, l’antisémitisme parait à bien des égards le modèle historique et paradigmatique du complotisme ; d’autre part, un certain nombre de théories du complot, comme irrésistiblement aimantées, semblent devoir s’embourber dans les préjugés antisémites.
Comment lutter contre le complotisme ? Au cœur d’une époque où la critique des institutions et la suspicion contre ceux qui les représentent se généralisent, où le doute – démarche critique nécessaire – peut prendre un tour pathologique et où l’évidence minimum à partager pour débattre sereinement semble disparaître, l’éducation à ce phénomène est prise dans une tension difficile. Faut-il se contenter de faire tomber la lumière de la raison sur des masses trop crédules ? Est-ce efficace ? Et d’où vient cette crédulité, qui est un symptôme de la crise que traversent nos démocraties libérales ? Comment ouvrir la possibilité d’une discussion raisonnable avec ceux que les théoriciens du complot peuvent facilement séduire ; en particulier les adolescents ?
Yonathan Arfi, Président du Crif
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