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Vendredi 10 février 2012, la Cour d’Appel de Limoges vient de confirmer cette condamnation, en augmentant considérablement tant les dommages-intérêts alloués aux parties civiles (1000€) que les frais irrépétibles (1000€ également), et a ordonné la publication de cette importante décision judiciaire, conformément aux souhaits des parties civiles.
Les faits qui se sont déroulés le 17 septembre 2010 consistaient en une manifestation sur une place de Limoges au cours de laquelle Mohamed Achamlane avait tenu un discours d’une extrême violence, arguant d’une islamophobie croissante en France et prétextant que le code pénal ne défendrait pas les musulmans (il avait jeté un exemplaire de ce code à terre et y avait donné un coup de pied), contestant la responsabilité d’Al-Qaïda dans la réalisation des attentats du 11 septembre, et s’insurgeant contre la chaine de télévision France 3 « et toute cette clique de sionards » qui ne donnent pas la parole aux musulmans.
Les faits antérieurs du 12 juin 2010, qui nous intéressent plus directement, concernaient l’appel à la discrimination par diffusion sur internet d’une vidéo relatant une action appelant au boycott d’un restaurant Mac Donald’s située au nord de Limoges, pour les liens supposés qu’entretiendrait cette entreprise avec Israël.
Avant de rappeler les faits importants qui furent reprochés à Mohamed Achamlane, il est nécessaire de relater rapidement l’action de boycott elle-même du 12 juin 2010 : un groupe de personnes (certains faisaient partie d’un autre groupuscule dénommé Sirât Alizza, la Voie de la Fierté) avait fait irruption dans ce restaurant Mac Donald’s, pour inciter les clients à boycotter les produits de cette chaine, dont les intérêts seraient liés à Israël.
Cette action avait été violente tant verbalement par la teneur des messages de haine proférés, que physiquement puisqu’une directrice du restaurant avait été bâillonnée pendant un court instant.
Deux membres de cette action de boycott furent condamnés à des peines d’amende et à indemniser les parties civiles précitées, par un jugement du Tribunal Correctionnel de Limoges en date du 21 septembre 2011, devenu définitif et ayant autorité et force de chose jugée : nous bénéficions ainsi, dans notre arsenal jurisprudentiel, d’une nouvelle décision judiciaire qui condamne les appels au boycott de produits qui seraient liés à Israël et il est important de le souligner.
Mais les faits ayant donné lieu à la condamnation de Mohamed Achamlane sont d’une toute autre ampleur, puisque cela concerne une vidéo consultable sur la toile, de cette action de boycott qui s’est déroulée dans ce restaurant Mac Donald’s. La diffusion en ligne d’une telle vidéo augmente notoirement le nombre de personnes qui peuvent visualiser ce support au contenu délictuel.
Mohamed Achamlane n’a pas participé directement à l’action dans le restaurant Mac Donald’s, mais ses agissements entraînent une bien plus grande responsabilité: il a participé au montage, au découpage et à l’assemblage de la vidéo tournée ce jour, il a cherché à conserver les scènes les plus marquantes et à effectué la diffusion sur internet de cette vidéo. Par ailleurs, il a fourni le tract « ACHETER PEUT TUER-BOYCOTT ISRAEL».
On notera au passage que Mohamed Achamlane, qui prône régulièrement l’instauration de la charia et du Califat en France, se revendique clairement de la campagne BDS et reconnaît alimenter le site internet de ce collectif en informations. Son organisation Forsane Alizza est d’ailleurs actuellement sous le coup d’une mesure d’interdiction du ministère de l’Intérieur pour incitation à la lutte armée.
Mohamed Achamlane appelle d’ailleurs généralement son auditoire au boycott des produits israéliens et de tout ce qui est « sioniste », en s’appuyant sur une fatwa du Cheikh Al-Albani surnommé Assad al-Souna (le lion de la Souna) qui obligerait tout musulman au boycott d’Israël. N’oublions pas que cette perception n’est heureusement pas partagée par la majorité des musulmans en France et dans le monde.
Cette vidéo était dangereuse et les magistrats de première instance et d’appel l’ont bien compris, car elle commençait par énoncer que la chaîne de restaurant Mac Donald’s serait dirigée par un certain Jack M. Greenberg, dont le nom ne peut qu’évoquer au public une judaïté évidente. L’effet attendu par Achamlane et ses sbires est vérifié puisqu’une directrice du restaurant présente le 12 juin 2010 a reconnu que le meneur de l’action de boycott, qui a été déclaré coupable de l’appel au boycott par le jugement rendu le 21 septembre 2011, avait parlé de « juif » pour décrire le grand patron qui soutenait Israël.
CQFD : Monsieur Greenberg serait donc le coupable juif, dont l’entreprise soutient « l’entité sioniste » et, ainsi, le boycott de son entreprise multinationale, qui soutient la guerre déclarée contre les Palestiniens, s’impose. L’antisémitisme est bien là, dès les premières secondes du clip vidéo, pour marquer la conscience des internautes.
Il ne s’agit donc pas d’un « simple » antisionisme (« le but est de sensibiliser au boycott des produits sionistes ») qui se veut étranger à tout antisémitisme comme le soutiennent les organisations pro-palestiniennes de ce collectif BDS ainsi que certains partis politiques (les Verts, Le NPA, le PCF). La frontière entre antisionisme et antisémitisme vole ici en éclats, au grand dam de ces humanistes pacifistes.
Dans ces conditions, comment les juifs pourraient-ils analyser la délégitimation actuelle d’Israël autrement que comme une forme cachée d’antisémitisme, sous le couvert d’un antisionisme «bon teint» ? Est-il utile de rappeler le but recherché par Omar Barghouti, le théoricien de la campagne Boycott Désinvestissement Sanctions, invité à participer le 28 février prochain à un « colloque » à une voix sur la Palestine dans les locaux de l’Université Paris VIII :
« Il ne s’agit pas de remettre en cause l’occupation militaire israélienne ou le déni du droit des réfugiés, mais tout le système d’exclusivisme raciste du sionisme.
C’est une nouvelle étape dans la lutte centenaire des palestiniens contre la conquête coloniale sioniste, puis l’occupation, l’exploitation et le régime d’apartheid institués par Israël.
Le boycott des produits des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés n’est pas une fin en soi, mais un temps tactique. Le but étant le boycott de tous les produits en provenance d'Israël »
Omar Barghouti «oublie» d’une part que le sionisme n’est pas une forme de racisme ou de discrimination raciale (cf. l’abrogation de la résolution 3379 le 16 décembre 1991) et, d’autre part, qu’il n’existe plus de système d’apartheid dans le monde comme l’a rappelé Stéphane Hessel lui-même le 6 janvier 2011.
Un internaute n’a-t-il pas ainsi écrit le 14 avril 2010 en commentaire du « manifeste des 2000 » sur le site internet du BDS France, signé par des personnalités politiques françaises : "Vite ramenez les étoiles jaunes et les pyjamas rayés!!!!! Après les produits on va boycotter les Juifs"?
La suite de la vidéo est d’ailleurs sans équivoque : les participants à cette action d’appel au boycott qui pénètrent ce jour dans le restaurant Mac Donald’s crient et haranguent les clients pour décrire les israéliens représentés par leur armée (« l’Etat terroriste d’Israël »), dont la multinationale Mac Donald’s est complice, comme des assassins d’enfants, des exterminateurs, des voleurs de terres, qui commettent un génocide. La dialectique proférée par les extrémistes du Hamas et d’autres organisations terroristes est donc largement reprise.
On entend le bébé d’une famille de consommateurs pleurer, apeuré par cette intrusion violente dont le meneur avait pris la peine de déclarer en pénétrant sur place, qu’il ne s’agissait pas d’une prise d’otages ! Il ne pouvait donc pas nier que son action allait choquer les clients du restaurant.
On voit les affiches représentant Ronald le clown, l’ami des enfants qui consomment dans ce restaurant, piétiner un enfant. On est choqué par les photos des enfants ensanglantés mises sous le nez des clients.
La vidéo se finit par un message impératif très explicite : «Que toutes les antennes de Sirât Alizza en fasse de même inchaalah! Et que tous les gens de bien cessent de financer ces monstres! ».
Cela se passerait de commentaire supplémentaire. Pourtant, en commentaire de cette vidéo mise en ligne par Mohamed Achamlane, on peut toutefois lire : « Bravo les gars! Bravo! On est beaucoup à penser comme vous...et pas que les McDonald's qu'il faut boycotter. Même Burger King et les STARBUCKS CAFES...tous des représentants d'Israël à l'étranger afin de ramasser de l'argent pour cet état fasciste...et les français sont ceux qui les soutiennent le mieux...nous aussi on va commencer à vous brûler dans nos pays arabes s'il le faut...pas de problème pour ça! L’essence est à si bas prix que on sera très généreux envers vous ».
Le Tribunal Correctionnel de Limoges, puis sa Cour d’Appel, disposaient donc de tous les éléments factuels, pour réprimer cette haine non déguisée en appliquant la loi (les articles 23 et 24 Alinéa 8 de la loi du 29 juillet 1881) et la jurisprudence déjà obtenue dont l’important arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme du 16 juillet 2009, pour déclarer Mohamed Achamlane coupable, puisqu’il a participé au montage et à la diffusion de l’intrusion au Mac Donald’s de Limoges le 12 juin 2010, faits qui constituent indéniablement une provocation à la discrimination de la marque Mac Donald’s en raison de ses liens supposés avec Israël.
D’autres procès sont en cours, tant en première instance qu’en appel, dont certains concernent également la mise en ligne de vidéos relatant des appels au boycott de produits israéliens effectués dans des supermarchés.
L’arrêt qui vient d’être rendu renforcera la position des parties civiles pour voir appliquer le Droit par nos juridictions, et sanctionner ces comportements discriminatoires.