Le CRIF en action
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Publié le 9 Décembre 2009

Lorsque le CRIF et les Verts se disent les choses…

Une délégation du CRIF, conduite par son président Richard Prasquier, et une délégation des Verts, conduite par Cécile Duflot, secrétaire nationale, se sont rencontrés mardi 8 décembre 2009, au siège des Verts.

D’emblée, Cécile Duflot a soutenu que les deux parties devaient dialoguer, car le dialogue est nécessaire et utile, surtout après que des malentendus ont eu lieu ces dernières années. Elle a rappelé à ce sujet que, lors d'un dîner annuel du CRIF, le 27 janvier 2003, l’ancien président, Roger Cukierman avait dénoncé une « alliance brun-vert-rouge » antisémite, provoquant le départ de la salle de Gilles Lemaire, secrétaire national des Verts. « Les amalgames peuvent froisser et blesser », a-t-elle indiqué. Elle a dit par ailleurs regretter l’absence d’invitation des Verts au dernier dîner du CRIF (2 mars 2009). Richard Prasquier a rétorqué que les amalgames ne manquent pas lorsque l’on parle des positions du CRIF. Il a aussi expliqué que, durant le conflit entre Israël et le Hamas, la communauté juive avait mal vécue cette période. Il a raconté qu’il se trouvait à Sdérot à ce moment là. « La ville était quotidiennement bombardé par le Hamas, depuis de nombreuses années, alors que les israéliens s’étaient désengagés de ce territoire. Les habitants étaient traumatisés. Sdérot, c’était invivable. La population se demandait ce qui se passait ». « Quel gouvernement au monde accepterait que ses villes soient bombardées, ses habitants terrorisés, sans que personne ne réagisse et ne bouge ? », s’est exclamé alors le président du CRIF. Richard Prasquier a également rappelé qu’en France, tout au long du mois de janvier, des manifestations violentes ont été organisées où l’on scandait « Israël assassin ! » dans les rues de Paris. Il a ajouté qu’un certain nombre d’agitateurs ont provoqué des violences et ont voulu marcher sur des synagogues, pour en découdre avec les Juifs. « Les prises de position dans les moments difficiles, cela compte, si on a le courage de parler contre soi-même » a-t-il indiqué, faisant allusion à l’absence de communiqué des Verts, pour condamner les dites violences.

Tout en confirmant l’absence de communiqué, Cécile Duflot a répondu que « lors des manifestations, il n’y a eu aucune complaisance avec les violences... On a essayé de ne pas se mélanger, de repousser les gens et il y avait une crainte très forte. » « Il est blessant que l’on ait pu imaginer qu’il ait pu avoir une complaisance à ce niveau-là » a-t-elle dit à Richard Prasquier. Puis, elle a parlé du Hamas. « Le Hamas est préjudiciable à la population de Gaza, c’est une évidence. Il est dangereux, notamment pour les femmes. » Elle a regretté par ailleurs que le Hamas ait progressé dans une situation sociale extrêmement difficile et « d’oppression des Palestiniens ». Puis, elle a ajouté « bien sûr que les roquettes c’est scandaleux, mais les moyens utilisés (par Israël) sont tout aussi dangereux et ne résolvent rien. » Néanmoins, elle a ajouté que les Verts « n’ont pas de position exclusivement centrée sur Israël et les Palestiniens. » Richard Prasquier lui alors répondu : « quelle armée au monde prévient les civils, par des largages incessant de tracts, que des bombardements vont avoir lieu ? » Richard Prasquier a rappelé, par ailleurs, que les terroristes du Hamas ont utilisé les civils, se sont mélangés à eux, se servant d’eux comme de boucliers humains. « Etant donné les conditions de l’opération et la façon dont les choses se sont déroulées, l’armée israélienne a fait le moins de mal possible. »

Dans le cours de la conversation, Cécile Duflot a indiqué que « l’on peut avoir de l’amitié pour les Juifs, une aversion profonde pour l’antisémitisme, et devoir être vigilant contre l’antisémitisme, on peut être d’une fermeté totale et ne pas confondre (cela) avec la politique israélienne. » « Comment construit-on la paix ? Quel rôle pouvons nous jouer, nous qui ne vivons pas là-bas ? Quel rôle jouons-nous ? (ce d’autant plus) que les questions du mur et des colonies compliquent les choses »

Marc Knobel, chercheur au CRIF a alors pris la parole : « Quel rôle jouer ? Pourquoi n’iriez-vous pas en Israël, pourquoi ne rencontreriez-vous pas des politiques, des diplomates, le peuple, à la place d’appeler au boycott des produits israéliens ! » « Lorsque les Verts décident de soutenir, le 6 octobre 2009, l’appel au BDS (boycott, désinvestissement, sanctions contre Israël), ils commettent une faute. Pensez-vous que la stratégie qui consiste à empêcher que le salon du Livre se tienne en mars 2008, sous le prétexte qu’Israël en fut l’invité d’honneur, soit une bonne stratégie ? Pensez-vous que le boycott d’universitaires, de scientifiques ou d’universités israéliennes ait un sens ? Pensez-vous que vous ferez progresser la paix en boycottant Amos Oz, David Grossman et d’autres écrivains israéliens, alors qu’ils encouragent la continuation du processus de paix ? Pensez-vous que les vociférations et les gesticulations des militants d’Europalestine, notamment à l’intérieur de supermarchés, pour empêcher la vente de produits israéliens, soit une bonne méthode ? Et que penser des sites Internet qui appellent au boycott ? Tout cela est illicite, discriminatoire et honteux », a affirmé Marc Knobel. Cécile Duflot lui a répondu que le boycott était pacifique et qu’il ne fallait pas faire d’amalgames. « Les intrusions dans les supermarchés, ce n’est pas nous », a-t-elle déclaré, ajoutant que les Verts se limitent aux produits israéliens qui sont cultivés dans les territoires. « Dans les territoires ? Mais, on vous ment lorsque l’on vous incite à appuyer le BDS et lorsque l’on vous dit que le boycott vise essentiellement les produits des territoires. Omar Barghouti, le théoricien du boycott a définit la stratégie : il veut qu’Israël soit traité comme l’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid. Et nombre d’initiateurs du boycott veulent détruire l’Etat d’Israël », a répondu Marc Knobel. « Nous savons, a-t-il poursuivi, ce que l’on fait pour stigmatiser Israël. Les associations pro-palestiniennes raffolent de ce genre de vocables (‘Apartheid’, ‘génocide du peuple palestinien…’) et de comparaisons, tant elles aiment utiliser mots et concepts qui catégorisent le conflit ou diabolisent l’Etat d’Israël ! » Richard Prasquier a surenchérit : « Vous n’avez pas conscience du niveau de haine (des Juifs) qui existe depuis Nasser ! »

Jean-Marc Brûlé, maire de Cesson, conseiller régional (Vert) d’Ile de France a rétorqué que « le dialogue est très utile. Mais, nous savons ce que nous devons faire en tant que pacifistes. » Il a reconnu qu’il y a une « tentation dans un certain nombre de composantes d’utiliser des moyens pour nourrir la haine des Juifs et vouloir la destruction d’Israël. C’est inqualifiable. Utiliser le terme de ‘génocide’ est extrêmement grave, il faut être extrêmement vigilant pour faire notre devoir en tant que parti politique et par conséquent pouvoir critiquer une politique… je pense que lorsque l’on parle du boycott, c’est une arme non-violente mais, la chose est plus sensible, lorsqu’il est question d’Israël. « Le boycott n’est pas une arme, il est une discrimination, le code pénal est très clair », a répondu Marc Knobel.

Bernard Gahnassia, président de la commission des relations avec les élus locaux et membre du comité directeur du CRIF a conclu la réunion en ces termes : « Ces échanges me renforcent dans l’idée qu’il faut se parler. » Il a proposé que Cécile Duflot soit invitée par le CRIF et rencontre les membres du Conseil. La secrétaire nationale a accepté le principe d’une rencontre ultérieure.

Photo : D.R.

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