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Publié le 24 Mars 2021

France - Strasbourg : Une "résolution" municipale contre l'antisémitisme rejetée

Retoquée lors du conseil municipal de février, une « résolution » municipale contre l'antisémitisme a été déposée une seconde fois par Jean-Philippe Vetter (LR) pour la séance de lundi dernier à Strasbourg. Acceptée cette fois à l'ordre du jour par la maire écologiste Jeanne Barseghian, elle n'a pas été adoptée par sa majorité. Le Crif Alsace a immédiatement réagi et publié un communiqué.

Publié le 24 mars dans Dernières Nouvelles d'Alsace

Le conseil municipal de Strasbourg a rejeté la définition de l'antisémitisme donnée par l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA).

La maire écologiste de Strasbourg n'avait pas souhaité retenir, le 22 février dernier en conseil municipal, une résolution émanant de l'opposition (LR) qui reprenait la définition de l'antisémitisme donnée par l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA). Jeanne Barseghian avait alors retoqué cette résolution au motif qu'elle avait déjà « fait l'objet d'une motion adoptée à l'unanimité lors du conseil municipal du mois d'août dernier ». Et qu'en outre, le texte déposé ne répondait pas au règlement intérieur.

Cette même résolution, légèrement modifiée, a été déposée par Jean-Philippe Vetter (LR) ce lundi. Cette fois, la maire de Strasbourg l'a inscrite à l'ordre du jour. Pour l'élu d'opposition Jean-Philippe Vetter, la définition de l'IHRA permet de « définir ce qu'est le nouvel antisémitisme » pour « mieux le combattre à Strasbourg ». Elle dit en substance qu'« on peut critiquer la politique menée par Israël », mais pas « nier l'existence même de l'État d'Israël », a considéré le conseiller municipal en rappelant que le texte a été voté par Assemblée nationale, le Bundestag, le Parlement européen, la Ville de Paris et celle de Nice.

Pierre Jakubowicz (Agir) a estimé qu'« être d'accord sur la définition commune de ce sur quoi nous luttons, est le point de départ [...] pour agir concrètement contre ce fléau. » De son côté, Pernelle Richardot (PS) a ajouté que « c'est se donner des armes pour combattre l'antisémitisme ». Tandis que Catherine Trautmann a souhaité ajouter la définition « opérationnelle » de l'IHRA à la résolution de Jean-Philippe Vetter : « L'antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l'antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte. »

Tout en condamnant l'antisémitisme et le racisme, Joris Castiglione - élu de la majorité, référent du quartier Robertsau-Cité de l'Ill - a exprimé, au nom du groupe majoritaire écologiste, ses « réserves » quant au fait que la résolution fasse avancer la cause de ce combat. Elle est, a-t-il indiqué, « source de confusion préjudiciable au combat commun parce que les interprétations qu'elle ouvre sont sujettes à débat, donc à polémiques. »

« La définition apporte du flou »

Jeanne Barseghian a estimé que la définition, proposée par Jean-Philippe Vetter, « apporte du flou là où la loi française est très claire. Traiter différemment une personne en raison de sa religion réelle ou supposée, c'est un délit. Nous avons systématiquement condamné ces actes [...] Nous devons mettre fin aux palabres et agir concrètement pour que ces actes d'antisémitisme n'aient plus lieu. »

« La réalité aujourd'hui, a rétorqué Alain Fontanel, est que dans beaucoup d'espaces d'expression publique (cours d'écoles, réseaux sociaux, prisons), il y a une utilisation de l'antisionisme comme une démarche antisémite ».

Syamak Agha Babaei, premier adjoint, estime que « cette définition n'est pas consensuelle » et « a suscité un débat à chaque fois qu'elle a été proposée au vote » ailleurs.

« Nous sommes tous dans cet hémicycle engagés contre l'antisémitisme », a conclu Jeanne Barseghian - qui dit avoir reçu des insultes, des agressions verbales la traitant d'antisémite, à l'issue du précédent conseil. Rappelant qu'elle « n'accepte pas l'instrumentalisation de cette question », ayant « senti cette douleur dans ma chair », comme « arrière-petite-fille de personnes persécutées pour leurs origines et leur religion ».

La résolution a été rejetée par la majorité. Ses alliés socialistes avaient voté pour, tout comme l'opposition LaREM-MoDEM-Agir et LR.

Le Crif Alsace a réagi ce mardi à ce vote : « Cette majorité municipale a terni l'image de Strasbourg capitale de l'Europe, berceau de l'humanisme rhénan et décrédibilisé sa politique contre le développement de toutes les haines racistes : le racisme ne fait pas de différence entre l'antisémitisme et la xénophobie anti-israélienne qui s'est exprimée dans les arguments de certains membres de la majorité municipale actuelle de Strasbourg. »

 

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