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Publié le 23 Décembre 2015

Juifs et chrétiens, frères à l’évidence, par Mgr Pierre d’Ornellas et Jean-François Bensahel

Une réflexion commune sur sur l’idée d’une élection en partage.

Une recension de Bruno Charmet, publiée sur le site de l'Amitié Judéo Chrétienne de France (AJCF), décembre 2015
 
Dans le présent livre de dialogue entre Mgr Pierre d’Ornellas, Archevêque de Rennes et Jean-François Bensahel, Président de l’Union libérale israélite de la synagogue de la rue Copernic (Paris), ce qui frappe d’emblée c’est la prise en compte, comme réalité fondamentale, de l’élection d’Israël, cœur du Judaïsme, élection en partage, foyer central qui irradie vers les Nations, vers le Christianisme, fils cadet de la Promesse.
 
Autant dire que la méditation sur l’élection et ses conséquences est, pour nos deux interlocuteurs, le cœur du dialogue judéo-chrétien, l’origine à partir de laquelle tout commence et se développe. Il faut dire que Mgr d’Ornellas avait déjà attiré l’attention des Chrétiens, il y a plusieurs années, sur cette réalité fondamentale de la Révélation qu’est l’élection, et surtout sur cette donnée que la foi chrétienne ne peut se vivre que greffée sur l’élection d’Israël. Il insistait aussi sur l’indissociabilité entre Élection et Révélation, car c’est précisément en faisant élection avec un Peuple (Israël), que Dieu se révèle pour l’ensemble des Nations. Cet enseignement, il l’avait donné en juillet 2012 dans le cadre des Sessions « Découvrir le Judaïsme : les Chrétiens à l’écoute », des diocèses de l’Ouest, à La Hublais (Rennes) avec ce titre significatif, L’élection d’Israël, une bonne nouvelle pour les Chrétiens [1], intitulé qui définit déjà tout un programme.
 
Dans le présent livre, Mgr d’Ornellas insiste sur la conviction biblique selon laquelle « l’humanité ne constitue pas une masse uniforme et, d’une certaine manière, indifférente » (p. 155). Si la Bible et ses prophètes partaient de l’universel indifférencié, on aboutirait aux multiples totalitarismes que l’humanité a connus à travers son histoire.
Au contraire, Dieu élit toujours une personne singulière pour élargir ensuite vers l’universel : « La lecture de la Bible, hébraïque et chrétienne, nous renseigne sur la place singulière du ’’fils préféré’’. Celui-ci est aussi un fils aimé, un fils choisi. Dieu procède par élection, c’est-à-dire par choix libre et gratuit. Ce principe d’élection inspire cette parole extraordinaire : ’’Tu as du prix à mes yeux’’ (Es 43,4) Dieu parle à l’élu qu’il chérit ! Pour Dieu, ce fils préféré, lui qui a du prix à ses yeux, est bien évidemment ’’Israël’’. Voilà ce que pense le peuple de la Bible et ce qu’il médite aujourd’hui avec les chrétiens ! » (p. 156).
 
Et Jean-François Bensahel [2], profondément enraciné dans son Judaïsme, éveillé à la relation chrétienne, notamment par Olivier Clément, chrétien orthodoxe, son professeur d’histoire au lycée Louis-le-Grand, qui fut pour lui un exemple et une inspiration, lui répond : « Il est le Dieu de tous en se révélant comme le Dieu d’Israël, comme le Dieu révélé à Israël » (p. 157). En parfaite consonance avec Mgr d’Ornellas, il insiste sur l’idée d’une élection en partage, dont toute l’histoire du peuple de la Bible témoigne : « En méditant sur l’élection, Israël comprend que la reine de Saba, et les nations, viendront un jour à Jérusalem reconnaître le Dieu révélé à Israël et qu’Israël révère comme l’unique Dieu. Le peuple juif sait très bien que si Dieu a choisi Isaac, il a aussi béni Ismaël. C’est écrit en toutes lettres au chapitre XVII de la Genèse. Mieux encore, il est parfaitement conscient que toutes les nations auront part à la bénédiction d’Abraham. Si le Dieu d’Israël se révèle ainsi, c’est pour dévoiler qu’il est aussi Dieu des autres nations, et qu’il veut entretenir avec elles une profonde relation d’amour » (p. 157). Dès lors, c’est toute personne créée qui a un prix infini pour le Dieu de la Bible. L’Élection est donc le noyau central de ce livre ; l’Alliance (Berit) de Dieu avec son peuple, renouvelée en Christ, procède du même dynamisme : d’un peuple choisi à l’univers entier... Lire l'intégralité.
 
Notes : 
[1] Mgr P. d’Ornellas, L’élection d’Israël, une bonne nouvelle pour les Chrétiens, in Sens, n°382, septembre-octobre 2013, pp. 657-672. Déjà, en juillet 2010, lors de la première session des diocèses de l’Ouest, à l’abbaye N-D. de Melleray (diocèse de Nantes), il avait centré sa conférence sur Le Mystère de l’Élection, in Sens, n°370, juin 2012, pp. 446-448.
[2] J. F. Bensahel a été l’une des personnalités juives (avec le Rabbin Haddad, le Rabbin Rivon Krygier, Raphy Marciano et Franklin Rausky) à signer une « Déclaration pour le jubilé de fraternité à venir », « nouvelle vision juive des relations judéo-chrétiennes » qui se veut une réponse juive au 50ème anniversaire de la Déclaration conciliaire Nostra Aetate. L’événement eut lieu à Paris, au Collège des Bernardins, le 23 novembre 2015, et la Déclaration fut remise par le Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, au Cardinal André Vingt-Trois, Archevêque de Paris.
 
CRIF