Dans le très beau livre collectif de réflexions sur l’ « affaire », les auteurs remontent parfois loin dans le temps pour tenter de cerner les contours du nouveau totalitarisme qui menace l’Occident. André Malraux lui-même, par-delà sa fameuse déclaration contestée sur la religiosité du XXIème siècle, est appelé à la barre des témoins. Dans un texte daté du 3 juin 1956, il écrivait : « C’est le grand phénomène de notre époque que la violence de la poussée islamique. Sous-estimée par la plupart de nos contemporains, cette montée de l’Islam est analogiquement comparable aux débuts du communisme du temps de Lénine. Les conséquences de ce phénomène sont encore imprévisibles… »
Le décor est désormais planté dit Jean-Paul de Belmont qui explique : « Très vite, l’islamisme a imbibé l’ensemble de nos sociétés et a provoqué la montée d’un cran du positionnement par rapport à la religion coranique. Ceux qui étaient de fervents Musulmans se sont rapprochés de l’intégrisme. Ceux qui étaient simples pratiquants sont devenus de fervents Musulmans, et certains, qui n’étaient pas musulmans, le sont devenus ». « Pauvreté, indigence culturelle, abdication des pouvoirs culturels et éducatifs, Islam politique et idéologique, gauche compassée, tels sont les ingrédients d’une véritable bombe sociale. Une bombe, qui, prévient Jean-Paul de Belmont, ne fera pas que des Juifs comme victimes. « Tous les Français seront, cette fois-ci, en première ligne ».
Tous les ratés de nos canaux d’information et de notre système scolaire sont passés au crible : l’affaire « Al-Dura », Djénine, Djénine, Route 181, La Porte du Soleil, les émissions de Daniel Mermet, la novlangue de l’AFP, la polémique sur le voile à l’école, les violences scolaires, les ratés de la Justice, les dérives du multiculturalisme, le 11 septembre, l’assassinat de Théo Van Gogh et les tribulations de la courageuse Ayaan Hirsi Ali. Un véritable florilège de toutes ces folies qui nous écrasent et nous empêchent de respirer librement.
L’ouvrage commence par une interview émouvante de Ruth Halimi, la courageuse et stoïque mère du supplicié de Bagneux dont la conviction, depuis le premier jour de l’enlèvement est ferme : « Ilan a été désigné parce que juif, enlevé, torturé, mis à mort, parce que juif ». « Dès le deuxième jour de l’enlèvement d’Ilan, mon gendre a assisté avec les policiers aux demandes de rançon téléphoniques ; elles s’accompagnaient de lectures de versets du Coran ». Et Ruth Halimi d’ajouter : « Moi qui viens d’un pays arabe, je me souviens des Musulmans comme de gens ayant des règles de vie ; ces barbares n’ont rien compris ». Une maman meurtrie à jamais et qui, d’une certaine manière, en veut un peu à son fils d’avoir agi à la légère, d’ « accepter un rendez-vous avec une inconnue, partir avec elle ! », « Ilan a pris un risque qu’il n’aurait pas dû prendre ! Pourtant il sait, il a appris…C’est écrit, vous savez ; il ne faut pas se mettre en position de danger. Et quand on est juif, il faut être doublement, triplement vigilant ».
Émouvant, généreux, bien documenté et salutaire. À lire absolument.
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions Yago. Février 2006. 162 pages. 15€