Tribune
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Publié le 21 Juillet 2015

Le piège à mensonges du BDS

Le mouvement BDS est une véritable catastrophe, pour le conflit israélo-arabe en général et pour les Palestiniens en particulier.
 
Par Ben Dror Yemini (photo), journaliste et éditorialiste au quotidien israélien Yediot Aharonot (traduction Bruno J. Melki) publié sur I24 News le 20 juillet 2015
 
Voici près d’un siècle, ma grand-mère quittait Sanaa, la capitale du Yémen, pour Israël. Elle ne savait pas ce qu’était la Palestine. Aucun pays ne répondait à ce nom. Il y avait un Empire ottoman. Ma grand-mère s’est enfuie avec mon père, alors bébé, en raison de la « loi des orphelins », alors en vigueur à l’époque. Veuve, venant de perdre son mari, elle aurait été forcée de se convertir à l’Islam en restant au Yémen.
 
J’ai pensé à ma grand-mère en lisant l’interview d’Omar Barghouti dans Le Monde du 02 juillet 2015, au sujet des juifs des pays Arabes. A-t-il seulement conscience de ce qu’il avance ? N’a-t-il jamais entendu parler des persécutions endurées par les Juifs des pays Arabes pendant des siècles ? Le sulfureux statut de « dhimmi » lui dit-il quelque chose ? Est-il au courant des pogroms (the Farhood, Bagdad, 1941; Libya, Tripoli, 1945, 1948; Yemen, Aden, 1948; Morocco, Djerada, 1948; Syria, Aleppo, 1947), des accusations de meurtre rituel au sein de la population musulmane à l’encontre des juifs ? (Syria, Damascus, 1840; Iran, Shiraz, 1910) Des pogroms qui ont eu lieu bien avant la création de l’état d’Israël, avant même les prémisses du sionisme politique.
 
Le grand Mufti de Jérusalem, Hadj Amin El Husseini, l’un des leaders des Arabes palestiniens durant les décennies qui ont précédé la création de l’Etat d’Israël en 1948, collaborait avec les nazis et a même vécu à Berlin, sous l’auspice d’Hitler, pendant la Seconde Guerre mondiale. Husseini est allé jusqu’à planifier l’extermination des juifs des pays Arabes. El Husseini a systématiquement refusé tout compromis, tourné le dos à tout compromis avec les juifs en Terre sainte. Il était l’un des opposants les plus farouches à la proposition de partage de l’ONU en 1947. Il porte une responsabilité considérable dans la Nakba dont parlent les Palestiniens (la défaite des Arabes pendant la guerre de 1948). El Husseini était un fervent militant du boycott des produits juifs, que ce soit dans la Palestine sous mandat Britannique ou en Allemagne après l’arrivée des nazis au pouvoir. Barghouti, désormais à la tête d’un mouvement de boycott, ignorerait-il ces faits bien qu’ils fassent partie de l’histoire du conflit Israélo-Arabe ? J’en doute.
 
La principale revendication du mouvement BDS est le « droit au retour ». À notre époque, un droit doit être universel sinon, ce n’est plus un droit, mais une revendication particulière. Ainsi, en Europe, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, plus de vingt millions de personnes ont été déplacées, expulsées de leurs maisons. Parmi elles, des millions d’Allemands de Tchèques, de Hongrois, de Polonais de Roumains et d’Ukrainiens. Existe-t-il une personne sérieuse pour réclamer, par exemple, le droit de retour des Polonais expulsés d’Ukraine ? L’application d’un tel droit créerait le chaos. Dont l’Europe n’a pas besoin. Ni le Moyen Orient. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, Churchill déclarait devant le Parlement britannique : « L’expulsion est la méthode la plus appropriée et aussi celle qui est la plus stable. Il n’y aura pas de mélanges de populations qui provoqueraient des conflits interminables… Un bon nettoyage sera effectué, je ne m’alarme pas pour autant de ces expulsions-là ». Une déclaration épouvantable, conforme au point de vue de l’époque.
 
C’est ce qui s’est produit lors de chaque conflit. Entre autres, entre Grecs et Turcs, Hindous et Pakistanais, entre la Russie et la Finlande. Il y avait plus de 52 millions de réfugiés pendant la première moitié du siècle dernier. Combien d’entre eux ont bénéficié d’un « droit au retour » ? Aucun. Je ne vois donc pas quel droit évoque Barghouti. Il oublie évidemment au passage les centaines de milliers de Juifs expulsés des pays Arabes où ils vivaient pourtant depuis des siècle, en raison de ce même conflit. Ces derniers n’ont pas connu de « droit au retour », leurs biens spoliés ne leur seront jamais rendus, tout comme ceux des réfugiés Allemands, Polonais, Thèques, Ukrainiens Slovaques ou Hongrois. Pourquoi les Palestiniens devraient être différents?
 
Plus de 200.000 Grecs sont devenus réfugiés, leurs biens confisqués, à la fin du conflit entre la Chypre et la Turquie dans les années 1970. Ces réfugiés se sont tournés vers les instances juridiques internationales pour voir leurs revendications rejetées, tout comme celles des réfugiés des années 1940. Omar Barghouti, pourtant au fait des lois sur les réfugiés, connaît-il ces précédents ?
 
Le problème avec le mouvement BDS est qu’il est une véritable catastrophe pour le conflit israélo-arabe en général et pour les Palestiniens en particulier... Lire l'intégralité.