Tribune
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Publié le 7 Octobre 2005

En raison de propos antisémites tenus par Dieudonné et par un animateur de cette radio, Radio Méditerranée est mise en demeure par le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel

Une mise en demeure a été adressée par le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel à radio Méditerranée FM -qui appartient au Franco-tunisien Tawfik Mathlouti, créateur de la boisson Mecca-Cola- en raison de propos antisémites tenus par Dieudonné le 31 mars 2005 sur son antenne, puis par l'animateur de l'émission Tribune libre le 10 avril 2005.



Le 31 mars 2005, l'un des animateurs de Radio Méditerranée a déclaré : « Les juifs du Moyen-Orient ont participé amplement aux vagues d'esclavage puisque beaucoup de commerçants étaient juifs », Ce à quoi Dieudonné a répondu : « [...] La vérité, c'est qu'effectivement, ce peuple juif qui se dit persécuté de toujours a aussi participé à des persécutions ignobles. Il faut aussi qu'il assume [...] ». Le 10 avril 2005, l'animateur de l'émission Tribune libre s'est exprimé de la façon suivante : « [...] Le judaïsme, je l'ai déjà dit, ça reste une religion qui est un club privé, il faut presque une golden carte pour en faire partie. Je veux dire, ça reste un club de privilégiés, un club de nantis et un club extrêmement fermé aux autres, qui se replie et qui mourra par lui-même parce qu'il est tellement replié sur soi qu'il ne se renouvellera plus [...] ».

Le Conseil a estimé que de tels propos sont contraires :

- aux dispositions des articles 23 et 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui répriment ceux qui, par un moyen de communication au public, « auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence, à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personne à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ;

- aux dispositions de l'article 32 de la même loi, qui prohibe « la diffamation commise par les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ;

- aux dispositions de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, en ce qu'ils constituent une incitation à la haine et à la violence pour des raisons de race, de sexe, de moeurs, de religion ou de nationalité.

(Date de publication sur le site du CSA : 4 octobre 2005 - Assemblée plénière du CSA du 6 septembre 2005)


A plusieurs reprises, le CRIF a attiré l’attention du CSA sur la responsabilité de la station Radio Méditerranée, qui depuis plusieurs années, se livre régulièrement à des mises en cause violentes de la communauté juive. Le CRIF a demandé au Conseil supérieur de l’audiovisuel de prendre toutes les mesures dont il dispose et qui s’imposent, pour endiguer le flot montant de l’antisémitisme audiovisuel.

Rappel d’autres infractions constatées sur Radio Méditerranée :

Constatant la tenue, tant par l'animateur que par des auditeurs, de propos de nature à inciter à la haine raciale lors des émissions Tribune Libre des 5 septembre, 10 octobre et 24 octobre 2004 diffusées sur Radio Méditerranée, le Conseil avait mis en demeure cette station, le 17 décembre 2004, de respecter l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, l'article 7 de sa convention et la recommandation n° 2003-2 du 18 mars 2003 du Conseil. Le CSA avait relevé certains commentaires : « Les Juifs ont de mauvaises croyances, en particulier celle qui dit qu’un non-juif ne doit pas être traité comme son propre voisin. » ; « Israël, l’entité sioniste, est une entité raciste basée sur la supériorité de la race juive. »

Le 22 avril 2003, une mise en demeure avait été adressée par le CSA à Radio Méditerranée pour avoir annoncé, le 6 avril 2003, lors de son émission hebdomadaire Tribune Libre, la mort du président tunisien Ben Ali, prétendant se fonder sur une dépêche d'agence de presse qui n'existait pas. Une semaine plus tard, le même présentateur a prétendu que l'absence de démenti officiel confirmait la véracité de l'annonce initiale. De telles annonces constituent, aux yeux du Conseil, un manquement à l'article 9 de la convention de la radio qui stipule que le titulaire doit s'assurer de l'honnêteté de l'information.

Le 6 décembre 2003, le CRIF avait protesté de la manière la plus solennelle contre les propos tenus par Dieudonné M’Bala et Tawfik Mathlouthi lors de l’émission « Francemed Politique », diffusée sur Radio Méditerranée le 6 décembre 2003. Lors de cette émission, Dieudonné M’Bala et Tawfik Mathlouthi ont multiplié les dérapages antisémites, accusant notamment le judaïsme de s’opposer aux principes républicains de « liberté ; égalité ; fraternité » et les juifs de se livrer à une « guerre » ainsi qu’à diverses « manipulations » au sein des médias. Durant plus d’une heure, les participants à l’émission ont alterné injures, diffamations et insinuations scandaleuses, tant à l’égard des juifs que de la « société blanche judéo-chrétienne ».

Enfin, le CSA avait adressé en 2002 une mise en garde à Radio Méditerranée pour des propos appelant à la haine raciale, propos proférés par un auditeur.

Marc Knobel