- English
- Français
Ce procès s’annonce à haut risque pour la sacro-sainte image du Qatar en France. C’est la première fois que les autorités de ce pays intentent des poursuites à l’étranger contre un intellectuel arabe.
Ce procès commencera vers 16h30, dans la 17eme chambre du Tribunal de Grande instance de Paris, au Palais de Justice, 4 boulevard du Palais, 75001 Paris.
L’affaire a commencé le 5 février 2013 sur la chaîne France 3 du groupe France -Télévision, dans l’émission « Ce soir ou jamais » de Frédéric Taddéi dont le sujet était : « Qatar, ami ou ennemi Numéro 1 ? ».
À la fin de sa violente diatribe contre ce qu’il appelle « l’émirat bédouin » qu’il accuse notamment de soutenir « l’islamo-fascisme » partout dans le monde, y compris en Europe, Mezri Haddad, a repris une information que nous avons publiée quelques jours plutôt, le 27 janvier 2013, sur Dreuz.info, à propos de Khadija Benguenna, journaliste vedette d’Al Jazeera : « Hitler était très tolérant envers les Waffen SS musulmans, il les laissait prier ».
Sur le plateau de télévision, l’ancien ambassadeur de Tunisie à l’UNESCO a répété les propos écrits en arabe sur la page Facebook de la journaliste que nous avions dénoncés, dont son commentaire saluant ”l’humanité d’Hitler”, qui autorisait les ” soldats musulmans à faire la prière”.
En France, la glorification du nazisme est interdite par la loi. L’utilisation d’Internet à la gloire du passé nazi, du mouvement nazi et du néonazisme est punissable et relève du droit commun.
Khadija Benguenna, qui a été la première présentatrice arabe d’Al Jazeera à porter le hijab, est proche du prédicateur islamiste et antisémite Youssef al-Qardaoui, Égyptienne d’origine et Qatari d’adoption, chef de file du mouvement des Frères musulmans.
En 2007, le magazine Forbes classait Madame Benguenna comme l’une des dix femmes les plus influentes du monde arabe.
Mezri Haddad, qui lutte depuis des années contre l’idéologie islamiste et qui affirme que le Qatar a joué un rôle clef dans les événements de janvier 2011 en Tunisie et dans l’arrivée au pouvoir d’Ennahda, a tenu des propos très durs contre le Qatar, une monarchie absolue basée sur la loi islamique. Selon lui, « l’émirat bédouin », est engagé dans le « prosélytisme wahhabite et islamo-fasciste en Europe et dans le monde arabe » et ce micro-Etat « soutient au Maghreb et en Afrique l’islamo-terrorisme ».
Les propos de l’ancien diplomate tunisien ont choqué l’Ambassadeur du Qatar en France, Mohamed Jaham Al Kuwari, qui a dépêché une équipe d’avocats parisiens pour lancer des poursuites contre M.Haddad.
Rappelons que Al Kuwari, qui était en poste à l’Ambassade du Qatar à Téhéran, est un proche du cheikhHamad bin Khalifa Al Thani.
Ce n’était pas la première fois que Mezri Haddad s’en prenait violemment au Qatar et à « l’oligarchie bédouine » qui gouverne l’émirat gazier.
Depuis janvier 2011, il mène une guerre politique et médiatique sans merci contre les « imposteurs du printemps arabe ». Il la mène aussi bien en Tunisie qu’en France, avec un réseau politico-médiatique aussi discret que redoutable. On a pu constater d’ailleurs que depuis quelques mois, les médias français n’accordent plus au Qatar le même traitement de faveur, et ferment moins les yeux sur l’extrémisme qui pourrait s’apparenter à l’extrémisme de droite s’il ne s’agissait pas d’islam. Il ne se passe pas une semaine en France où un quotidien ou un grand hebdomadaire ne consacre pas sa Une au « péril Qatari ».
La même aversion vis-à-vis du Qatar est d’ailleurs manifeste en Algérie, en Égypte et en Libye, sans parler de la Syrie où le Qatar finance des miliciens islamistes venus des quatre coins du monde pour provoquer la chute du régime autoritaire de Bachar al Assad.
Depuis deux ans, l’audience d’Al-Jazeera a baissé de façon vertigineuse. Les 100 millions de téléspectateurs arabes dont se targuait cette chaine subtilement islamiste ne sont plus qu’un lointain souvenir. Certains spécialistes parlent d’une baisse de plus de 50%.
Selon le quotidien libanais As-Safir, l’annonce par l’émir du Qatar de la transmission de son pouvoir à son fils Tamim ne serait pas due à une maladie quelconque, mais à une intervention de la Maison Blanche qui aurait « découvert » les agissements occultes de la micro-monarchie auprès des djihadistes en Syrie, ainsi que des transactions financières illégales.
Des appels ont été lancés sur les réseaux sociaux pour soutenir massivement l’ancien diplomate tunisien qui devra affronter une plainte minutieusement ficelée par l’un des plus grands cabinets franco-britanniques, pour diffamation et calomnie, devant la 17e chambre du Tribunal de Grande instance de Paris.
Quelques jours avant la tenue du procès, Mezri Haddad a déclaré à l’auteur de cet article que “Par-delà cette présentatrice voilée dans tous les sens du terme, je veux que ce procès soit celui de l’antisémitisme islamiste”.