Tribune
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Publié le 2 Octobre 2014

« Nous nous engageons ! »

Quelque 500 personnes se sont rassemblées mercredi 1er octobre 2014 à Lyon, à l'appel des principaux responsables religieux de la ville pour "un temps de fraternité et d'engagement" contre "la haine et le rejet de l'autre", rapporte le Figaro. Lors de cette manifestation, un texte intitulé « Nous nous engageons ! », signé déjà par une centaine de responsables religieux, du monde politique ou de la culture, dont le grand Rabbin de Lyon, Richard Wertenschlag, a été rendu public, selon Radio Vatican. Vous pouvez lire le texte « Nous nous engageons ! » ci-dessous.

Il servira de base aux travaux du quatrième Forum islamo-chrétien qui se tiendra à Lyon les 28, 29 et 30 novembre 2014. 

Il servira de base aux travaux du quatrième Forum islamo-chrétien qui se tiendra à Lyon les 28, 29 et 30 novembre 2014. 

Lyon, 1er octobre 2014, 110 personnalités s’engagent…

En décembre 2013, dans une « Lettre ouverte aux jeunes de France », les participants au 3ème Forum islamo-chrétien ont proposé qu’ensemble, hommes et femmes de toutes générations et de toutes cultures promeuvent une société de liberté, d’égalité et de fraternité, fondée sur la reconnaissance de la diversité, le respect mutuel et la justice.

Aux jeunes, ils ont lancé cet appel :

À vous, jeunes croyants en Dieu, nous disons : « Ne soyez pas naïfs ! Soyez vigilants !

Dans l’épreuve, restez en accord avec vos valeurs humaines et fidèles à votre foi ! Vous appuyant sur la fidélité de Dieu, soyez artisans de paix ! »

À vous, tous les jeunes, nous disons : « Soyez des citoyens responsables ! Exercez votre liberté de manière active et réfléchie ! Travaillez à tisser des liens dans le respect des valeurs qui fondent notre République. »

Près d’un an plus tard, en regardant les événements de l’année 2014, force est de constater que les foyers de tension et d’absolutisation n’ont cessé de croître et que les chemins pris par les jeunes de France ont été divers.

La paix a fait place à la guerre civile ou aux conflits entre les peuples dans des pays comme ceux de l’Afrique subsaharienne, comme l’Ukraine, la Birmanie, la Libye, Israël et Palestine, l’Irak et la Syrie. Nous venons même d’assister au Proche-Orient à l’entrée en guerre de la France au sein d’une coalition d’une quarantaine de pays.

Le terrorisme et l’instabilité ont progressé dans la zone sahélienne et dans l’Afrique subsaharienne, parfois même « au nom de Dieu » ! Ainsi, en Centrafrique, animosité et haine de l’autre ont remplacé l’entente entre Chrétiens et Musulmans.

Persécutions, arrestations, viols, exécutions sommaires, telles ont été les exactions commises par l’organisation « Daesh », à l’encontre des civils en Irak et en Syrie parmi les Musulmans chiites ou sunnites, les Chrétiens, les Yézidis, les Kurdes, les Turcomans, les humanitaires, les journalistes et les reporters. Plus près de nous, en Algérie, le 24 septembre dernier, a été assassiné notre compatriote Hervé Gourdel.

En France même, au regard des événements internationaux et sous l’emprise des clichés médiatiques, des personnes en sont venues à exprimer publiquement le rejet de l’autre.

Certains sont même parfois passés à l’acte.

Lors de récentes manifestations, on a entendu dans les rues de nos villes cette invective : « Mort aux Juifs ! » Des églises et des calvaires ont été profanés. Les actes islamophobes se sont multipliés et banalisés. Des tags sont apparus avec cette inscription : « Mort aux Musulmans ! »

Avec inquiétude, nous observons la montée de l’extrémisme, parfois même violent, chez des jeunes marginalisés, la dérive de quelques centaines de jeunes Musulmans de France, présents en Irak et en Syrie aux côtés des terroristes de « Daesh », et le désir d’autres d’aller les rejoindre dans les zones de combat.

Mais tout n’est pas ténèbres. Familles et services de l’État ont fini par mesurer la gravité de ces situations. Des actions significatives sont en cours pour interpeller les responsables de ces recrutements et empêcher jeunes filles et garçons de se rendre en ces endroits.

Des jeunes vivent leur citoyenneté de manière constructive, au sein d’associations et de mouvements, par exemple dans le scoutisme, les clubs sportifs ou l’association interreligieuse Coexister ! Ils témoignent de ce que le dialogue et l’interconnaissance sont aujourd’hui, plus que jamais, nécessaires pour désamorcer cette situation explosive qui pousse les gens à vivre dans la peur et la crainte et à trouver refuge dans les options les plus extrêmes.

Ce regard sur notre époque et sur la vie de nos contemporains doit nous interroger sur nos propres responsabilités.

Avons-nous été assez vigilants ?

Avons-nous été suffisamment des veilleurs, prêts à dénoncer et à lutter, avec d’autres, contre les injustices de nos sociétés ?

Avons-nous été en capacité à donner aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui du sens à leur vie, au sein de nos traditions religieuses ?

Avons-nous été profondément des croyants libres et engagés, habités du souffle de Dieu, prêts à témoigner de la fraternité des hommes et à agir pour elle, conformément à nos Écritures ?

Avons-nous été suffisamment des croyants miséricordieux pour aimer le bien et le vouloir sincèrement pour tous les humains, comme nous le demande notre Seigneur ?

Avons-nous suffisamment jeté de ponts entre nos différentes communautés, créé des espaces d’échange et de rencontre, et renforcé la dimension d’entre-connaissance?

Avons-nous vraiment veillé à apaiser les relations entre toutes les composantes de la nation ?

Reconnaissons humblement que les événements actuels ne sont pas que la faute des autres.

Par le silence ou l’indifférence des uns, la compromission des autres et les louvoiements en matière de stratégies politiques et d’idéologies religieuses, nous portons une part de responsabilité.

Aujourd’hui, avec force, à travers différents appels et déclarations, les principaux responsables des communautés juive, chrétienne et musulmane ont dénoncé les violences à l’égard des minorités et reconnu le droit à tous de pouvoir rester et vivre librement sur leurs terres, dans la dignité et la sécurité, et à pratiquer leur foi.

Mais il nous faut aller plus loin, à savoir nous engager ensemble, Juifs, Chrétiens et Musulmans, là où nous vivons, à œuvrer au quotidien pour être des artisans de paix et de justice, pour faire reculer l’extrémisme, la persécution et le mépris de l’autre.

Aussi :

Nous, diacres, évêques, imams, muftis, prédicateurs laïcs, pasteurs, prêtres, Rabbins, nous nous engageons à travers nos prédications à promouvoir le respect de l’autre croyant et à inviter nos fidèles à être des citoyens actifs pour contribuer à une société fraternelle et solidaire… Lire la suite et voir la liste complète des signataires.

Lyon, place Bellecour, le mercredi 1er octobre 2014

Cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon

Père Eklemandos, Eglise copte orthodoxe

Révérend Ben Harding, Église anglicane de Lyon

Père Garabed Harutyunyan, Eglise apostolique arménienne

Monsieur Kamel Kabtane, Recteur de la Grande MQosquée de Lyon

Père Nicolas Kakavelakis, Église orthodoxe grecque de Lyon

Monsieur Joël Rochat, Président du Consistoire du Grand Lyon de l’Église protestante unie de France

Monsieur Richard Wertenschlag, Grand Rabbin de Lyon