Le rapport montre la gravité de l’antisémitisme, un phénomène qui devrait être au centre du débat public.
L’atroce attentat du 19 mars 2012 a marqué la mémoire de l’année 2012. Il a généré un puissant mouvement d’empathie. Mais pas uniquement cela.
Il y eut la victimisation de l’assassin, la société vraie responsable… Nous risquons d’entendre cette ineptie le 6 mars, car France Télévision espère confronter les témoignages des familles de victimes avec celui de la mère et la soeur de l’assassin (dont le radicalisme et l’antisémitisme sont documentés) : conception particulière de la neutralité « Deux minutes pour Hitler, deux minutes pour les Juifs ».
Il y eut le retournement victimaire : les musulmans seraient les vraies victimes de l’attentat qui aurait entrainé une poussée d’islamophobie: un tour de passe-passe assimile l’islamophobie (critique de l’islam comme religion, acceptable dans notre société, comme la critique de toute religion) et l’antisémitisme, haine contre les Juifs en tant qu’individus, qui continuera de tuer si nous ne l’éradiquons pas. Il a été difficile de rappeler que le motif des assassinats de Montauban et Toulouse était la haine de la France et la haine des Juifs, et pas un « racisme » tous azimuts touchant aussi les musulmans (parce que plusieurs soldats étaient musulmans) et permettant d’évacuer la question de l’appartenance de Merah à l’Islam. Lorsque le « positivement correct » est en marche, l’amalgame pointe son nez…
Il y eut plus grave encore : le désir d’imitation. Le rapport du SPCJ est accablant : après les attentats de Toulouse, comme après celui de l’épicerie kasher de Sarcelles la fréquence des actes antisémites a explosé. Merah a fait sauter un verrou dans lequel la violence mimétique s’est engouffrée. N’était-il pas particulièrement admirable, cet assassinat d’enfants juifs où l’auteur au nom d’une cause glorieuse avait dépassé les oripeaux moraux d’un monde haï et méprisé ?
Certains minimisent sous le prétexte que l’antisémitisme n’est pas fréquent en France: bien sûr, Merah est très minoritaire, mais ses émules sont très dangereux. Certains englobent l’explosion des actes antisémites dans une augmentation globale du racisme. L’analyse des chiffres invalide cette opinion. Un juif repéré comme tel a probablement dans notre pays cinquante à cent fois plus de risques d’être agressé pour des causes de racisme que n’importe quel autre individu.
Il n’y a pas de conflit inter communautaire, mais certains portent une haine des Juifs qui autorise toutes les violences. Nous espérons que de plus en plus de gens le comprendront et réagiront sans complaisance ni circonlocutions. Nous savons que ce sera long et difficile. Mais c’est dans l’intérêt vital de notre pays.
Richard Prasquier
Président du CRIF