Allevai, plût au ciel, comme disait mon père. Ces exigences sont nécessaires, et leur formulation est bienvenue, mais au fond personne n’est dupe. Pour ceux qui l’auraient été, Ismaïl Haniye, d’habitude considéré comme la face « modérée » du Hamas, opposé au « dur » Khaled Mechaal, s’est chargé le jour anniversaire de la Neqba d’annoncer que le Hamas continuait d’appeler à la destruction d’Israël. La semaine précédente, il avait déjà douché quelques enthousiasmes prématurés en décrivant le défunt Ben Laden comme un combattant héroïque de l’Islam. Clairement le Hamas n’a aucune intention d’être « un partenaire pour la paix » ; il laissera l’Autorité Palestinienne se compromettre dans d’éventuelles négociations qu’il aura beau jeu de rejeter pour préserver la pureté de la doctrine et l’attrait facile de la dénonciation violente. Il faut savoir gré à M. Haniye de sa franchise, qui jette par contraste une lumière crue sur les couleuvres que certains optimistes risquent d’avaler.
L’espoir des diplomates est que l’Autorité Palestinienne renforce sa crédibilité, exploite ses réussites économiques, et remporte l’an prochain une victoire électorale qui mettrait le Hamas hors jeu ou l’obligerait à adopter une position modérée. Allevai encore…. Entre l’Autorité Palestinienne et le Hamas lequel va influencer l’autre ? Histoire classique de cette demoiselle qui vient s’offrir à un vieil écrivain prestigieux: « Maitre, faisons un enfant ensemble : il aura ma beauté et votre intelligence ». « Peut-être, répond le maître, mais quel drame si c’est le contraire ! ».
Les mois passés où Mahmoud Abbas a glorifié les auteurs d’attentats et lâché autour de lui la bride à un discours de négationnisme historique et parfois dans les prêches de haine à l’égard des Juifs, suscitent de ce point de vue bien des inquiétudes.
Les diplomates occidentaux étant gens courtois, ils n’ont pas eu l’indélicatesse de demander au Hamas d’abroger sa charte, dont l’article 7 préconise pour plus tard l’extermination des Juifs. On peut parier qu’une telle demande, considérée comme une atteinte à la liberté d’expression, aurait soulevé la colère de nos professionnels de l’indignation. Quant à Gilad Shalit, qui dans un mois terminera sa cinquième année d’isolement total, son sort est désormais logiquement de la responsabilité de l’Autorité Palestinienne. Il reste à voir les conséquences que celle-ci va tirer de cette abjecte prise d’otage, dont nos medias ne veulent pas rappeler qu’elle touche un de nos concitoyens.
En ce qui concerne les Nations Unies, reconnaître en septembre l’indépendance de la Palestine est une chose, mais c’en est une autre que de lui affecter des limites territoriales sans négociation bilatérale, en détournant les principes de la résolution 242 du Conseil de Sécurité. Et faire cela pour un gouvernement palestinien dont une grande partie prônerait ouvertement la destruction d’Israël, Etat membre de l’ONU, serait une forfaiture inédite. Il serait insupportable que les Etats européens, et la France en particulier, ne veuillent pas s’y opposer.
(Article publié dans Actualité Juive du 25 mai 2011)
Richard Prasquier
Président du CRIF
Photo : © 2011 Erez Lichtfeld