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Crédit photos : ©Fondation du camp des Milles
« J’ai été arrêté à La Réole et conduit à la caserne Sainte Marthe à Marseille […] C'est là que le médecin français a constaté que dans la file où on attendait pour le contrôle médical, certains étaient circoncis. Il nous a mis sur le côté et il a fait appel à la gendarmerie française qui nous a conduit au camp « Les Milles » […] En arrivant au camp des Milles, j'ai rencontré ma sœur Paula et son mari Léon Schweitzer qui ont été arrêtés dans une rafle sur la promenade des anglais à Nice, avant d'être envoyés au camp des Milles. On a été déportés vers Drancy dans le même wagon. […] chaque fois qu'il y avait 1 000 personnes au camp des Milles, on partait vers Drancy. […] On pensait aller dans un camp de travail, mais on ne savait pas où. Ce n'est qu'en étant dans le wagon et qu'on a vu des bébés et des grands-mères qu'on s'est dit que la destination n'était pas un camp de travail. »
Crédit photos : ©Fondation du camp des Milles
Ce témoignage lu par Alain Chouraqui, permit de faire découvrir le parcours, ignoré jusqu’ici, d’Abram Ajchenholc, survivant déporté du camp des Milles, aujourd’hui âgé de 100 ans. Le Président de la Fondation du camp des Milles souligna que ce destin, comme des millions d’autres à cette époque, illustrait les anti valeurs de l’autoritarisme, de l’inégalité et de l’exclusion mais aussi la nécessité de la force morale et de l’engagement pour les valeurs républicaines qui furent au cœur des cérémonies du 14 juillet.
En ce 16 juillet, devant le Wagon du Souvenir des Milles, sous un soleil de plomb malgré l’heure exceptionnelle de 19h30 pour éviter les fortes chaleurs, le temps était en effet au recueillement, à la transmission et à l’espoir. La Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et en hommage aux Justes de France faisait l’objet d’une cérémonie organisée comme chaque année au Wagon du Souvenir des Milles, lieu témoin des rafles de la zone non occupée sous l’autorité de Pétain, et d’où furent déportées près de 2 000 hommes femmes et enfants juifs. Il s’agissait de se souvenir de l’horreur, mais aussi de rappeler que des hommes et des femmes ont su résister et agir de mille manières pour sauver de nombreuses vies.
Étaient rassemblés des représentants de l’État, des parlementaires et autres élus, les responsables des associations patriotiques, représentants des armées et des cultes, représentants d’associations anti racistes tel Mario Stasi, Président national de la LICRA, et de simples citoyens. À leurs côtés, des jeunes du Service National Universel ainsi que des membres du Conseil de la Vie Étudiante d'Aix-en-Provence confirment le souhait du Site-Mémorial d’associer aux cérémonies les générations actuelles, afin de transmettre l’histoire mais aussi ses enseignements pour aujourd’hui et pour demain.
Dan Amiach, Président de la Communauté juive d’Aix-en-Provence, après avoir évoqué les moments tragiques des rafles, souligna : « Nous sommes horrifiés en constatant dans des manifestations que l’on peut encore crier « Mort aux juifs ! » Et c’est à nous tous aujourd’hui de faire en sorte que cet antisémitisme décroisse. C’est à nous tous de faire en sorte d’essayer de lutter et la Fondation du Camp des Milles est justement là pour ça. […] Nous devons toujours rester vigilants, et cette vigilance est […] le devoir de toute notre société, de tout être humain, en France ou ailleurs pour faire en sorte que plus jamais, plus jamais cela ne se reproduise. »
Crédit photos : ©Fondation du camp des Milles
Bruno Cassette, sous-Préfet de l'arrondissement d'Aix-en-Provence fit lecture du message de Patricia Mirallès, Secrétaire d'État auprès du ministre des Armées, chargée des Anciens combattants et de la Mémoire : « Il est de notre devoir de revenir chaque année. D’abord pour prendre la mesure de l’horreur qu’a constitué la Shoah et la collaboration française. Pour prendre acte, aussi, de l’échec du projet nazi – la disparition des Juifs d’Europe – et de celui de l’État français – la destruction de nos valeurs républicaines. Mais le combat contre l’idéologie qui a sous-tendu ces crimes ou a voulu les occulter n’est jamais fini. […] Face au mal de l’antisémitisme qui ne doit jamais prospérer par impunité ou par inaction il faut une mobilisation collective. […] Cette mobilisation est une lutte pour la transmission, l’histoire, l’éducation et l’École ».
Auparavant les noms retrouvés de la centaine d’enfants déportés du camp des Milles vers Auschwitz avaient été lus par Hanna, 21 ans, un à un, avec leur âge, dans un silence empli d’émotion. Et après avoir entendu la chanson de Jean-Jacques Goldmann Comme toi : « Elle s’appelait Sarah, et elle n’avait pas 8 ans, C’était une petite fille sans histoire et très sage. Mais elle n’est pas née comme toi, ici et maintenant… »
… Moïse Altmann, 13 ans... Werner Goldschmidt, 17 ans, Helga Hirsch, 4 ans… Jan Kraus, 1 an. »
Comment ne pas penser à ces enfants privés d’avenir, à notre monde privé de leurs talents, à toutes ces vies piétinées et interrompues trop tôt, à ces familles anéanties ?
Mais l’esprit de résistance eut aussi un écho lorsque Serge Coen, Délégué régional du Comité Français pour Yad Vashem puis Charlotte, jeune en Service National Universel, firent la lecture des noms des 18 « Justes parmi les nations » ayant œuvré auprès des internés et déportés du camp des Milles. Ils font partie de ceux qui ont su résister courageusement à un régime intolérant et violent au nom des valeurs de justice, de fraternité et d’humanité.
Aujourd’hui, alors que nos valeurs républicaines et notre démocratie sont à nouveau menacées par des extrémismes identitaires, ces femmes et ces hommes sont un exemple pour tous.
Après la cérémonie des dépôts de gerbes et la Sonnerie « Aux morts », la Marseillaise fut entonnée par tous, clôturant ce temps de recueillement et d’hommage. Des gerbes ont été déposées par Alain Chouraqui, Président de la Fondation du Camp des Milles-Mémoire et Éducation, Mario Stasi, Président national de la LICRA, les porte-drapeaux lors de la cérémonie et Dan Amiach, Président de la communauté juive d'Aix-en-Provence.
Cette commémoration avait été précédée par la projection du film documentaire Les Enfants du 209, Rue Saint-Maur, Paris Xe de Ruth Zylberman, une enquête historique bouleversante sur les traces mémorielles de l'Occupation.
Crédit photos : ©Fondation du camp des Milles
En parallèle de ce temps mémoriel, la Fondation propose au grand public de découvrir l’exposition de l'artiste et historien Thomas Duranteau « Des miettes et des étoiles », qui nous livre un carnet de voyage mémoriel étonnant. Accessible jusqu’au 31 octobre 2023 - Entrée libre. Plus d’informations, rendez-vous sur le site du camp des Milles, en cliquant ici. Des ateliers et visites spécifiques pour enfants et adolescents sont également prévus tout au long de la saison estivale.
Contacts Presse :
Claudie Fouache : claudie.fouache@campdesmilles.org – 06 67 90 03 60
Odile Boyer : odile.boyer@campdesmilles.org – 06 13 24 24 25