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Illustration : Conte d’un Gnoun d’Elie Wiesel, traduit de l’anglais (États-Unis) par Carine Chichereau, illustrations de Mark Podwal, Seuil, 60 p., 15 €. Seuil
Publié le 5 janvier dans Le Figaro
En 1943, Elie Wiesel a 15 ans quand il est déporté à Auschwitz. Sa mère et sa sœur sont gazées, son père meurt à Buchenwald. Il faudra plus d’une décennie au rescapé de la Shoah pour publier sur l’innommable, notamment dans son livre La Nuit (1958), ouvrage capital de la littérature concentrationnaire, préfacé par Mauriac, qui écrivait: «Ce témoignage, qui vient après tant d’autres et qui décrit une abomination dont nous pourrions croire que plus rien ne nous demeure inconnu, est cependant différent, singulier, unique… L’enfant qui nous raconte ici son histoire était un élu de Dieu.»
Défenseur des droits de l’homme, Prix Nobel de la paix, Elie Wiesel s’est éteint en 2016. Cinq ans après sa mort, le Seuil publie un de ses textes inédits. C’est son fils, Elisha Wiesel, qui raconte en postface l’histoire de cette découverte: «C’est un poème narratif écrit par mon père à la fin des années 1970, dont je ne connaissais pas l’existence. C’est un libraire de Jérusalem, Mechael Pomeranz, qui m’en a parlé. Il l’avait découvert dans un recueil épuisé, publié en 1978.»
Espoir et mémoire
Conte d’un nigoun, recueil d’une quarantaine de pages illustrées par Mark Podwal, s’ouvre sur un ghetto, «quelque part vers l’Est, durant le règne de la nuit». Dans un ciel de Bible et de cantiques, un rabbin s’éplore. L’ennemi exige dix Juifs, qu’il doit choisir et lui remettre au risque, sinon, que toute sa communauté soit exécutée. Voilà l’homme acculé devant ce choix de Sophie. Que faire?
Le rabbin consulte des sages, législateurs et mystiques, mais la nuit est décidément muette. Se peut-il que ce silence soit une réponse? Dans ce poème, inspiré d’événements réels en Europe de l’Est, Wiesel donne une voix à tout un peuple. «Nous devons être les poètes de notre mort», écrivait Blanchot. Ici, le rabbin devient l’incarnation d’un message d’espoir et de mémoire. Elisha Wiesel l’écrit avec ses mots: «Il n’existe pas une seule manière pour les Juifs d’être des héros.»
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