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ANTISÉMITISME - Je tiens à souligner que la coïncidence entre la sortie de mon livre et l'actualité n'est qu'un triste hasard du calendrier. Mon éditeur avait prévu une date de parution il y a plusieurs mois déjà, et nous avons achevé l'ouvrage en novembre 2014, soit deux mois avant les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher.
Il y a un peu plus d'un an, une bande d'abrutis criait "Juif casse-toi, la France n'est pas à toi" pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale dans les rues de Paris. Voir des musulmans se joindre à des néonazis pour défiler main dans la main en scandant les mêmes slogans fut pour nous un choc, qui a rapidement laissé place à la consternation, puis disons-le, à la peur. Car dès le lendemain, la France se réveillait et continuait de vivre sa vie comme si de rien n'était, comme si tout cela n'avait pas eu lieu, laissant une partie de sa population, les juifs, avec un sentiment d'abandon.
Ce jour-là, j'ai ressenti le besoin de prendre mon stylo pour m'exprimer et faire part publiquement de mon ras-le-bol à qui voulait l'entendre. Car c'est depuis ce jour, que le vase a débordé, que j'en ai marre. Il ne s'agissait pas de pousser un coup de gueule simplement pour soulager une frustration, mais pour montrer à quel point tout ce qui se passe aujourd'hui en France n'est que le résultat d'une politique étrangère menée depuis le début des années 2000, du traitement clairement unilatéral du conflit israélo-palestinien par les médias, en passant par le déni face à une menace islamiste de plus en plus pressante.
J'ai donc écrit une première lettre que j'ai volontairement postée sur un site lu par des gens de tout bord, pensant que les commentaires qui suivraient, seraient le reflet d'une certaine opinion générale. Mais j'étais loin d'imaginer que j'allais en recevoir autant, aussi rapidement, et que mes mots allaient susciter autant de ressentiments de la part de la grande majorité des lecteurs. Quand on voit à quel point il est aujourd'hui difficile pour certains de nos dirigeants d'affirmer que nous sommes en guerre, quand on voit les pincettes qu'ils doivent prendre chaque fois qu'ils s'expriment pour parler de terrorisme, on peut facilement imaginer comment les cris d'alarme d'un juif anonyme appelant un chat un chat sur la toile furent accueillis il y a un an. Je me souviens avoir éprouvé des regrets, m'être demandé pourquoi j'avais fait l'erreur de m'exposer ainsi, de me transformer en cible. Qu'est-ce que je croyais? Que j'allais changer les mentalités juste en rétablissant certaines vérités historiques? Quel naïf. Après cette expérience j'ai pris la décision de ne plus m'exprimer. Et puis il y a eu la guerre, en juillet à Gaza.
J'étais en Israël durant tout le mois de juillet, et comme tous les Israéliens, j'ai subi les alertes aux roquettes à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. Mais j'ai été beaucoup plus choqué par le traitement du conflit par les médias français, que par l'enfer que nous faisait vivre le Hamas au quotidien. J'en ai voulu à tous ces gens qui se disent journalistes, et qui, pour faire de l'audience, jouaient le jeu du Hamas sans se soucier des conséquences qu'auraient leurs articles ou reportages mensongers. J'en ai voulu aussi aux politiciens qui condamnaient aveuglément Israël, sans tenir compte des données de la région, ou en appliquant un double standard. J'en ai eu la nausée. Puis, Paris a connu sa petite "Intifada", au cours de laquelle on a -une fois de plus- pu tout voir et tout entendre. Il me semble que cela a même failli virer plusieurs fois aux pogroms. Qui fait le lien aujourd'hui entre les drapeaux d'ISIS, du Hamas et du Hezbollah, défilant tranquillement dans les rues de Paris en juillet, avec les attentats du mois de janvier? Pour la communauté juive, ces manifestations furent un ultime signal d'alarme. Car pas plus tard que cet été, nous semblions être les seuls à savoir que quelque chose de terrible allait se passer sous peu en France. Et nous nous sommes encore sentis abandonnés.
C'est donc alimenté non pas par la rancœur mais par la tristesse que j'ai ressenti le besoin d'écrire ce livre. Il se trouve que nous avons été rejoints par l'actualité, et que mes mots résonnent plus fort aujourd'hui. Il se trouve que l'antisémitisme fait la une de tous les journaux comme un phénomène qui vient juste de débarquer. Cela ne veut pas dire pour autant que demain nous réserve des jours meilleurs. Et si rien de ce qui est écrit dans mon livre ne change, si les mesures qui semblent être prises par notre gouvernement aujourd'hui ne sont pas suivies de sanctions effectives et immédiates, si les mentalités restent les mêmes, si le climat reste aussi pesant, j'ai bien peur que le pire soit devant nous et que le départ des juifs de France se transforme en véritable exode.
http://www.huffingtonpost.fr/david-b/antisemitisme-terrorisme-francais-j...