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Y aura-t-il une attaque d'Israël contre l'Iran ?
La décision n'a pas encore été prise. Toutes les options sont sur la table. Tout est pris en considération très prudemment. Bien sûr, il faut laisser la chance à la diplomatie et aux sanctions. Mais nous ne pouvons pas prendre le risque d'un conflit dans les conditions où l'Iran aurait la bombe atomique. La communauté internationale n'intervient pas en Syrie par crainte des répercussions sur la région et de la réaction de l'Iran. Que se passerait-il si l'Iran avait la bombe nucléaire ?
Pourquoi aujourd'hui ?
La tension monte depuis plusieurs années déjà. Il est devenu indéniablement clair que l'Iran poursuit un programme nucléaire à des fins militaires. Tout un processus international a été mis en place pour faire en sorte que l'Iran y renonce. Mais il y a un moment où cela ne peut pas durer à l'infini. Ceux qui disent qu'une fois en possession de la bombe atomique, l'Iran n'attaquerait pas forcément et entrerait dans la logique de la dissuasion, comme l'Inde et le Pakistan, ou les Etats-Unis et l'URSS pendant la guerre froide, ont tort. L'Iran ne suit pas le même ordre d'idée. Ce pays a introduit la logique de l'attentat suicide. Peut-on laisser la bombe atomique à ceux qui sont prêts à se tuer pour tuer leurs ennemis ? Surtout, il y a une différence d'échelle importante entre l'Iran et Israël. Les Etats-Unis ou l'URSS auraient pu se relever si jamais l'un avait attaqué l'autre. L'Iran est un grand pays et nous sommes si petits. Si l'Iran décide d'utiliser sa bombe contre nous, nous disparaîtrons.
Les Israéliens ne veulent pas de cette guerre. Le Premier ministre Benyamin Netanyahou et son ministre de la défense Ehoud Barak, les deux promoteurs d'une attaque, pourraient-ils passer outre ?
La question n'est pas de plaire aux Israéliens. Il s'agit de prendre une décision dont l'importance stratégique est très lourde. Les enjeux stratégiques sont trop importants pour suivre la courbe de l'opinion.
Mais n'y a-t-il pas une crise de confiance vis-à-vis de Benyamin Netanyahou, qui tente sans succès depuis des mois de convaincre les Israéliens de la nécessité d'une attaque ?
Il y a un débat public extraordinaire. Le fait que des questions stratégiques soient ainsi débattues dans l'agora doit susciter l'admiration. Mais les Israéliens ne savent pas tout. Certaines informations provenant des renseignements ne sont pas à leur connaissance. Ceux qui en sont en possession ont d'ailleurs eux-mêmes une analyse différente de la situation.
Vous faites référence au fait que la possibilité d'une attaque divise jusqu'au sommet de l'Etat...
Il y a de grandes divergences, oui. Mais entendons-nous bien : personne ne doute que l'Iran soit un élément dangereux et déstabilisateur, ni que le pays ait l'intention d'accéder à la bombe nucléaire. Les désaccords portent sur la méthode : comment faire pour que les Iraniens n'y parviennent pas.
Une attaque menée uniquement par Israël est-elle envisageable ?
Il faut mesurer tous les facteurs en jeu. Si l'Iran atteint un point de non-retour, il faudra que nous prenions une décision.
Le rabbin Ovadia Yossef, le leader spirituel du Shas (le parti ultra-orthodoxe qui fait partie de la coalition gouvernementale) a semblé dans son prêche de samedi dernier donner son accord à une attaque... A-t-il eu une influence sur les membres du gouvernement réfractaires ?
Le prêche est ambivalent. Certains passages laissent au contraire penser qu'il est contre. De toute façon, le rabbin Ovadia Yossef a un poids spirituel, mais ce n'est pas lui qui donne l'ordre d'attaquer.
Brandir la menace de l'attaque, est-ce une façon pour Netanyahou de mettre la pression sur l'administration américaine pour obtenir de Barack Obama, encore favori dans les sondages, un renforcement des sanctions contre l'Iran, à quelques mois des élections américaines?
Nous ne faisons pas d'hypothèse sur le résultat des élections américaines. Il y a entre nos deux pays une amitié très forte soutenue par un véritable mouvement populaire qui perdurera quel que soit le résultat du scrutin.
Est-ce un moyen de détourner l'attention des Israéliens des problèmes économiques du pays ?
S'il y avait la moindre intention de détourner l'attention des Israéliens de quoi que ce soit, nos journalistes, qui ne font aucun cadeau aux hommes politiques, l'auraient déjà pointée. Nous vivons avec la menace iranienne depuis des années. C'est une question au coeur des préoccupations des Israéliens.