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Publié le 30 Octobre 2015

Le Pape déclare: «Nier le droit d'exister d'Israel, c'est de l'antisémitisme»

"Aucune religion n’est à l’abri du risque de déviations fondamentalistes, mais il convient de regarder les valeurs positives que celles-ci vivent et proposent"

Par Michel Danthe, publié dans le Temps le 30 octobre 2015

"Il y a peut-être des désaccords politiques entre les gouvernements sur des enjeux politiques, mais l’État d’Israël a tous les droits d’exister en sécurité et en prospérité"

Mercredi 28 septembre, le Pape François célébrait en grande pompe et dans une cérémonie que l’on qualifiera de très colorée les 50 ans de «Nostra Aetate.» Les retombées des déclarations papales ont été très reprises par les sites juifs.

 
Si l’on s’autorise à qualifier la cérémonie de colorée, c’est qu’on a lu le site de Radio Vatican qui écrit: «Dans la grande salle de l’Université pontificale Grégorienne, pleine à craquer, les voiles islamiques côtoient les habits monastiques des religieuses chrétiennes, l’orange safran des bonzes bouddhistes se mêle aux turbans noirs des sikhs et aux kippas des juifs. Réunis sous le signe du dialogue interreligieux, les participants, chrétiens, musulmans, hindous, jaïnistes. Ils sont tellement nombreux que certains ont dû se résigner à suivre l’événement sur des écrans installés dans une salle attenante».
 
Un texte novateur adopté avec difficulté
 
Quant à «Nostra Aetate», c’est ce document que plus de 2000 cardinaux, évêques et patriarches du monde entier adoptèrent à l’issue du Concile Vatican II, en 1965 et qui signait à l’époque un nouveau départ du dialogue interreligieux. Il y était question, en des termes pour l’époque complètement inédit des relations de l’Eglise – catholique s’entend – avec les religions non chrétiennes. Comprenez par là les juifs, les musulmans, les bouddhistes, les hindous et d’autres encore.
 
Le texte marqua les esprits et son adoption, à l’époque, n’alla pas sans mal, comme le rappelle Romilda Ferrauto, de Radio Vatican: «A l’écoute d’un monde en pleine mutation, le Concile Vatican II avait reconnu, pour la première fois dans l’histoire, que des éléments de vérité et de grâce pouvaient être présents dans les autres religions. Cette déclaration a d’ailleurs failli être retirée de l’agenda et son adoption, présentée comme un acte de courage, ne fut pas facile.»
 
Imaginez donc, à l’époque, considérer que le genre humain devient de plus en plus uni; que les sagesses orientales, même si elles ne confessent pas Christ sont dignes de reconnaissance; que l’Islam dans son adoration d’un dieu unique est estimable par cela même; et que le judaïsme constitue les prémices du salut chrétien; et qu’enfin l’antisémitsme est à réprouver le plus fermement… Tout cela, oui, il fallait le dire et l’Eglise eut le courage de le dire.
 
En nos temps de fondamentalisme et d’extrémisme
 
Depuis, la mondialisation a avancé à grand pas, confirmant l’intuition de l’Eglise. Depuis aussi, bien des passions se sont exacerbées, bien des extrémismes religieux et des fondamentalismes ont crispé le dialogue interreligieux, comme l’a rappelé le pape. Citation: «A cause de la violence et du terrorisme, une attitude de suspicion et même de condamnation des religions s’est propagée […] aucune religion n’est à l’abri du risque de déviations fondamentalistes […], mais il convient de regarder les valeurs positives que celles-ci vivent et proposent.»
 
C’est dire si la célébration de cette semaine constituait un marqueur: du multipack de 1965, sur quel segment le pape François allait-il plus particulièrement insister? La Croix nous livre sa réponse: la redécouverte des racines juives. Citation… «C’est sur cette relation que le pape a choisi d’insister tout particulièrement, saluant en la déclaration Nostra Aetate un texte ayant mis fin à des siècles d’inimitié. Avec les juifs, «indifférence et opposition se sont muées en collaboration et bienveillance; d’ennemis et étrangers, nous sommes devenus amis et frères». Selon le pape, ce texte novateur, fruit des travaux du Concile Vatican II, a dit clairement «oui à la redécouverte des racines juives du christianisme et non à toute forme d’antisémitisme».
 
Marie Malzac rappelle aussi les déclarations du rabbin David Rosen qui s’est félicité du retournement historique de 1965 mais qui note qu’en raison de résistances internes au Concile d’alors, «cette révolution n’a pu aboutir qu’en y incluant la relation avec toutes les autres religions, ce qui constitue une bénédiction exceptionnelle.» C’est le rabbin que l’on cite.
 
L’anti-sionisme, de l’antisémitisme
 
Pour la Croix, donc, l’accent du pape allait du côté des juifs. Et ce ne sont pas des médias comme The Times of Israel qui viendra contredire La Croix. Il passe même la vitesse supérieure en se faisant écho de l’audience que le pape François a accordée au Congrès juif mondial: The Times of Israel place même en titre cette citation de François: «Attaquer des juifs c’est de l’antisémitisme, mais une attaque contre l’État d’Israël est aussi de l’antisémitisme.» A Ronald S. Lauder, le président du Congrès juif mondial, le pape déclare: «Attaquer des juifs c’est de l’antisémitisme, mais une attaque contre l’État d’Israël est aussi de l’antisémitisme. Il y a peut-être des désaccords politiques entre les gouvernements sur des enjeux politiques, mais l’État d’Israël a tous les droits d’exister en sécurité et en prospérité.» Ronald Lauder était aux anges, comme le note The Times of Israel: «Pape François ne fait pas seulement des déclarations. Il inspire les gens avec sa chaleur et sa compassion. Il est un soutien clair et non-équivoque pour le peuple juif ce qui est déterminant pour nous»... Lire l'intégralité.