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Publié le 13 Janvier 2016

CRIF Alsace : salle comble pour sa soirée du 7 janvier 2016

Le CRIF Alsace a organisé le 7 janvier à la Librairie Kléber, une soirée de débats et d'échanges.

Après les actes terroristes à Paris et pour marquer le 1er anniversaire des attentats de janvier 2015 à Paris à la rédaction de Charlie Hebdo et à l’Hyper Cacher, Pierre Lévy, Président du CRIF Alsace a tenu à rendre hommage aux victimes de ces actes abjects, ainsi qu'à celles assassinées le 13 novembre 2015. Le CRIF Alsace a organisé le 7 janvier à la Librairie Kléber, une soirée de débats et d'échanges sur le thème : « Quelles sont les conséquences au sein de notre société  des attentats de 2015 en France ? Un an après la 1ère tuerie,  comment ces massacres ont-ils impacté la perception et la réflexion des Français ? » Dominique Jung – Directeur de la rédaction des DNA – a animé le débat.
 
En abordant la question des changements consécutifs aux attentats, Pierre Lévy a relevé celui dans l'organisation de telles réunions dans la mesure où un car de CRS était positionné à l'entrée de la salle. Dominique Jung a proposé aux intervenants de faire part de leur ressenti.
 
Richard Kleinschmager, Professeur émérite, Médiateur de l’Université de Strasbourg, a indiqué qu'il n'aurait jamais imaginé que la France puisse être attaquée sur son sol. Une des grandes questions qui se pose à nous est de savoir où placer le curseur entre la liberté et la sécurité. Classant leurs priorités, les Français reconnaissent à présent que le patriotisme est une valeur à défendre.
 
Eric Elkouby, député suppléant, adjoint au maire et conseiller départemental représentant Armand Jung, a affirmé que « la barbarie nous glace ». Ces attentats ont marqué un tournant pour la France : ils ont révélé une volonté de porter atteinte à toutes nos libertés et en particulier à la liberté d'expression, d'ébranler la fraternité. « Oui, on est en état de guerre quand on s'en prend aux fondements de la République ».
 
André Reichardt, sénateur du Bas-Rhin, qui a co-présidé la commission d'enquête sénatoriale sur le djihadisme,s'est élevé contre l'affirmation consistant à affirmé que la France a subi un traumatisme qui allait passé. « Non, il n'est pas passé, il est devenu une résignation inquiète » contre laquelle il faut lutter, estimant que c'est le devoir du gouvernement. Il faut des mesures simples, selon lui : « Schengen n'a pas marché, il faut l'arrêter ».
 
Salomon Lévy, Président de la Synagogue de la Paix, a rappelé que tout citoyen doit respecter les droits de l'homme, la laïcité. Le dialogue interreligieux, et notamment tel qu'il est pratiqué en Alsace, est déterminant, associant toutes les religions, pour une qualité de vivre ensemble, mais « on ne gagnera pas sans les Musulmans ».
Mohamed Latahy, ancien président de CRCM et ancien Président de la Grande Mosquée de Strasbourg, a précisé que les attentats sont condamnés religieusement par l'islam car « l'être humain est un édifice de Dieu et celui qui détruit cet édifice est maudit ». Il a décrypté la volonté des terroristes qui est de provoquer le racisme, faire monter l'extrême droite et prouver que la démocratie est instable. Mais citant Jens Stoltenberg, premier ministre norvégien durant le massacre d’Utoya par Breivik, M. Latahy a affirmé « qu'il faut répondre à la barbarie par la démocratie ». Il a aussi valorisé la qualité du dialogue inter religieux : «  Nous sommes tous menacés par le terrorisme, il faut lutter contre la peur, contre la méfiance ».
 
Jacob Rogozinski, philosophe et professeur d’université, a relevé ce qui est nouveau dans ces attentats «  on a affaire à des jeunes Français qui se retournent contre leur propre pays ». Le danger de la sidération c'est qu'elle empêche de comprendre – mais « comprendre n'est pas excuser ». M. Rogozinski soulève la question de savoir comment peut se comprendre le passage à l'acte de ces jeunes, qui ne sont pas que des musulmans mais aussi des convertis récents qui n'ont pas adhéré à une religion, mais à l'islamisme.
Comment un tel dispositif peut les attirer ? Si on peut admettre qu'un sentiment de colère soit légitime, envers ce que M. Rogozinski a qualifié d' « appartheid social », la basculement vers la haine – une volonté d'anéantissement, de destruction est incompréhensible. « Une réponse sécuritaire sera toujours insuffisante, il faut s'attaquer aux causes de la souffrance sociale et c'est le rôle des politiques ». La salle particulièrement attentive a réagi en posant de nombreuses questions. Retenant celle sur « faut-il d'avantage de laïcité ? », M.Rogozinski, parisien d'origine qui a découvert la « laïcité concordataire » en Alsace précise que dans concordat il y a le mot « concorde », et s'est interrogé sur l'opportunité d'étendre ce régime à toute la France et à la 2ème religion de France qu'est l'Islam ?
 
Interrogeant les politiques, Dominique Jung leur a demandé quelles mesures concrètes ils préconisaient.
 
André Reichardt : « Le nombre de djihadistes français a explosé depuis un an et demi passant de 1200 personnes à plus de 7000, il faut renforcer le renseignement ».
Eric Elkouby : « Plus de République et d’éducation pour les jeunes mais aussi créer des centres de formation des imams en France ».
Richard Kleinschmager conclu en rappelant la corollaire de cette peur au sein de la société française qu’est l’explosion du vote FN depuis 10 ans.
Cette manifestation s'est déroulée en présence de près de 150 personnes de toutes origines sociales et culturelles, attentives et participatives.
 
Guy Borg
Photos CRIF Alsace - Claude Truong Ngoc