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Publié le 25 Septembre 2020

Attentat de la rue des Rosiers - La Norvège examine la demande française d’extradition d’un suspect

Arrêté le 9 septembre dans le pays nordique où il vit depuis 1991, Walid Abdulrahman Abou Zayed est suspecté d’être l’un des auteurs de l’attentat de la rue des Rosiers, qui avait fait 6 morts et 22 blessés à Paris en 1982.

"Cette nouvelle d'examen de la demande d'extradition va dans le bon sens" déclare le Président du Crif. "Je pense d'abord aux familles des victimes qui, près de quarante ans après l'attentat, vont peut-être enfin pouvoir voir les terroristes entendus et jugés" précise Francis Kalifat.

Le Président du Crif rappelle aussi l'implication de longue date du Crif pour l'extradition du suspect refugié en Norvège et pour que justice soit faite. 

En 2018, dans son discours prononcé à l'occasion du Dîner du Crif, Francis Kalifat avait interpellé le Président de la République Emmanuel Macron au sujet de la lenteur de la justice dans cette affaire et s'était enquérit de la possible extradition des quatre présumés terroristes réfugiés en Jordanie, à Ramallah, et en Norvège.

Lors de ses différentes rencontres avec le Ministre des Affaires étrangères, le Président du Crif n'a cessé de rappeler l'imporance de ces extraditions. A son initiative, les victimes et familles de victimes avaient été reçues au Ministère et avaient pu exprimer leur peine et leur incompréhension.

En mars 2019, Francis Kalifat avait été reçu par S.E. Madame l’Ambassadeur de Norvège, Oda Helen Sletnes, et lui avait exprimé la nécessité de justice et la vive émotion des familles des victimes de l'attentat. 

Il y a quelques jours, à l'occasion de son entretien avec le Premier Ministre, Francis Kalifat a exprimé sa satisfaction quant à l'arrestation en Norvège du principal suspect de l'attentat de la Rue des Rosiers. Il a demandé à Jean Castex une pression forte de la France pour l'extradition de ce terroriste, ainsi que pour les terroristes réfugiés en Jordanie et à Ramallah. Francis Kalifat a demandé qu'ils puissent au moins être arrêtés et entendus par un juge français qui pourrait être dépêché sur place.

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Publié le 25 septembre 2020 dans Le Monde

La justice norvégienne examine, vendredi 25 septembre, la demande française d’extradition d’un homme d’origine palestinienne, suspecté d’être l’un des auteurs de l’attentat de la rue des Rosiers, qui avait fait six morts à Paris en 1982.

Arrêté le 9 septembre dans le pays nordique où il vit depuis 1991, Walid Abdulrahman Abou Zayed, 61 ans, a plaidé son innocence lors d’une audience qui avait abouti à son placement en détention provisoire pour quatre semaines. « Je n’accepte pas une extradition, car je ne fais pas confiance au gouvernement français », avait-il déclaré au tribunal d’Oslo.

Le même tribunal doit maintenant se prononcer sur la demande d’extradition déposée par la France, une décision attendue assez rapidement mais susceptible d’appel. Par décision d’un juge, les médias ont interdiction de rendre public le contenu des débats qui doivent commencer à 10 heures.

Une précédente demande en 2015

Le 9 août 1982, un commando de trois à cinq hommes avait lancé une grenade dans le restaurant Jo Goldenberg dans le « Pletzl », quartier juif historique de Paris, puis ouvert le feu dans l’établissement et contre des passants. L’attaque avait aussi fait 22 blessés.

Vu le mode opératoire et les renseignements dont disposait la France, l’opération avait rapidement été attribuée au Fatah-Conseil révolutionnaire (Fatah-CR) d’Abou Nidal, groupe palestinien dissident de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).

La justice française soupçonne Abou Zayed, naturalisé norvégien en 1997, d’avoir été « l’un des tireurs de l’attentat ». La Norvège n’avait pas donné suite à une précédente demande de Paris en 2015 car elle n’extradait alors pas ses ressortissants. Mais l’entrée en vigueur l’an dernier d’un accord avec l’Union européenne et l’Islande lui en offre désormais la possibilité.

Selon la loi norvégienne, une décision d’extradition juridiquement contraignante doit « si possible » intervenir 45 jours au plus tard après une arrestation.

L’attente des familles

Les familles des victimes, qui espèrent un procès depuis près de quatre décennies, ont placé beaucoup d’espoir dans une éventuelle extradition. « C’est très important au niveau du symbole, surtout au vu de l’actualité judiciaire française avec le procès des attentats de janvier 2015, qu’une personne mise en cause soit mise en face de ses responsabilités », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) David Père, avocat de l’Association française des victimes du terrorisme (AFVT).

« J’attends que cette extradition ait lieu », a pour sa part réagi Romain Boulet, avocat de proches de victimes. « Nous sommes très impatients d’avoir les explications de ce monsieur et très curieux de ce qu’il aura à nous dire, en espérant que cette extradition peut débloquer les situations en Jordanie et à Ramallah. »

La justice française a en effet émis quatre mandats d’arrêt internationaux visant Abou Zayed, deux individus localisés en Jordanie et un autre en Cisjordanie, tous suspectés d’avoir été impliqués dans la préparation ou la perpétration de l’attaque. La Jordanie a refusé à plusieurs reprises d’extrader les deux suspects présents sur son territoire, dont le cerveau présumé de l’attentat.

Un éventuel accord secret

L’affaire est d’autant plus sensible qu’un éventuel accord secret passé en 1984 entre les renseignements français et le groupe Abou Nidal est régulièrement évoqué. En échange de la « promesse » française d’une libération, effective en février 1986, de deux prisonniers condamnés pour assassinat, le groupe se serait engagé à « considérer [la France] comme un sanctuaire », révèle un document des archives officielles françaises d’octobre 1985 récemment versé au dossier et dont l’AFP a eu connaissance.

Ces dernières années, Yves Bonnet, patron du contre-espionnage français entre novembre 1982 et 1985, avait expliqué à plusieurs reprises, y compris devant les magistrats-enquêteurs, que cet accord prévoyait en outre la « possibilité offerte aux membres de l’organisation [Abou Nidal] de venir en France, sans risque » judiciaire. Les éléments dont l’AFP a eu connaissance dans les archives officielles ne font pas état de cette promesse-là.

Source : Le Monde