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1940, l’exil pour la vie
Archives départementales de la Gironde
En présence d’Albert Massiah, Président du Crif Bordeaux Aquitaine, participaient également les présidents des autres associations (Consistoire de Bordeaux, Bnai’Brith, Centre Yavné, Entretiens de Bordeaux-Cercle Primo Levi). Manuel Dias Vaz, président du Comité Sousa Mendes, en fut le guide éclairé.
Structurée en douze séquences, l’exposition est constituée de documents d’archives, manuscrits et dactylographiés, imprimés, affiches, journaux, etc. De nombreuses photos tempèrent la sécheresse de ces pièces officielles dont elles révèlent la part d’humanité.
Le parcours débute par la contextualisation de l’action du consul portugais. En 1938, dès l’installation du régime nazi du Troisième Reich, de nombreux réfugiés sont venus s’abriter en France. Il s’agit non seulement de juifs venant d’Allemagne et d’autres pays de l’Europe de l’est, mais aussi de réfugiés politiques. Septembre 1939, « Préparer la guerre » : le sud-ouest de la France doit accueillir des milliers d’évacués vivant près de la frontière allemande, quand, en mai-juin 1940, suite à une « guerre éclair » l’armée allemande jette sur la route de l’exode huit à dix millions de personnes. Une partie d’entre elles – français, étrangers, officiels, fonctionnaires ou sans papiers – cherche à quitter le pays via l’Espagne et le Portugal, pays neutres, pour retrouver la liberté outre-Atlantique. À Bordeaux, capitale provisoire du 14 au 30 juin 1940, des milliers demandent des visas pour le Portugal.
Aristides de Sousa Mendes est face à un dilemme. Loyauté envers son gouvernement, qui, dès le 11 novembre 1939, a restreint l’attribution des visas et passeports en imposant une autorisation préalable du gouvernement. Ou bien désobéissance et délivrance des visas à tous ceux, quels qu’ils soient, qui en font la demande. Dès la fin de 1939, Sousa Mendes fait acte de désobéissance. À Bordeaux, puis à Bayonne, du 16 au 23 juin 1940, avec l’aide du rabbin Haïm Kruger (réfugié de Belgique), le consul délivre environ 30 000 visas, dont 10 000 à des personnes de confession juive.
Un des beaux documents de cette exposition, le registre des passeports et des visas du consulat du Portugal à Bordeaux 1939-1940, inscrit au registre Mémoires du Monde de l’UNESCO en 2017, témoigne d’une liberté de jugement et d’un courage exceptionnel. À l’honneur dans la fidélité aux ordres de son gouvernement, Sousa Mendes préfère celui induit par le respect de la dignité humaine. Des milliers de patronymes, égrenés au fil des pages, du plus humble au plus célèbre, tel celui de la famille Rotschild, avec en marge leur numéro d’enregistrement. Rarement un document administratif dans sa banalité aura recélé autant de vies sauvées.
Informé du comportement de leur diplomate à Bordeaux par l’ambassade britannique à Lisbonne, les autorités portugaises décident de le rappeler dès le 21 juin. De retour au Portugal en juillet, Sousa Mendes est démis de ses fonctions et traduit devant un conseil de discipline, accusé de désobéissance pour la délivrance de visas non autorisés. Il meurt dans la misère le 3 avril 1954.
Une première réhabilitation sera initiée par Israël, quand, le 18 octobre 1966, sur proposition du rabbin Kruger, Yad Vashem nomme Aristides de Sousa Mendes « Juste parmi les Nations ». La seconde réhabilitation sera l’œuvre du Comité Sousa Mendes (créé à Bordeaux en 1987). En France et au Portugal, il s’engage pour la mémoire de l’action exceptionnelle du consul Sousa Mendes, ainsi que pour la restauration de sa maison au Portugal, la promotion de la mémoire des Justes et la sensibilisation du grand public, dont des lycéens, aux conséquences de la Seconde Guerre mondiale, de la Shoah en particulier.
L’exposition 1940, l’exil pour la vie, élaborée à l’initiative du Comité Sousa Mendes, en partenariat avec le Crif Bordeaux-Aquitaine, a été réalisée à partir de pièces d’archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères portugais, des archives nationales portugaises, des archives départementales de la Gironde, du musée virtuel du Portugal, du mémorial de Vilar Formoso au Portugal et de la famille Sousa Mendes. Ces documents sont complétés par des témoignages audio, vidéo ou écrits de personnes sauvées par le consul Sousa Mendes ou d’autres diplomates, recueillis par la Fondation Sousa Mendes. Des œuvres d’art contemporains enrichissent l’ensemble des documents exposés. Après Bordeaux, il est prévu que l’exposition se poursuit ailleurs en France, au Portugal et aux États-Unis.
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