Au Maroc, les services de sécurité sont sur leurs gardes. Ils viennent de démanteler un vaste réseau terroriste impliquant Al-Qaïda dans le Sahara occidental. L'histoire commence à Amgala, un petit village, perdu, en plein désert marocain qui devait servir de base arrière à Al-Qaïda au Maghreb islamique. Un stock d'armes est trouvé: «33 kalachnikovs, 4 lance-roquettes, 3 pistolets-mitrailleurs et une importante quantité de munitions ont été saisis» selon le ministre de l'Intérieur, Taïeb Cherkaoui. «C'est un réseau terroriste très dangereux», a-t-il affirmé au cours d'une conférence de presse.
Symboliquement, les autorités ont mis la forme. Habituellement, les affaires de terrorisme ne font l'objet que de communiqués laconiques. Les interventions publiques du ministre sont rares. Mais cette découverte d'un «arsenal» est inhabituelle. Des caches d'armes de cette ampleur trouvées dans une zone surprotégée, le Sahara occidental, territoire disputé depuis trente-cinq ans avec le Front Polisario, est rarissime. Une annonce qui réveille également de mauvais souvenirs. Amgala fut le théâtre des confrontations armées entre le Maroc et l'Algérie lors de la guerre des sables en 1963.
Projets d'attentats
Ces révélations suscitent de nombreuses interrogations. Comment l'organisation terroriste a-t-elle pu cacher des armes à un endroit situé dans la «zone tampon» surveillée par des milliers de militaires? Comment Aqmi a-t-elle pu accéder à un village situé à côté du mur des Sables, une zone minée située à quelques kilomètres seulement de la frontière mauritanienne? Enfin, le réseau terroriste a-t-il bénéficié de complicités au sein du Polisario qui, par le passé, avait fait d'Amgala l'une de ses zones d'influences?
Des questions pour l'instant sans réponse. L'enquête n'en est qu'à ses débuts. Vingt-sept personnes ont été arrêtées. Parmi elles figurerait un membre d'Aqmi de nationalité marocaine. «Il était chargé de créer une base arrière au Maroc, a déclaré le ministre, pour y préparer un plan afin de commettre des attentats terroristes.» L'identité des prévenus n'a pas été divulguée «pour permettre la poursuite de l'enquête, car d'autres complicités à l'étranger ne sont pas exclues», conclut le ministre.
Cette nouvelle affaire de terrorisme inquiète les autorités à plus d'un titre. Car la cible était «les services de sécurité marocains et étrangers». Quels corps sécuritaires étaient visés par ces projets d'attentats «à l'aide de ceintures explosives et de voitures piégées»? Jusqu'à présent, pas de réponse. D'après les autorités, les prévenus ont tenté de «braquer des banques à Casablanca et Rabat pour financer leurs projets».
Officieusement, le coup de filet s'est déroulé il y a déjà une semaine. D'autres arrestations sont en cours. Au moins 12 personnes ont été mises mardi derrière les barreaux. Les services de police auraient également trouvé d'autres caches d'armes, loin du désert, en plein cœur de la capitale économique, dans un quartier populaire de Casablanca.
Photo : D.R.
Source : le Figaro du 6 janvier 2011