Yonathan Arfi

Président du Crif, un militant juif et citoyen

Discours du Président du Crif à l’occasion du colloque « Les Juifs dans la République : révélateur des crises du pacte républicain ?

27 September 2024 | 34 vue(s)
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France

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Pour la deuxième année consécutive, le Crif a célébré l’évènement fondateur qu’est l'Émancipation des Juifs de France, votée le 27 septembre 1791 par l’Assemblée nationale constituante. Le colloque « Les Juifs dans la République : révélateur des crises du pacte républicain ? » s’est tenu jeudi 26 septembre 2024 au Sénat, avec la participation du Président du Sénat, Gérard Larcher.

 

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Sénat, Jeudi 26 septembre 2024

 

« Madame la Députée, Constance Le Grip,

Messieurs les Sénateurs, Rachid Temal et Roger Karoutchi,

Monsieur le Grand Rabbin de France,

Mesdames et Messieurs qui nous faites l’honneur d’intervenir ce soir,

Mesdames et Messieurs,

« La France... est notre Palestine, ses montagnes sont notre Sion, ses fleuves notre Jourdain... Buvons à l’eau vive de ses sources, c’est l’eau de la liberté ! La liberté n'a qu'une langue, et tous les hommes savent son alphabet. La nation la plus asservie priera pour elle qui a délié les chaînes des esclaves. La France est le refuge des opprimés. »
Voilà les mots d’un jeune juif parisien, Samuel Lévy, dans une lettre à l'Assemblée constituante publiée en 1791 dans La Chronique de Paris. Voilà dans quels termes les Juifs de France abordent l’émancipation il y a 233 ans.

 

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L’Histoire des Juifs en France ne débute bien-sûr pas en 1791, tout comme l’histoire de France ne débute pas en 1789. Avant la Révolution, le judaïsme français est une réalité bigarrée, éclatée entre l’Alsace et la Lorraine où vit la grande majorité des Juifs, « les Juifs portugais » qui habitent la côte atlantique de Bordeaux à Bayonne, « les Juifs du Pape » d’Avignon et du Comtat Venaissin, et les quelques Juifs parisiens.
Une des vertus de l’émancipation votée le 27 septembre 1791 par l’Assemblée nationale constituante est d’avoir mis fin progressivement à cet éclatement et d’avoir dessiné les contours de ce qui deviendra le franco-judaïsme, dont nous sommes tous les héritiers.

Si chacun de nous a une date de naissance individuelle, le 27 septembre 1791 est en quelque sorte notre date de naissance collective. Pourvu du droit de citoyen, les Juifs de France deviennent ce jour-là des Français juifs.
Leur engagement pour la République de 1791 à nos jours est la marque de leur fidélité au pacte républicain. Ils seront là on le sait pour la servir, ils seront là pour combattre ses ennemis, ils seront là pour défendre ses frontières.
La République et les Juifs ne vont pas l’un sans l’autre. C’est pourquoi cette année nous avons choisi comme titre pour notre colloque « Les Juifs dans la République : révélateur des crises du pacte républicain ? »

Chaque regain d’antisémitisme en France correspond à une crise profonde de la République, du bouillonnement antisémite de l’Affaire Dreyfus au gouffre de la Shoah où la République avait disparu, jusqu’au trouble de l’antisémitisme contemporain…

La vague d’antisémitisme qui frappe depuis le 7 Octobre n’échappe pas à cette règle. Elle est à la fois le révélateur et le catalyseur des crises françaises.
Depuis le 7 Octobre, la haine des Juifs dévoile les failles béantes laissées ouvertes par le communautarisme, le racialisme, l’assignation identitaire. Autant d’insultes faites à l’universalisme républicain.

Cet antisémitisme prend les mots du soutien à la cause palestinienne. Assignation à un conflit qui se déroule à 4000 kilomètres, nazification des Juifs et d’Israël, harcèlements des étudiants juifs, accusation en complicité de génocide… : voilà où le soutien dévoyé à la cause palestinienne a mené.

Mes chers amis, je me désole de toutes les détresses de populations civiles qu’elles soient israéliennes comme palestiniennes.  Mais en République, cette solidarité ne saurait servir de prétexte à l’antisémitisme.

 

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Chers amis,

En tant que Français, en tant que Juif, je crois à la République. Non pas par nostalgie ou par attachement conservateur. Mais parce que je crois que la République, son universalisme, sa laïcité, sont des réponses éminemment modernes aux défis actuels.

Voilà je crois le sens profond de la promesse de 1791.

Je vous remercie. »

 

Yonathan Arfi, Président du Crif