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Published on 31 January 2022

France - Aurélien Chapeau, militant radical de l’ultradroite, condamné à neuf ans de prison ferme

Cet ex-militaire était jugé pour « entreprise terroriste individuelle ». Il était soupçonné d’avoir diffusé des messages d’apologie du nazisme, acquis des armes et effectué des recherches sur des lieux de la communauté juive.

Publié le 28 janvier dans Le Monde

Le tribunal correctionnel de Paris a condamné, vendredi 28 janvier, à neuf ans de prison ferme Aurélien Chapeau, un ancien militaire adepte du néonazisme, pour « préparation individuelle à la commission d’un acte de terrorisme ».

Interpellé en mai 2020, cet homme de 38 ans, cuisinier dans l’armée reconverti en agent de sécurité, était soupçonné d’avoir diffusé des messages d’apologie du nazisme, acquis des armes et effectué des recherches sur des lieux de la communauté juive. Sous le pseudo « Ayatjouz » (« I hate Jews », je hais les juifs), ce militant radical antisémite et suprémaciste fréquentait depuis 2010 des forums de l’ultradroite.

En mai 2019, Aurélien Chapeau avait été condamné à quatre mois de prison ferme pour des menaces à l’encontre de membres de l’association SOS-Racisme. Malgré cette première condamnation, derrière son écran, il s’était progressivement mis, à partir de 2019, à multiplier les messages de plus en plus menaçants.

La 16e chambre du tribunal correctionnel de Paris, a jugé l’ex-militaire « coupable de faits de préparation individuelle à la commission d’un acte de terrorisme ». Cette peine, très légèrement en dessous de la peine maximale de dix ans de prison ferme requise par le parquet, est assortie d’une période de sûreté des deux tiers.

Explosifs artisanaux et fusil mitrailleur

Aurélien Chapeau était-il un « loup solitaire » s’apprêtant à commettre une « tuerie de masse » comme l’a martelé l’accusation ? Ou un troll d’Internet, comme il en existe « des centaines et qui heureusement ne passent pas tous les jours à l’action », dépeint par sa défense ?

« Le tribunal ne lit pas les augures, nous ne sommes pas là pour savoir si oui ou non vous seriez passé à l’acte sans l’intervention des services de police », a déclaré le président du tribunal au moment de prononcer la peine. Le tribunal, retenant la détention d’armes et « la publication de contenus racistes, antisémites ou xénophobes », a ainsi jugé que le niveau préparatoire d’Aurélien Chapeau était « complètement réalisé » et de « haute intensité ».

« Internet et les réseaux sociaux ne sont pas un simple réservoir de haine dans lequel on pioche à foison de la propagande délétère », a conclu le président du tribunal, précisant que le début de « reconnaissance » par l’accusé « de la dangerosité de ses actes » avait été pris en compte.

Pour le ministère public, tout était réuni pour qualifier le projet de « terroriste » : l’idéologie, la détention d’armes et le repérage de cibles. Lorsqu’ils l’ont interpellé le 26 mai 2020 à son domicile à Limoges, les enquêteurs ont mis la main sur des explosifs artisanaux, trois armes à feu, dont un fusil-mitrailleur, et des centaines de munitions. Selon les éléments de l’enquête, M. Chapeau avait effectué sur Internet des recherches concernant des lieux fréquentés par la communauté juive à Limoges, à Strasbourg et dans la région parisienne et publié sur des forums des captures d’écran de certaines adresses.

Adorateur de Brenton Tarrant

Aurélien Chapeau a répété pendant trois jours s’être « intoxiqué avec de la propagande nauséabonde » sans autre intention que de « faire le buzz » auprès de ses camarades sur Internet. Il a répété s’être repenti, sans pouvoir élaborer sur le fond.

Auprès de sa communauté, il se présentait en adorateur de Brenton Tarrant, l’Australien suprémaciste blanc qui a tué 51 personnes dans deux mosquées de Nouvelle-Zélande en mars 2019. Un modèle qu’il voulait suivre, comme il le disait sur Internet ? « J’ai pas acheté ces armes pour tuer qui que ce soit, je le jure devant Dieu, je mérite d’être puni pour la propagande que j’ai diffusée, mais il n’y a jamais eu de projet d’attentat », a assuré l’homme aux cheveux blonds ras et à la posture raide.

L’intermédiaire qui lui a fourni des armes illégales sans connaître le contexte idéologique – et qui était absent du procès pour raison de santé – a, lui, été condamné à vingt mois d’emprisonnement, dont cinq mois avec sursis.

 

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*Antisémitisme obsessionnel

Hors d’Internet, on ne sait pas d’où vient l’obsession d’Aurélien Chapeau pour les juifs et son adhésion de plus en plus forte à l’idéologie du « grand remplacement ». Son père est de droite et « fana mili », mais jamais il n’a flirté avec l’extrême droite – alors que l’antisémitisme de son fils devient obsessionnel. Il traque les origines juives des leaders politiques, y compris Louis Alliot, du Rassemblement national. Ses recherches prennent un tour « maladif », reconnaît-il : « tuer les juifs », « extermination des francs-maçons ».

Son pseudo en ligne est « Ayatjouz » (« I hate Jews », « je hais les juifs »), il arbore tous les symboles du folklore nazi : le soleil noir à 12 branches, le 88 (pour « HH », Heil Hitler), etc. Il poste des drapeaux décorés de « mort aux juifs » et de la propagande sur des forums, dont le manuel de Brenton Tarrant, le terroriste australien qui a attaqué deux mosquées à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, le 15 mars 2019, tuant 51 musulmans. On a retrouvé la vidéo de la tuerie filmée en direct par Tarrant sur Facebook Live stockée sur le disque dur d’Aurélien Chapeau.