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Published on 18 May 2020

France - Félicien Kabuga, le "financier du génocide rwandais", arrêté près de Paris

Considéré comme le « financier du génocide », Félicien Kabuga était l'un des fugitifs les plus recherchés au monde depuis vingt-cinq ans.

Publié le 16 mai dans Le Point

Il était l'un des fugitifs les plus recherchés de la planète avec une notice « rouge » chez Interpol. Félicien Kabuga, considéré comme le « financier du génocide rwandais » et l'un des principaux accusés encore recherchés par la justice internationale, a été arrêté ce samedi matin près de Paris, ont annoncé le parquet général de Paris et la gendarmerie de l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité (OCLCH) dans un communiqué commun. 

Principal financier

Âgé de 84 ans, Félicien Kabuga, qui résidait à Asnières-sur-Seine (Hauts-de-Seine) sous une fausse identité, est notamment accusé d'avoir créé les milices Interahamwe, principaux bras armés du génocide de 1994 qui fit 800 000 morts, selon l'ONU. Il est visé par un mandat d'arrêt du Mécanisme international, la structure chargée d'achever les travaux des tribunaux internationaux pour le Rwanda (TPIR). « Âgé de 84 ans, il résidait sous une fausse identité dans un appartement d'Asnières-sur-Seine, grâce à une mécanique bien rodée et avec la complicité de ses enfants », a précisé le parquet.

Né en 1935, Félicien Kabuga est un homme d'affaires, ancien petit marchand ambulant devenu l'un des hommes les plus riches du Rwanda : il possédait des plantations de thé de plus de 300 hectares, une minoterie, des complexes immobiliers, des entrepôts… En 1994, M. Kabuga – dont une fille était mariée à un fils du président rwandais Juvénal Habyarimana – appartenait au cercle restreint de ce dernier, dont l'assassinat, le 6 avril 1994, allait déclencher le génocide. Il était le principal financier et bailleur de fonds du parti présidentiel – le Mouvement révolutionnaire national pour le développement (MRND) – et de la Coalition pour la défense de la République et de la démocratie (CDR).

Fugitif

Selon l'acte d'accusation du TPIR, c'est à la fin de l'année 1990, après l'attaque du Front patriotique rwandais (FPR), qu'il entame l'élaboration d'un « plan dans l'intention d'exterminer la population civile tutsie et d'éliminer les membres de l'opposition ».

Pour mettre à exécution son plan il prit la tête de la Radio télévision libre des Mille Collines (RTLM), qui diffusa des appels aux meurtres des Tutsis, et le Fonds de défense nationale (FDN) qui collectait « des fonds » destinés à financer la logistique et les armes des miliciens hutus Interahamwe, selon le même acte d'accusation. Il est également accusé d'avoir « ordonné aux employés de sa société [...] d'importer un nombre impressionnant de machettes au Rwanda en 1993 », avant de les faire distribuer en avril 1994 aux Interahamwe.

Réfugié en Suisse en juillet 1994, avant d'être expulsé, Félicien Kabuga a ensuite temporairement rejoint Kinshasa. Il a été signalé en juillet 1997 à Nairobi, où il a échappé à une opération destinée à l'arrêter, puis à une autre en 2003, selon l'ONG spécialisée Trial.

Recherché sur toute la planète, il faisait même l'objet d'une récompense : cinq millions de dollars avaient promis les Américains en 2002 pour toute information permettant sa capture.

« Nos premières pensées doivent être avec les victimes du génocide rwandais »

Son arrestation montre que « les responsables de génocide peuvent être contraints de rendre des comptes, même vingt-six ans après leurs crimes », a commenté le procureur du Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), Serge Brammertz, dans un communiqué. Précisant que « les forces de l'ordre françaises ont arrêté Félicien Kabuga dans le cadre d'une opération coordonnée sophistiquée ayant nécessité la fouille simultanée de plusieurs endroits. »

Il doit désormais être rapidement présenté au parquet de Nanterre en vue de son incarcération puis au parquet général de Paris dans les prochains jours. S'en suivra une procédure d'extradition devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, qui décidera de sa remise au Mécanisme international à la Haye pour qu'il y soit jugé.

 

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