Richard Prasquier

Ancien Président du CRIF

Blog du Crif - Hommage à Claude Lanzmann, par Richard Prasquier

12 July 2018 | 265 vue(s)
Catégorie(s) :
France
Neuf ans après l’assassinat d’Ilan Halimi, voici la « chronique d’une barbarie et de ses conséquences médiatiques, politiques et judiciaires »,  par Marc Knobel, historien, chercheur, directeur des Études du CRIF

 

Le Hors-série de L'Express numéro 28, "Regards sur l'Histoire" consacré aux Juifs de France a mis en émoi une partie de la communauté juive, François Heilbronn, professeur des universités associé à Sciences-Po Paris et Président des Amis français de l'université de Tel-Aviv lui a adressé deux lettres ouvertes publiées dans l'Arche.
 

 

 

Retour sur les événements qui sont intervenus en juillet 2014 et les manifestations propalestiniennes qui ont dégénéré.

L'antisémitisme est comme une bête particulièrement enragée et puante. Il rôde, nous ne le savons que trop bien...

Est-il pertinent de mettre en parallèle “antisémitisme” et “islamophobie”?
Non, cinq fois non:  Ni sémantiquement , ni historiquement,  ni sociologiquement, ni politiquement et encore moins juridiquement, ces deux termes et les deux concepts qu’ils sous-tendent, ne sont de même nature. Il serait non seulement faux, mais aussi dangereux pour tous, de les mettre en regard sur un même plan.

L'antisémitisme : les causes d'un Mal qui s'aggrave.

Ce dernier détaille ici les multiples racines de l’antisémitisme, qui a explosé en France à partir de l’année 2000 et la première « intifada ». Et qui s’est fortement aggravé tout au long de l’année dernière. Marc Knobel évoque notamment l’origine idéologique – soulignée et étudiée par le philosophe et chercheur Pierre-André Tagguief – d’un antisémitisme qui découle d’un antisionisme extrême, lui-même alimenté depuis longtemps par les tenants de l’islamisme radical. Extrême gauche et extrême droite française en passant par « Dieudonné and Co » sont aussi, historiquement et actuellement, parmi les premiers diffuseurs de la haine antisémite en France. Description et analyse en huit points.

"Dites-moi que ce furent des cauchemars, que le monde s'améliore de jour en jour, que des flammes de lumière jaillissent en chaque point du globe."

Article paru dans le HuffinghtonPost.fr

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Actualité

"Le terrorisme et l'antisémitisme ont marqué cette année passée"

L’Amitié judéo-chrétienne de France - dont plusieurs militants du Crif sont membres du Comité Directeur - a tenu dimanche 29 janvier son Conseil national, l’occasion pour nous de donner quelques nouvelles du front du dialogue.

Je me suis exprimé sur les enjeux de l'élection présidentielle pour la communauté juive française.

Un livre de Victoria Klem

Suite au vote le 16 décembre 2016 du conseil municipal de Clermont-Ferrand au vœu présenté par les groupes communistes, Front de gauche et Europe écologie, vœu relatif au boycott des produits israéliens fabriqués dans « les territoires palestiniens occupés », le Maire de Clermont-Ferrand a fait paraître dans le journal local la Montagne un communiqué. La présidente du CRIF Auvergne-Rhône- Alpes lui répond…

Au lendemain des déclarations du ministre israélien de la défense, lundi 26 décembre, qualifiant la conférence de paix sur le Proche-Orient qui doit se tenir prochainement à Paris de nouveau « procès Dreyfus », le Crif a condamné des propos « maladroits ».

 
 
 

J'ai répondu aux questions d'Olivier Lerner dimanche 4 décembre lors de notre Convention Nationale

Halte à la discrimination d'Israel, le CRIF proteste suite à la décision d'étiqueter les produits israeliens. 

Suite à l'annonce de l'adoption de la directive de l'E.U sur l'étiquetage des produits israéliens le Crif a réagit à travers un communiqué, j'ai voulu dénoncer la décision française et l'obessession israelienne.

J'ai répondu aux questions de Sputnik news.

« Si on parlait de la France ? Français, juifs et citoyens » : c’est le thème de la 7e Convention nationale du Crif le dimanche 4 décembre au Palais des Congrès de Paris.

C’est une étonnante indifférence qui entoure la mise en lambeaux de la ville d’Alep en Syrie.

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« Nous, les survivants, ne sommes pas les vrais témoins. C'est là une notion qui dérange, dont je n’ai pris conscience que récemment. Grâce à  l'habileté ou la chance, nous n’avons pas touché le fond. Ceux qui l'ont fait, qui ont vu la Gorgone, ne sont pas revenus pour raconter, mais ce sont eux, les engloutis, qui sont les témoins intégraux. Ils sont la règle, nous l'exception ».

Ce qu’écrivait Primo Levi dans son livre testament, les Naufragés et les Rescapés, paru en 1985, l’année même où Shoah sortait sur les écrans, c’était la conclusion à laquelle était arrivé Claude Lanzmann qui avait commencé son film douze ans auparavant. C’était aussi le titre du livre où il avait tout appris, la « Destruction des Juifs d’Europe », de Raul Hilberg. La vérité de l’histoire des Juifs pendant la guerre c’était l’histoire de la mort des plus nombreux et  non celle de la survie de quelques-uns.

Le regard de Méduse pétrifie celui qui le dévisage. Pour ne pas la voir en face, Persée l’a vaincue en l’observant au travers des rayons réfléchis par un miroir. Un chercheur, un historien, un survivant ne peuvent  rapporter qu’en fonction d’un prisme personnel, celui de leurs concepts, de leurs expériences ou de leurs émotions. Lanzmann s’était donné une mission impossible: représenter l’affrontement avec la Gorgone, montrer l’image du monstre. Cette image, c’est Shoah, nom  qu’il a pris à un hébreu dont il ne connaissait rien, nom qui l’avait frappé par sa brièveté et son opacité énigmatique et qui lui évitait l’usage du nom « Holocauste » aux insupportables réminiscences religieuses.

Lanzmann a dit que le film Shoah était la « chose » elle-même. Ce qui pouvait paraitre d’une insupportable outrecuidance, confondre le film avec l’événement qu’il décrit, (et quel événement!), doit se comprendre par cet effort à certains égards héroïque, de s’approcher au plus près de l’unicité pétrifiante, défiant toute explication, du crime le plus inouï de l’histoire humaine.

Pour y parvenir il ne fallait aucune complaisance; l’interrogateur Lanzmann en même temps en dedans et en dehors de cette histoire ( en dedans car il avait vécu les dangers d’être Juif, en dehors car il n’avait perdu aucun des siens), triturait ses interlocuteurs pour en faire jaillir des jets de vérité qui allaient au-delà des mots, alors qu’il ne se servait  que de mots. Il refusait en effet tout support d’archive ou tout accompagnement musical qui auraient risqué de manipuler l’émotion ou d’aplatir par le biais de la compassion la dureté insupportable de la description de la vérité. Lanzmann, qui fut dans sa jeunesse enseignant de philosophie, était un maïeuticien comme l’avait été Socrate, le fils de l’accoucheuse, qui extirpait la vérité dans l’âpreté de l’interrogation dialectique. Ce n’était pas un psychothérapeute cherchant à apaiser ses patients. Pour ceux qu’il interrogeait l’expérience était éprouvante, parfois presque inhumaine, mais le film Shoah, s’il n’a évidemment pas été un succès commercial s’est, de l’avis de tous, confirmé par sa rigueur et sa démesure même comme la représentation incontournable de ce qu’avait été l’extermination des Juifs.

L’histoire de la mémoire de ce qu’on n’appelait pas encore la Shoah avait été une suite d’esquives, comme la mise en exergue de l’héroïsme des déportés et des résistants, celles et ceux de Buchenwald et de Ravensbruck,  mais aussi de la révolte du ghetto de Varsovie, héros de peuples supposés avoir lutté unanimement pour leur liberté. Ce fut aussi le silence contraint et parfois d’ailleurs salvateur de ceux qui durent se reconstruire et dont la parole était inaudible pour leur entourage et plus encore pour le public. Ce fut la sécheresse des statistiques, ces millions de victimes dont le nombre à lui seul suscitait paradoxalement  moins de colère que l’image d’un seul enfant en pleurs. Ce fut plus tard le détournement inconscient par des auditeurs essayant de positiver les récits de survivants vers une confirmation de leur survie et donc une possibilité de conclusion heureuse, ou la surévaluation de l’action magnifique des Justes pour ne pas désespérer de l’humanité. Le livre le plus populaire, et de loin, de l’histoire de cette période est celui d’Anne Frank où la mort n’apparait qu’en filigranes très distanciés.  Enfin, si Auschwitz est devenu peu  peu le symbole de l’extermination des Juifs, c’est qu’il y a eu des survivants et qu’ils ont témoigné. Mais c’est depuis le film de Lanzmann qu’il est apparu au monde non spécialisé que les usines de mort  de Chelmno, Treblinka, Sobibor (auquel il a consacré un film), Belzec (le camp « parfait » sans révolte et en pratique sans survivant) étaient les chefs d’oeuvre de l’entreprise nazie, les trous noirs d’une humanité inhumaine qui comportait malheureusement beaucoup plus de convaincus, d’indifférents et de tolérants que les quelques criminels pendus après la guerre. Il n’y avait pas de consolation à une monstruosité pareille et Lanzmann rejetait les tentatives d’explications comme des masques à illusions. S’il était, on le sait,  intolérant, parfois injuste, il était  souvent  aussi d’une acuité d’analyse extraordinaire dans son désir d’aller à l’essentiel.

Il ne m’appartient pas de m’étendre sur l’ensemble de l’oeuvre et de la vie de Claude Lanzmann, cet homme qui aimait tant la vie qu’il continuait ses projets  jusqu’à ses derniers jours  et qui refusait de se laisser détruire par les atteintes de l’âge et les terribles douleurs familiales, dont celle de la mort de son fils Felix auquel tant de ses amis continuent  de penser avec émotion. Il ne m’appartient pas non plus de décrire sa place dans la vie intellectuelle du siècle passé dans notre pays. Mais il convient d’insister plus qu’on ne le fait d’habitude sur le lien permanent et fort à Israël de cet homme qui avait été plus que d’autres un militant actif de l’anti-impérialisme et dont toute la vie fut dominée par la volonté d’être lucide et de ne pas se plier au conformisme du politiquement correct.

Enfin s’il y avait Claude Lanzmann le lutteur, il y a eu aussi et peut-être surtout Claude Lanzmann, l’auteur non seulement de films mais aussi d’un chef d’oeuvre littéraire indiscutable, extraordinaire, sa biographie, le Lièvre de Patagonie.

Un jour qu’il était venu au Crif participer à un colloque, il est abordé par un inconnu. « M.Lanzmann, je viens de lire votre livre; il est, il est… très bien… ». La réponse fusilla évidemment le malheureux: « Très bien, c’est tout ce que vous trouvez à dire? Ça vous gêne de dire que c’est un chef d’oeuvre? ».

Claude Lanzmann n’était pas un modeste. Mais il y aurait eu de l’hypocrisie à ce qu’il le fût et il détestait l’hypocrisie plus que tout.

L'hommage à Claude Lanzmann de Richard PRASQUIER, publié dans Actualité Juive