L'information a été révélée par le parquet de Paris. Mercredi matin, quand elles lancent l'assaut sur un appartement à Saint-Denis, les troupes du Raid pensaient trouver Abdelhamid Abaaoud, membre de l’Etat islamique et chef opérationnel présumé des attentats de Paris de vendredi soir, revendiqués par Daech, rappelle Europe1. Née en 1989, la jeune femme travaillait jusqu'en 2012 dans une entreprise de BTP à Epinay sur Seine, selon TF1. Elle aurait, à plusieurs reprises, menacé l'Etat français et exprimé son désir de faire le djihad. Aux environs de 4h20, elle a mis sa menace à exécution en activant son gilet explosif. Mais avant cela - et cela intéresse particulièrement les enquêteurs -, la kamikaze "a été aperçue en train de passer un coup de téléphone", indique une source proche du dossier à TF1. Pour prévenir des complices ? L'enquête le dira. Une première en France, mais pas en Europe
Les attentats kamikazes, une première en Europe ?
Faux. En juillet 2005, quatre jeunes musulmans britanniques s’étaient fait exploser dans le métro londonien, tuant 52 personnes. En avril 2004, quatre suspects des attentats de Madrid avaient également préféré déclencher leurs ceintures d’explosifs, tuant un officier de police espagnol, plutôt que d’être pris vivants, rappelle Le Dauphiné Libéré du jour.
Des femmes Kamikazes ? C’est actuellement le groupe djihadiste nigérian Boko Haram qui a le plus recours aux femmes kamikazes, allant jusqu’à envoyer sur des marchés des fillettes, parfois handicapées mentales ou droguées. Mais, si des centaines de femmes ont rejoint au cours ces dernières années les « terres de djihad » syrienne ou irakienne, rares étaient celles qui avaient choisi la voie du « martyr ». A noter cependant que Muriel Degauque, jeune Belge convertie à l’islam, s’est fait sauter en novembre 2005 en Irak, au passage d’un convoi américain.
Des femmes en Syrie et en Irak
Selon David Thomson, journaliste et auteur du livre Les Jihadistes français (éd. les arènes, 2014, voir en particulier les pages 49 à 78), on serait sur une fourchette de 100-150 femmes et enfants, aux côtés des combattants français installés en Syrie (Le Figaro, 20 juin 2014).
Qui sont-elles ?
Si le phénomène attire désormais les femmes, c'est parce que le discours tenu par les groupes djihadistes a changé. Une place plus importante est dévolue à la femme musulmane dans le djihad syrien, alliée à une image qui reste traditionnelle. Doctorante-chercheuse suisse travaillant sur les femmes djihadistes à l'EHESS, Géraldine Casutt est en contact avec certaines de ces femmes. Selon elle, "l'idéologie djihadiste a tendance à présenter la femme comme un être de très grande valeur, complémentaire de l'homme. Une image de la femme musulmane ("al-ukhti", "ma sœur" en arabe) bafouée, selon eux, en Occident et dans les pays musulmans qu'ils estiment corrompus. C'est la deuxième nouveauté dans le message djihadiste.
Ce discours résonne dans l'esprit des jeunes femmes et jeunes hommes qui ont développé un certain ressentiment à l'encontre des politiques religieuses menées dans leur pays d'origine (TV5 monde, 8 août 2014). Ces femmes ont le sentiment de servir une cause qu'elles estiment juste. A travers le djihad syrien, et l'éventuelle création d'un nouvel État islamique, elles endossent la défense des musulmans et musulmanes réprimés dans le monde, et surtout en Syrie par l'alaouite Bachar el-Assad.
Selon David Thomson toujours, trois scénarios sont donc possibles :
1) D'abord, il y a celles qui obtiennent une promesse de mariage d'un djihadiste français qui est déjà sur place. La plupart du temps, ça se fait sur Skype ou via les réseaux sociaux. Elles partent seules mais retrouvent leur mari sur place. Une fois qu'elles sont arrivées, leurs futurs époux appellent la famille restée en France et demandent l'autorisation de mariage au père. A noter qu'en Syrie, les djihadistes de Daech ont ouvert une agence matrimoniale destinée aux femmes "désireuses de se marier avec des combattants".
2) Ensuite, il y a les femmes déjà mariées avec un djihadiste qui partent avec les enfants en Syrie.
3) Et puis il y a celles qui se marient sur le sol français dans le but de partir en Syrie.
RTL a rencontré Fatima, la mère d'une jeune femme de 22 ans, devenue djihadiste. Elle raconte comment, suite à cause d'une "mauvaise rencontre", "avec une fille de son âge", elle s'est peu à peu radicalisée, elle qui "n'était pas pratiquante". Elle se met à porter le voile intégral, puis se marie religieusement via internet avec un Belge qui est là-bas depuis un an. Un jour, la jeune femme quitte sa mère: "elle m'a appelée, je lui ai dit de rentrer (...) Depuis, je n'ai plus de nouvelles". Fatima ne se résigne pas. "J'appelle une centaine de fois par jour, raconte-t-elle. Je me dis qu'elle va bien, sinon je ne tiendrai pas". Selon le reporter de RFI, David Thomson, qui a recueilli des informations inédites de la bouche même des djihadistes français qui partent en Syrie, elles sont clairement moins nombreuses que les hommes mais leur présence est notable: elles représentent un quart des Français engagés dans les brigades sous allégeance d'Al Nosra, groupe affilié à Al-Qaïda ou encore du groupe Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). Elles ne sont parfois que des adolescentes, les plus jeunes ont 14 ans. Les plus âgées ont dans la trentaine.
Beaucoup sont des converties à l'Islam
Comme la jeune Clémence, ex-catholique pratiquante, dont il parle dans son livre. Justement, Clémence a décidé avec Souleymane d'émigrer de France vers une terre d'Islam. Pour Souleymane, raconte-t-il, l'envie irrépressible de partir lui est venue de Facebook: "Le déclic, c'est bête, c'est en voyant la vidéo d'une sœur, une Française convertie elle aussi, une célibataire qui avait des problèmes avec la justice ici et qui est partie toute seule, pour se marier en Syrie."
Il s'est dit alors qu'il n'avait aucune excuse et qu'il serait possible de partir. Clémence, 32 ans, sans emploi, évoque son trouble devant la vidéo: "Je me suis sentie visée et concernée. C'était incroyable, c'était Hollywood de la voir là-bas, c'était un film. Elle a émigré seule. Elle a pris l'avion et elle s'est mariée là-bas, elle a épousé un frère là-bas. Ça a l'air si facile quand c'est quelqu'un qui est comme nous.
C'est pour cela qu'on part. C'est juste pour cela", explique-t-elle au reporter.
D'autres partent, avec leurs enfants, pour suivre leurs maris candidats au combat en Syrie. C'est un phénomène spécifique: on part faire le djihad en Syrie avec femmes et enfants. D'autres jeunes femmes y vont pour épouser un combattant en pensant que grâce à cette union, elles se garantiront une place au paradis en tant que femme de martyr, si celui-ci meurt au combat...
Thomson raconte comment et pourquoi les combattants français désireux de se marier cherchent une moudjahida francophone et partante pour le combat. La plupart d'entre eux préfèrent donc inciter -via Internet- des Françaises à les rejoindre plutôt que d'épouser des Syriennes avec lesquelles ils ne peuvent guère entrer en contact, explique-t-il. Dans un autre extrait, Thomson raconte comment Sirine, une jeune française, n'aura échangé que deux ou trois fois par Skype, Facebook ou par téléphone avec son futur époux. Avant se marier, elle ne l'aura peut-être jamais rencontré physiquement. "Honnêtement, ça me gêne quand même un peu. Mais après je me dis que j'aurai une récompense au paradis."
Des femmes sous Daech
Ces femmes sont désintégrées, déstructurées et aveuglées par la propagande développée par les djihadistes. Ce sont des proies faciles. C'est ainsi qu'elles se déshumanisent et participent à cette orgie barbare et moyenâgeuse.
Voient-elles seulement comment les femmes souffrent sous l'emprise de Daech?
Se rendent-elles compte qu'une femme libre est le symbole de tout ce que les djihadistes détestent: l'Occident et la liberté?
Ne voient-elles pas que les femmes sont les premières victimes de la guerre et qu'il ne s'agit pas seulement de celles issues des minorités yazidies et chrétiennes, mais de l'ensemble des femmes, sunnites et chiites? Car Daech sème la terreur dans les territoires qu'il contrôle en Irak et en Syrie. Et pour l'État islamique, les femmes doivent être totalement assujetties et déshumanisées. Myriam Benraad, politologue spécialiste de l'Irak, chercheuse au CERI explique (Le Figaro madame, 19 août 2014) que les combattants les considèrent comme des objets commerciaux et sexuels. Ils les capturent, les enferment et en font des butins de guerre. Dans le califat autoproclamé, la femme n'est pas une citoyenne, mais une esclave domestique et sexuelle à la merci de son mari.
Sous Daech, les femmes sont des esclaves :
1) C'est ainsi que dans les territoires qu'il contrôle, les femmes doivent sortir le visage et le corps complètement couverts par un niqab, à la condition que "le déplacement soit nécessaire", autorisé par le père, le frère ou le mari, et accompagné de l'un d'eux.
2) C'est ainsi que Daech a ordonné que toutes les femmes âgées de 11 à 46 ans en Irak subissent des mutilations génitales (l'excision) dans les régions qu'il contrôle et 4 millions de filles et de femmes pourraient en être affectées.
3) C'est ainsi que les femmes accusées d'adultère sont lapidées.
4) C'est ainsi que des dizaines de femmes yazidies capturées en Irak par Daech ont été forcées à se convertir à l'islam puis "vendues" pour être mariées de force à des terroristes du groupe djihadiste.
5) C'est ainsi que les femmes françaises et européennes qui partent en Syrie et en Irak croiseront d'autres femmes. Mais celles-là sont asservies, retenues en otage, vendues ou violées.