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L'écriture est agréable et l'ensemble se lit volontiers d'une traite. Tout commence lors du tristement célèbre procès de Nuremberg qui débuta le 20 novembre 1945 et dura onze mois , lorsque vingt-et-un dignitaires nazis sont jugés par une haute cour. Parmi eux, Julius Streicher, fils d'instituteur, né le 12 février 1885 à Fleinhausen, partisan de la première heure d'Adolf Hitler et qui sera le directeur du journal de propagande « Der Stürmer » dont la devise s'étalait en une : « Die Juden sind unser Unglück » ( Les Juifs sont notre malheur). Conduit à la potence, Streicher aurait lancé dans un cri terrible ces quelques mots : « Ce sont les Juifs qui vont être contents ! C'est Pourim 1946 ». Étranges propos dans la bouche d'un nazi condamné à mort. Et c'est pour tenter de comprendre cette énigme que Bernard Benyamin, créateur, avec Paul Nahon du magazine « Envoyé Spécial » d'Antenne 2, se lance dans une enquête passionnante où ne sont pas absents les souvenirs personnels et familiaux. Pour l'aider, de nombreux spécialistes sont sollicités, notamment un carré d'as de savants et de rabbins : Avraham Malthète, paléographe et épigraphiste, as de cœur, rav Arie Gay de Neuilly, as de pique. As de carreau, le rav Avi Bloch de Jérusalem. L'as de trèfle envisagé, le Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, préférera ne pas montrer son jeu.
Consultés tour à tour, les experts vont petit à petit mettre en évidence les particularités de la Méguila d'Esther : absence du nom divin, présence de petites et grandes lettres dans la graphie des noms des fils d'Aman le maudit, affirmation de Maïmonide selon lequel, à la fin des temps, toutes les fêtes du calendrier liturgique juif disparaîtront sauf Pourim, demande formulée par Esther à son époux, le roi Assuérus, que les fils d'Aman soient pendus alors qu'ils l'ont été la veille, passage relatif aux 300 têtes couronnées de Germamia ( Germania?) d'Edom...
Comme on peut s'y attendre, la guématria, analyse numérique du vocabulaire, n'est pas absente de l'ouvrage. La cerise sur le gâteau, c'est la révélation du nom de l'éditeur de « Mein Kampf » : Max Amann!! Incroyable coïncidence.
De très belles pages son consacrées au sinistre camp de concentration de Landsberg et à la passion malsaine des nazis pour le judaïsme.
Une petite fausse note ou faute de goût, dirons certains, dans ce livre haletant : une référence qui n'apporte rien à l'ouvrage, à Charles Enderlin, dont on nous affirme que « ses analyses sur la géopolitique de la région ont toujours été d'une rare pertinence ». Comme si, de manière subliminale, l'auteur voulait faire état de son soutien confraternel à un journaliste particulièrement controversé dans l'affaire dite « Al Dura ».
Reste un thriller véritablement passionnant qu'il convient de découvrir.
Jean-Pierre Allali
(*) First Éditions. Octobre 2012. 272 pages. 20,50 euros.