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Publié le 14 avril dans Le Parisien
Au cours de son allocution de près de trente minutes sur la crise du Covid-19, Emmanuel Macron a répondu ce lundi 13 avril à plusieurs interrogations et fait plusieurs annonces qui concernent la santé, l'éducation ou bien encore l'activité économique. Retour sur les points clé de l'allocution du président de République.
Quatre nouvelles semaines de confinement s'ouvrent aux Français. Il sera « strict » jusqu'au lundi 11 mai. Les règles actuellement en vigueur ne seront « ni allégées, ni renforcées », a précisé le chef de l'Etat
Un laps de temps nécessaire, selon la virologue Marie-Paule Kieny : « Le critère numéro un du déconfinement doit être l'assurance que les services hospitaliers sont revenus à une activité normale, pour pouvoir faire face à une éventuelle deuxième vague. Pour cela, nous devons prendre notre mal en patience », relève l'ancienne directrice adjointe de l'Organisation mondiale de la santé alors que les réanimations dans le Grand-Est, comme en Ile-de-France, restent saturées.
A quoi va ressembler l'après-11 mai ? Si la propagation du virus a continué à ralentir, les travailleurs reprendront le chemin du boulot, les enfants, celui de l'école. Mais les cafés, restaurants, hôtels, théâtre, cinémas resteront clos. Aucun des grands festivals ni concerts ne pourra se tenir jusqu'à « au moins » mi-juillet.
Les crèches, écoles, collèges et lycées rouvriront « progressivement » à partir du 11 mai. Une « priorité », a assuré le chef de l'Etat, alors que le confinement creuse chaque jour « les inégalités de logement, les inégalités entre les familles ». Si le constat est net, et largement partagé par la communauté éducative, les conditions de cette réouverture restent, en revanche, à préciser.
« Le gouvernement aura à aménager des règles particulières, organiser différemment le temps et l'espace, bien protéger nos enseignants et nos enfants avec le matériel nécessaire », a expliqué Emmanuel Macron. En clair, cela pourrait signifier des emplois du temps allégés et aménagés (par exemple sur deux jours au lieu de quatre), pour éviter que les élèves se retrouvent trop nombreux en classe ou dans les cours de récré. Mais aussi des masques en nombre suffisant pour 12 millions d'élèves et plus de 800 000 enseignants. « Dans les petites classes, on voit mal comment les gestes barrière ou le port du masque pourront être respectés », glisse une source syndicale, qui juge peu probable un retour en classe pour les écoliers les plus jeunes.
Pour les étudiants de l'enseignement supérieur, « les cours ne reprendront pas physiquement, jusqu'à l'été » a précisé Emmanuel Macron. Tous les partiels et examens se tiendront donc à distance.
Longtemps, le gouvernement a tergiversé sur cette fameuse question des masques. Pas utiles, peu efficaces, et maintenant, nécessaires. Ce lundi, Emmanuel Macron a tranché : à partir du 11 mai, un masque grand public sera accessible pour chaque Français, via les mairies. « Pour les professions les plus exposées et dans certaines situations, comme dans les transports en commun, son usage pourra devenir systématique », a-t-il dit, sans pour autant préciser le caractère obligatoire, ou non, de son port.
Attention, cette protection du visage ne devra pas remplacer les gestes barrière : lavage des mains, distanciation sociale…
« Le gouvernement aura à y travailler. Il ne faudra négliger aucune piste, aucune innovation, estime Emmanuel Macron. Mais je souhaite qu'avant le 11 mai, nos assemblées puissent en débattre et que les autorités compétentes puissent nous éclairer. Car cette épidémie ne saurait affaiblir notre démocratie, ni mordre sur quelques libertés. »
Comme le dit l'un de ses lieutenants, le chef de l'Etat est resté fidèle au « en même temps » sur cette délicate question du traçage numérique, qui a provoqué la levée de boucliers d'une partie de sa majorité. « Le président et le Premier ministre sont sceptiques. Mais il ne faut pas qu'on nous accuse d'avoir exclu un dispositif qui pourrait être utile », décrypte un conseiller de l'exécutif.
Il n'a pas prononcé son nom : hydroxychloroquine, ni celui du médecin qui a mis ce médicament dans la lumière, le Pr Didier Raoult. Mais le message envoyé par Emmanuel Macron est clair : « Aucune piste de traitement ne sera négligée. » Celle-ci, comme les nombreuses autres, en cours d'études cliniques. En plus des médicaments spécifiques, les projecteurs sont tournés vers les vaccins sur lesquels nos chercheurs travaillent d'arrache-pied. Et pour cause : « Nous sommes loin de l'immunité collective » de la population. Comprendre : les 60 % qui auraient eu le Covid-19 et protégeraient ainsi tous les autres. Promesse du président de la République : un investissement massif dans la recherche.
Emmanuel Macron a réaffirmé des mesures de soutien à l'économie, et annoncé que des « moyens financiers nouveaux » seraient annoncés mercredi 15 avril en Conseil des ministres. Le chef de l'Etat a indiqué qu'une « aide exceptionnelle aux familles les plus modestes », affectées par la crise du coronavirus, ainsi qu'aux « étudiants les plus précaires vivant parfois loin de leur famille, en particulier lorsque celles-ci viennent d'outre-mer » serait mise en place. Il a demandé au gouvernement de la « verser sans délai […] afin de leur permettre de faire face à leurs besoins essentiels ».
Les mesures de chômage partiel et d'aides aux entreprises seront prolongées. Le plan d'urgence vient d'être renforcé (le montant prévu pour le chômage partiel est passé de 8,5 à 20 milliards d'euros le fonds de solidarité pour les très petites entreprises, de 1 à 6 milliards d'euros). Emmanuel Macron a mis la pression sur les banques appelées à « décaler les échéances » et les assurances, sommées de « prendre leur part » à l'effort vis-à-vis des entreprises.
Enfin, il a annoncé une aide spécifique pour les secteurs les plus touchés. « Le tourisme, l'hôtellerie, la restauration, la culture et événementiel » bénéficieront d'un plan sur-mesure à venir, avec « des aides spécifiques et des annulations de charges ». Aucune date de réouverture pour les cafés et les restaurants n'a été avancée. Pour le reste, le gouvernement présentera un « plan de l'après-11 mai d'ici 15 jours », a promis Emmanuel Macron.
Dans les hôpitaux, comme dans les maisons de retraite, autoriser les familles à venir dire « adieu » à leur proche en fin de vie… tel est le souhait d'Emmanuel Macron.
« Je regrette que le seul moment où il a parlé spécifiquement des Ehpad (NDLR : établissements pour personnes âgées dépendantes) ait été pour cette raison-là. La question de l'ouverture des établissements se pose au-delà de la fin de vie », souffle Luc Broussy, spécialiste des questions de vieillissement. « Ce que j'ai aussi compris aussi est que pour les aînés, le confinement va durer au-delà du 11 mai. Mais jusqu'à quand et qui sont les aînés ? Un homme de 70 ans en pleine forme l'est-il ? interroge Luc Broussy. Il va falloir des clarifications ».
Le président n'en a pas dit un mot. Pour l'heure, le second tour des municipales est reporté fin juin. En coulisses, la possibilité de le repousser encore à l'automne, voire à mars 2021, est sur la table. « Franchement, là, on s'en moque. Les gens sont préoccupés par autre chose », observe un parlementaire LREM pour expliquer le silence de Macron sur ce point.
Solidays, le Hellfest ou le Lolapalooza avaient déjà pris les devants. Emmanuel Macron a confirmé qu'aucun festival ne pourra se tenir au moins jusqu'à « mi-juillet ». Ce qui sonne le glas pour les Francofolies, prévues du 10 au 15 juillet. Et le festival d'Avignon, qui a annoncé lundi soir son annulation. Quid du Festival de Cannes? Pourra-t-il de nouveau décaler ses dates? Même inquiétude du côté des organisateurs des Vieilles Charrues.
En interdisant les rassemblements publics jusqu'à mi-juillet, le président de la République a mis fin à une partie du suspens concernant le Tour de France. Il ne se tiendra pas aux dates prévues. La perspective d'un Tour à huis clos ayant déjà été écartée par les organisateurs, l'hypothèse pourrait être envisagée d' une Grande Boucle en… août. Les dates du 25 juillet au 16 août sont sur la table et les villes étapes et les équipes ont déjà donné leur accord. Les organisateurs devraient trancher d'ici la fin du mois.