Tribune
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Publié le 30 Avril 2014

Bonne conscience + rigolade + audimat = crétinisme télévisuel

Tribune de Jacques Tarnéro publiée dans le Huffington Post le 29 avril 2014

Il y a quelques mois un samedi soir chez Ruquier un humoriste autoproclamé faisait ses bons mots sur Hollande en pleine agitation conjugale "...il est allé tirer un coup en scooter... bon et alors, déjà Mohamed Merah était allé tirer un coup en scooter..." Hahaha! Applaudissements dans le public... On rigole du mot d'esprit...

C'était peu de temps après qu'un autre humoriste ait connu un certain succès avec sa chanson à succès "shoahnana"... On connaît la suite. Mais à la télé il n'y a pas que de blagues potaches d'un goût douteux. A la télé on pense aussi. A la télé il y a aussi du débat d'idées. On passe du grivois au concept en un instant. Ça fait partie du jeu. Bien sûr il faut changer de style, parfois de chaîne. Cravate dénouée ou col de chemise déboutonné (avec veste et brushing tout de même) pour faire libéré, mais de bon ton.

Natacha joue la conservatrice chic et Aymeric le progressiste à barbe de quinze jours, tandis que Laurent mène le jeu avec un talent à la fois enjoué et vif, juste ce qu'il faut pour être dans l'air du temps, moqueur et désabusé. On ne nous la fait plus, pas à nous! Samedi soir à la télé dans un talk-show, faut d'abord rigoler. De tout. C'est la raison pour laquelle Arcady a fait le rabat-joie avec son film 24 jours qui raconte le kidnapping et l'assassinat de ce jeune juif en 2006, Ilan Halimi. Et brutalement on a moins rigolé.

Arcady a fait un film qui rapporte le meurtre barbare d'Ilan Halimi. Arcady rapporte, montre, donne à voir un abîme de bêtise, de violence, de gestes ignobles. Il montre une famille ravagée, une souffrance indicible. Il montre une police dépassée par les faits et une justice qui refuse de voir le réel. Quel est-il ce réel? La sous-culture des "quartiers" ou plutôt la culture née du ressentiment, de la frustration, de la bouillie intellectuelle des "jeunes en difficulté", des blacks-blancs-beurs débiles, racistes, nourris de clichés. Quels clichés? Juif = fric, Juif = pouvoir, juif = puissance, Juif = Israël.

On n'a pas idée de programmer des histoires aussi affreuses dans une émission de divertissement. Bon, tout le monde a dit c'est un bon film, faut aller le voir, c'est une œuvre utile, éducative et tout et tout. A la télé on est contre le racisme, même contre l'antisémitisme, ça va de soi. Oui, mais... On n'a pas tout vu qu'il paraît. On a raté le meilleur. La télé a coupé Caron, l'intello de gauche. La prod a trouvé qu'il avait dit des choses too much. Et elle a bien fait… Lire la suite.