Tribune
|
Publié le 31 Août 2004

Légitimité

Il est aujourd’hui courant de trouver sur les pétitions – en particulier lorsqu’il s’agit de soutenir les Palestiniens - des signatures suivies de la mention ancien déporté ou ancien résistant, comme si cette qualité donnait à tout jamais une légitimité à dire le « juste » ou le « bien ». Si on peut à la rigueur penser que ces personnes auraient un « radar » interne que dire de certains se déclarant « fils » ou « petit-fils » de déporté ou de résistant n’ayant alors pour toute légitimité que le fait d’être fils de leur père ?



De la même façon, le petit fils de Ghandi, muni de sa légitimité d’héritier, est parti dans les territoires palestiniens en « délégation de paix ». Curieuse mission de paix que celle d’un homme qui n’a entendu que le point de vue palestinien, n’ayant pas visité Israël ni rencontré aucun Israélien, qu’il s’agisse d’officiels ou d’hommes de la rue.
Sur place, il soutient la démarche des prisonniers palestiniens en jeûnant avec eux et oubliant les attentats suicides et des 1000 morts israéliens de l’Intifada - il affirme pourtant paraît-il que les Israéliens ont droit à la sécurité - il qualifie la barrière de séparation israélienne, seul moyen non-violent trouvé par ces derniers pour lutter contre ces attentats, de mur de l’apartheid. Incitant les Palestiniens à une résistance non-violente contre une oppression dont il préfère ignorer l’histoire, il veut rapporter aux Etats-Unis une image des Palestiniens peuple pacifique et non-violent. Pour lui, « [Les Palestiniens] ne sont pas des terroristes, ils ne sont pas violents, les gens sont les gens, ils sont affectueux, ils sont chaleureux, ils veulent la paix et la liberté, comme tout le monde ».

Comparant la situation des Palestiniens à celle des Indiens colonisés par les Anglais, il suggère dans son discours devant le Conseil législatif palestinien à tous les Palestiniens exilés de marcher vers la Palestine pour « faire savoir au monde que vous revenez dans vos maisons, non pas dans un pays étranger, ni en violation des frontières d'un pays quelconque ». Malgré ses affirmations de défendre l’existence de deux Etats, il considère donc en fait que toute la Palestine est territoire occupé. Pour ce grand pacifiste, bien qu’il s’en défende, la seule paix possible semble bien être…. de rejeter les Juifs à la mer, ce qui évidemment ne nécessite aucune négociation avec les intéressés et explique qu’il n’ait pas éprouvé le besoin de rencontrer des Israéliens.
Il est vrai que son grand-père, dès 1938 et alors même qu’il reconnaissait la montée du nazisme, s’exprimait contre la création d’un foyer juif en Palestine. Faut-il rappeler à ce vertueux petit-fils que son grand-père s'est aussi toujours opposé à tout plan entraînant la partition de l'Inde en deux nations, une à majorité hindoue, l'autre à majorité musulmane (le Pakistan) et que le jour du transfert du pouvoir, Gandhi ne célébra pas l'indépendance mais préféra rester à pleurer seul sur la partition à Calcutta. Aujourd’hui des zones de la frontière entre le Pakistan et l’Inde reste discutée. Pourquoi au nom de son grand père ne va-t-il pas prêcher aux Hindous expulsés du Pakistan et aux musulmans expulsés d’Inde (ainsi qu’à tous leurs descendants) de marcher pour rejoindre leurs anciennes maisons ?