- English
- Français
Photo : En juin 2018, A.B. Yehoshua était l'invité des Amis du Crif, aux cotés d'Eliette Abécassis
Il y a 4 ans, presque jour pour jour, nous avions le privilège de recevoir Abraham B. Yehoshua aux Amis du Crif, pour une rencontre exceptionnelle aux côtés d'Eliette Abécassis. Nos deux invités avaient évoqué les sujets littéraires et politiques avec la même intensité.
Sur les interrogations de la salle sur la place de l'écrivain en Israël, qui transcende largement la fonction littéraire, A.B. Yehoshua avait rappelé que les plus grands penseurs du sionisme, de Theodor Herzl à Vladimir Jabotinsky, étaient avant tout des écrivains et qu'il se sentait à son tour investi du rôle d'écrivain-penseur.
La plume et le verbe d'Avraham B. Yehoshua vont nous manquer.
#Hommage - A.B. Yehoshua nous a quittés
Nous apprenons avec tristesse la disparition de l'un des plus grands écrivains et penseurs israéliens de sa génération. 1/2 pic.twitter.com/IVCfGgbUp7— CRIF (@Le_CRIF) June 14, 2022
Publié le 14 juin 2022 dans Le Monde
L’auteur israélien Avraham Yehoshua, lauréat du prix Médicis étranger en 2012 et figure de la gauche israélienne anti-occupation, est mort à l’âge de 85 ans, a annoncé, mardi 14 juin, l’hôpital Ichilov de Tel-Aviv. Né à Jérusalem en décembre 1936 de parents d’origines grecques et marocaines, il avait publié ses premières nouvelles en 1963. Depuis, ses romans et pièces ont été traduits de l’hébreu en plus de 30 langues, dont le français.
En 1995, il avait reçu le prix d’Israël, plus importante reconnaissance culturelle au pays. Et en 2012, il avait raflé le prix Médicis dans la catégorie livres étrangers pour Rétrospective (Grasset), traduit de l’hébreu par Jean-Louis Allouche.
Pour Nitza Ben-Dov, professeure de littérature à l’université de Haïfa (nord) ayant enseigné à ses côtés, Yehoshua était le « plus grand auteur » d’Israël. « Il passait d’histoires surréalistes et pleines de rêveries, déconnectées du temps et de l’espace, à des œuvres ancrées dans la culture israélienne et le présent », a-t-elle déclaré à l’Agence France-Presse. Les derniers travaux d’Avraham Yehoshua étaient empreints de psychologie, influencés par sa femme psychanalyste, selon Mme Ben-Dov.
« Chaleureux et ouvert », avide de reconnaissance, il pouvait aussi se montrer mordant face à ses interlocuteurs, d’après Mme Ben-Dov. « C’était un homme complexe, dont l’attitude vis-à-vis du monde était ambivalente. Sa conscience de la complexité de l’homme, qu’il tirait de sa propre expérience, rendait son travail pluriel », a-t-elle encore salué.
Défenseur des droits des Palestiniens, Yehoshua était membre de B’Tselem, organisation israélienne de défense des droits humains et fervente opposante à l’occupation des territoires palestiniens par Israël. Cette association a salué, mardi, un homme ayant « dévoué son temps et son énergie à l’égalité, la paix et les droits humains pour tous ».
Le président israélien, Isaac Herzog, lui a aussi rendu hommage. Le travail de l’écrivain « s’inspirait de notre patrie et des trésors culturels de notre peuple, nous représentant dans un portrait fin, fidèle, compatissant et reflétant parfois une image douloureuse de nous-mêmes », a-t-il déclaré dans un communiqué. « Il évoquait en nous une mosaïque de sentiments profonds », a-t-il ajouté.
Avraham Yehoshua doit être inhumé, mercredi, au cimetière d’Ein Carmel dans le nord d’Israël.