Le CRIF en action
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Publié le 20 Novembre 2006

La menace iranienne : que faire ?

La séance plénière de la première convention nationale du CRIF était consacrée à l’Iran et à la menace nucléaire dans le cadre d’une table ronde, composée des analystes et géopolitologues Alexandre Adler, Dominique Moïsi et François Heisbourg, et animée par Gérard Akoun, co-président et éditorialiste de Judaïques FM.


En ouverture des débats, Brice Teinturier, directeur adjoint de TNS Sofres a présenté les résultats d’un sondage que le CRIF avait commandé, à l’occasion de cet événement, sur l’état de l’opinion française vis-à-vis de la menace iranienne. Les résultats de ce sondage publié dans le Parisien daté du 19 novembre montrent une véritable préoccupation des Français vis-à-vis de la menace iranienne envers Israël mais indiquent aussi le scepticisme des sondés dès qu’il est question d’évoquer des sanctions contre l’Iran.
Les intervenants ont évoqué tour à tour leur analyse de la situation. Dominique Moïsi, pour qui la lucidité et l’impuissance sont les deux mots qui s’imposent et sur lesquels se rejoignent l’opinion publique et la diplomatie, estime que la communauté internationale est résignée et ne peut que pratiquer que des manœuvres dilatoires afin de gagner un peu de temps. L’hypothèse d’un scénario de dissuasion militaire lui semble plus qu’improbable et l’adoption de sanctions économiques serait selon lui peu efficace. L’analyste a toutefois mis des nuances dans la formulation de parallèles entre Hitler et Ahmadinejad et insisté sur la limite des analogies auxquelles on a trop facilement recours. L’essentiel pour lui réside dans une nécessaire conciliation entre l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité.
François Heisbourg a quant à lui estimé que l’on pouvait attendre plus de la situation sur le plan diplomatique et a rappelé ce que représente aussi la gravité de la menace nucléaire iranienne pour des pays comme l’Egypte ou l’Arabie Saoudite. Les enjeux régionaux doivent être considérés sous l’angle d’une mésentente de l’Iran à la fois avec les pays arabes sunnites et chiites. De même, notre perception des ressorts de la vie politique intérieure et de la société iraniennes est très partielle. L’ONU laisse encore des perspectives de moyens d’action contre l’Iran tant qu’il n’apparaît pas de clivage entre les membres du Conseil de Sécurité quant au mode d’action à adopter. Le rapport de force diplomatique peut encore être un recours dans la situation actuelle.
Alexandre Adler a rejoint cette idée en ouvrant aussi la perspective de l’action militaire qui lui semble réalisable, nonobstant la menace que l’Iran ferait peser sur le cours du pétrole et qu’il n’est d’ailleurs pas forcément à même de mettre en œuvre. Question alliance, il faut aussi considérer que la Chine se rapprocherait de l’Arabie Saoudite pour des raisons pétrolières et que la Russie semble vouloir d’un partenariat avec l’Iran mais pas avec son président. L’analyste a insisté sur le nécessaire rapprochement des bonnes volontés et sur le rôle que les USA doivent jouer auprès de la Russie. L’Iran ne pourrait en tout état de cause pas vivre en autarcie, la situation intérieure du pays, hormis en ce qui concerne les hydrocarbures, est calamiteuse et la population iranienne ne souhaite pas être sacrifiée même si la question nucléaire remporte un ralliement très large. En conclusion, il lui paraît que les fondamentaux de la société iranienne sont excellents même si la situation est catastrophique et que beaucoup est encore à miser sur une population qui doit comprendre que beaucoup de choses pourraient changer.

Photo : © 2006 Alain Azria