Le vice Président de la J.J.JA.C. (Justice for Jews from Arab Countries) répond aux questions du Crif.
Depuis la Guerre d’Indépendance et la création de l’État d’Israël, on parle beaucoup , notamment dans la presse française, des « réfugiés palestiniens » et très peu des réfugiés juifs des pays arabes. Pour quelles raisons ?
C’est, hélas, une réalité et une grande injustice. En 1949, lorsque l’UNRWA ( United Nations Relief and Works Agency. Agence des Nations Unies pour les Secours et Travaux) est créée, on dénombre 726 000 “réfugiés palestiniens”, determinés en fonction de critères parfois étonnants comme celui-ci : « Est considéré comme réfugié palestinien tout Arabe qui, à l’occasion du conflit israélo-arabe, a été déplacé de plus de deux kilomètres ». Les milliers de Juifs palestiniens expulsés de leurs foyers ancestraux, n’ont pas, eux, été pris en compte. Par ailleurs, fait unique dans l’histoire des réfugiés à travers le monde, l’UNRWA, qui emploie des dizaines de milliers de salariés, a décidé que le statut de « réfugié palestinien » est transmissible de père en fils sans limitation dans le temps. Dès lors le nombre de réfugiés palestiniens s’est accru au point d’atteindre plus de six millions de personnes qui, poussées par l’Autorité palestinienne, réclament un « droit au retour » en terre d’Israël, ce qui est aussi irréaliste que surréaliste. Enfin, la carte de réfugié palestinien attribuée par l’UNRWA offre une telle gamme d’avantages que le nombre de Palestiniens qui décident d’avoir un métier et de s’engager dans une vie normale, abandonnant ainsi le statut de réfugiés, est infime.
Parallèlement au drame des Palestiniens, ce sont plus de 900 000 Juifs qui ont été expulsés dans des conditions souvent épouvantables, des pays arabo-musulmans. Une sorte de vengeance facile contre l’Israël vainqueur. L’État juif en a accueilli environ 600 000, les autres se retrouvant en Europe et en Amérique. Mais aucun organisme des Nations unies ne s’est chargé de leur venir en aide. Seules les communautés juives du monde entier et l’État d’Israël sont venus en aide à leurs frères en détresse.
Le rôle de la JJAC dont vous êtes le vice président mondial est, en quelque sorte, de réparer cette injustice et de faire en sorte que la mémoire de ces « réfugiés oubliés » soit perpétuée ?
Oui. Fondée en 2002 aux États-Unis, co-présidée par le rabbin Élie Abadie de New York, lui-même originaire du Liban et par l’ingénieur canadien, Sylvain Abitbol, d’origine marocaine, la JJAC s’est installée en France et c’est le CRIF qui a été choisi, par le biais de la commission que je préside, comme représentant français de l’organisation.
Tout au long des années, nous avons rencontré des dirigeants israéliens de haut niveau pour les inciter à mettre en avant la question des réfugiés juifs. Israël a longtemps voulu garder cette carte pour la négociation finale espérée avec les Palestiniens. Mais notre insistance et notre persuasion ont fini par payer. Le 23 juin 2014, la Knesset a adopté une loi fixant désormais au 30 novembre de chaque année, le Jour de la Commémoration de l’Expulsion et de l’Exode des Juifs des États arabes et de l’Iran. Cette loi a été signée par le Premier ministre Benjamin Nétanyahou, par le président Shimon Peres, par le ministre des retraités, Uri Orbach et par le président de la Knesset, Yuli Edelstein.
Quelles seront les applications pratiques de cette loi ?
D’un point de vue politique, tout d’abord, le sujet devra nécessairement être inclus dans les négociations de paix entre Israël et les Palestiniens. Le principe d’un échange de fait entre deux populations de réfugiés devra être admis et, dès lors, les prétentions au « droit au retour » des Palestiniens, définitivement écartées. Il convient de souligner que le montant des biens spoliés aux Juifs des pays arabo-musulmans est infiniment supérieur aux pertes matérielles que la Guerre d’Indépendance a pu occasionner aux populations palestiniennes.
D’autre part, d’un point de vue mémoriel, le fait que le sujet sera désormais inscrit au programme des établissements scolaires israéliens et qu’à travers le monde, autour du 30 novembre, mais pas seulement, des communications, des conférences, des débats, des projections de films, des publications, seront mises sur pied, permettra de maintenir vivace la mémoire millénaire du judaïsme en terre d’islam.