Tribune
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Publié le 17 Juin 2005

La presse en folie : Lyon, Gaza, Paris et Tunis

Klaus Barbie en croquis :



En 1987, le procès du chef de la Gestapo de Lyon Klaus Barbie, fut un événement historique. Jusqu'au 27 novembre le Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon expose 225 croquis au fusain qui retracent son déroulement. Le quotidien Metro (Lyon) rencontre le dessinateur René Diaz. Extraits de l’entretien :

Question : Pourquoi avez-vous suivi ce procès ?

Réponse :
J'étais journaliste dessinateur. Depuis 1945, photos et caméras étaient interdites dans les tribunaux. Dans ma carrière, j'ai mis en image plus de 3 500 procès, mais c'est celui de Barbie qui fut le plus marquant.

Question : Quel a été le moment le plus éprouvant ?

Réponse :
Tous ont été affreux, Klaus Barbie était un barbare, que l'on a jugé pour 17 crimes contre l'humanité. Le plus dur ce fut d'entendre les témoins qui avaient survécu aux massacres. Je me concentrais alors sur mes coups de crayons. J'avais très peur, je savais que j'assistais à un moment historique et que mes dessins serviraient de mémoire collective.

Question : Quel est votre croquis préféré ?

Réponse :
Je n'aime pas un dessin en particulier, j'aime surtout des détails. Je regardais souvent les mains des témoins. Les mains, c'est la vie. A travers elles, on comprend toutes leurs souffrances.

Question : Que représente pour vous cette exposition ?

Réponse :
C'est symbolique. Klaus Barbie a sévi à Lyon et ici-même, au CHRD. En exposant mes dessins ici, je rends hommage à toutes ses victimes et surtout aux 44 enfants juifs d'Izieu, qu'il a fait exécuter (…).

Question : Et après ?

Réponse :
J’ai offert mes croquis à l'état d'Israël. Dès novembre, ils partiront pour le mémorial de la Shoah. J'aurai alors le sentiment d'avoir achevé mon travail.

Propos recueillis par Vanessa Martin pour Métro Lyon, 9 juin 2005


Les Français ne croient pas en Dieu :

Si une grande majorité de Français se considèrent comme catholiques, près de la moitié ne croient pas en Dieu ou sont agnostiques, souligne un sondage Ipsos pour l’agence Associated Press.


Attachés au principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, la grande majorité (85%) sont opposés à ce que le clergé cherche à influencer les décisions du gouvernement. Selon le sondage, 19% des Français ne croient pas en Dieu, 16% sont agnostiques, tandis que 14% disent croire à une « puissance supérieure ».


Carrefour de religions, la France compte la plus forte communauté musulmane et juive d’Europe occidentale. L’islam, avec un nombre estimé de cinq millions d’adeptes, est la deuxième religion de l’hexagone mais loin derrière le catholicisme.


Le sondage montre que 71% des Français se disent catholiques, 4% musulmans, 3% protestants, 1% juifs et 1% bouddhistes. Les autres religions représentent 1% et ceux qui disent ne pas avoir de religion 19%.


Toutefois, les deux tiers des Français (63%) déclarent que la religion n’est pas importante dans leur vie, alors que 37% sont d’un avis contraire.


Les Français sont 24% à se dire sûrs de l’existence de Dieu tandis que 14% pensent qu’Il existe même s’ils ont des doutes.


(Source : Le sondage AP-Ipsos a été conduit auprès d’un millier d’adultes dans chacun des dix pays étudiés dont la France entre le 12 et le 26 mai et comporte une marge d’erreur de trois points.)


« Le retrait de Gaza est légal » :

La Cour suprême israélienne a déclaré jeudi 9 juin que le plan de désengagement de la Bande de Gaza était légal, levant ainsi le dernier obstacle au retrait programmé pour cet été.


Les onze juges de la Cour ont rejeté les 12 pétitions déposées par des opposants au retrait israélien de la Bande de Gaza et de quatre colonies isolées de Cisjordanie, décidant ainsi que ce retrait ne violait pas les droits des colons (Associated Press).


Les européens, les Juifs et Israël :

43 % des Européens estiment que les Juifs sont plus concernés par l'Etat d'Israël que par leur propre pays, tandis que 42 % sont d'avis que les « Juifs parlent trop de la Shoah », selon un sondage effectué dans 12 pays européens sur un échantillon de 6 000 personnes, repris ce mercredi 8 juin par le quotidien Yediot Aharonot. Pour 20 % des habitants de l'Ancien Continent, ce sont les Juifs qui ont tué Jésus. Avraham Foxman, de la ligue antidiffamation, a dénoncé le fait que « des millions d'Européens croient encore aux stéréotypes antisémites ».

(Source : Jerusalem Post Edition Française)


Un millier de juifs israéliens se sont rendus fin mai à la synagogue de la Ghriba, à Djerba : D'une année sur l'autre, le nombre de ces visiteurs traduit l'évolution des relations entre l'État hébreu et les pays arabes, selon L’intelligent. Jeune Afrique (5 juin 2005) :

Nous reproduisons ci-après l’article publié par l’Intelligent :

« Les 26 et 27 mai, quelque 4 000 juifs, dont environ 1 000 ressortissants israéliens originaires de Tunisie, ont pris part au pèlerinage de la Ghriba, la plus ancienne synagogue d'Afrique, située sur l'île de Djerba, à 500 km au sud de Tunis. Les pèlerins en provenance d'Israël auraient pu être beaucoup plus nombreux - on avait tablé, au départ, sur 2 000 voire 3 000 personnes - si les vols directs envisagés un premier temps entre l'aéroport Ben-Gourion de Tel-Aviv et celui de Djerba-Mellita avaient été maintenus. Beaucoup d'Israéliens ont dû renoncer au voyage après l'annulation des vols directs prévus par la compagnie charter tunisienne Karthago Airlines. C'est René Trabelsi, fils de Pérez Trabelsi, président de la communauté juive de Djerba, qui a organisé, via son agence de voyages parisienne, le transfert d'une grande partie de ces pèlerins. Ces derniers ont dû transiter par la Jordanie, la France, la Turquie, l'Italie et Malte.


La reprise des contacts entre Israéliens et Palestiniens et l'invitation adressée par le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali au Premier ministre israélien Ariel Sharon, pour assister au second volet du Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI), prévu à Tunis les 16 et 18 novembre, ont encouragé nombre de juifs à faire le voyage vers leur pays natal. En revanche, les protestations de certains mouvements de l'opposition tunisienne contre ce projet de visite en ont dissuadé beaucoup d'autres.


Les autorités tunisiennes avaient pourtant pris toutes les précautions pour que la fête ne soit entachée d'aucune fausse note. Ainsi, trois jours durant, de très nombreux policiers, en uniforme et en civil, ont sillonné l'île en voiture et à cheval, gardant jour et nuit les hôtels où étaient logés les pèlerins. Les barrages ont été multipliés aux alentours de la synagogue et des autres lieux visités par les pèlerins, notamment l'école talmudique Yéchivat, la grande mosquée de Mellita, l'église catholique de Houmet Essouk, chef-lieu de l'île, l'église orthodoxe La Marsa et la synagogue Ezer. Partout, des dizaines d'agents de sécurité étaient postés, certains sur les toits, munis de jumelles. Comme beaucoup de pèlerins s'étaient déplacés à l'intérieur du pays, notamment à Tunis, Nabeul, Sousse et Gabès, où vivaient, durant la première moitié du siècle dernier, d'importantes communautés israélites, un important dispositif de sécurité a dû aussi être déployé à chacun de leurs déplacements.


Comme à l'accoutumée, le ministre tunisien du Tourisme, Tijani Haddad, a tenu à rencontrer les pèlerins dans l'enceinte de la synagogue pour leur souhaiter la bienvenue et leur « transmettre les salutations du chef de l'État ». La plupart des personnalités juives françaises qui ont pris part à l'événement, notamment l'écrivain Alexandre Adler, le journaliste Ivan Levaï, directeur de la Tribune juive à Paris, Ofer Bronchtein, président du Centre international de paix au Proche-Orient, et Gabriel Kabla, président de l'Association des juifs tunisiens en France, ont profité de l'occasion pour saluer l'invitation de Ben Ali à Sharon. Ils l'ont qualifiée d'« acte courageux, symbolique et fort », prouvant que « le Maghreb en général et la Tunisie en particulier sont en avance dans le processus de paix arabo-israélien par rapport au Moyen-Orient ».


C'est un chrétien d'Afrique, le Carthaginois Tertullien (155-225 après J.-C.), qui écrivait au gouverneur romain de l'Afrique proconsulaire : « Il est de droit humain et de droit naturel que chacun puisse adorer ce qu'il veut, car la religion d'un individu ne nuit ni ne sert à autrui. » Cette sentence a longtemps constitué une règle de conduite pour les habitants de la Carthage punique, de l'Africa romaine, de l'Ifriqiya arabe et de la Tunisie contemporaine. Dans ce pays, les communautés les plus diverses ont toujours cohabité en bonne intelligence. Le pèlerinage de la Ghriba, qui réunit chaque année vers la mi-mai des juifs en provenance du monde entier, aux côtés des habitants musulmans de l'île, en est une éloquente illustration.


Depuis 1993, année qui a vu la signature du premier accord de paix israélo-palestinien, à Oslo, en Suède, mais aussi la renaissance de cette vieille tradition juive interrompue pendant trois décennies, ce pèlerinage a souvent constitué un moment fort de rapprochement entre musulmans et juifs, Tunisiens arabes et Israéliens natifs de Tunisie. Devenu un instrument de « diplomatie religieuse », ce rite a connu son apogée à la fin des années 1990, lorsque Palestiniens et Israéliens négociaient à New York, Taba et Charm el-Cheikh une paix des braves. D'autant que, profitant de cette embellie dans les relations arabo-israéliennes, Tunis et Tel-Aviv avaient ouvert, en 1996, des bureaux d'intérêts dans leurs capitales respectives.


Le déclenchement de la seconde Intifada, fin septembre 2000, les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, attribués au réseau islamiste d'al-Qaïda, et l'explosion d'un véhicule piégé, devant la synagogue elle-même, le 11 avril 2002, provoquée par un kamikaze membre de l'organisation terroriste d'Oussama Ben Laden n'ont pas tardé à mettre un frein à cette dynamique.


Ainsi, après avoir culminé à près de 8 000, en mai 2000, le nombre de pèlerins à la Ghriba n'a cessé de décroître. En mai 2002, quelques semaines après l'attentat contre la synagogue, seuls 200 juifs étrangers ont bravé la peur et effectué le pèlerinage sous une très haute surveillance policière.


En mai 2003, un millier de juifs, dont 450 venus de l'étranger, principalement de France, et seulement une dizaine de ressortissants israéliens ont visité l'île tunisienne durant le pèlerinage. L'année dernière, celui-ci a eu lieu, malgré l'actualité sanglante du Proche-Orient, mais les visiteurs n'étaient guère nombreux. Par l'affluence qu'il a enregistrée, le pèlerinage de cette année pourrait donc constituer un nouveau tournant.


La communauté juive de Tunisie était l'une des plus importantes du monde arabe. De 100 000 âmes à la veille de l'indépendance, en 1956, elle est passée à un peu plus de 2 000 aujourd'hui, établie principalement à Djerba et Zarzis (dans le sud du pays), à Sousse (au centre) et à Tunis. Les quelque 98 000 juifs qui ont quitté le pays en vagues successives se sont établis en majorité en France et en Israël. Le pèlerinage de la Ghriba est pour nombre d'entre eux, qu'ils soient religieux ou laïcs, l'occasion d'un retour aux sources. »


Marc Knobel