Tribune
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Publié le 15 Janvier 2014

Journal d'un prof débutant (épisode 21) : « Mais, madame, la quenelle, ce n'est qu'un geste ! »

Par Louise Cuneo

 

"Il s'est passé un truc." Sophie n'en revient toujours pas : depuis le retour des vacances de fin d'année, les élèves se comportent - presque - bien. Même l'horrible classe de quatrième, d'habitude si pénible, se tient à carreau. La jeune prof n'est pas dupe pour autant : "Nous sommes, eux comme moi, bien disposés, reposés et calmes. Je sais que cela va durer deux ou trois semaines au mieux, que rien n'est gagné, mais cela s'est vraiment arrangé. Comme si le test qu'ils m'avaient fait passer était terminé, et qu'ils savaient désormais à qui ils ont affaire."

Et cette nouvelle ambiance fait des miracles. Avec ses quatrièmes, Sophie a commencé le cours d'éducation civique. Au programme : l'exercice des libertés en France. "C'est formidable, le lien avec le Siècle des Lumières étudié en histoire se fait tout seul !" s'enthousiasme Sophie. "Non seulement ce chapitre les aide à comprendre l'intérêt de l'Histoire, mais le lien avec l'actualité était évident avec l'affaire Dieudonné." Et les élèves de comprendre les enjeux du débat, et d'étendre leur réflexion dans une dimension presque philosophique : "Ils se sont eux-mêmes demandé comment gérer des propos antisémites."

 

La discussion s'est emballée, les jeunes gens suivaient, participaient et n'en perdaient pas une miette. Certains interpellaient leur enseignante : "Mais, madame, la quenelle, ce n'est qu'un geste ! Et regardez, il y a même un footballeur qui en fait..." Et Sophie d'expliquer que derrière ce geste, il y a des mots, une idéologie. Que peut-être cette idéologie n'est pas saisie par tous ceux qui font ce geste. Que c'est justement pour savoir et comprendre ce qui se cache derrière des symboles qu'il est important d'aller à l'école. L'enseignante a ainsi retracé les grandes lignes de la Shoah, devant des élèves qui pour la quasi-totalité, n'en avaient jamais entendu parler… Lire la suite.